Intervention de Jean-Yves Leconte

Réunion du 27 mai 2021 à 14h30
Gestion de la sortie de crise sanitaire — Adoption définitive des conclusions d'une commission mixte paritaire sur un projet de loi

Photo de Jean-Yves LeconteJean-Yves Leconte :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, lors de l’examen du texte, l’orateur du groupe socialiste, Marie-Pierre de La Gontrie, avait évoqué un texte en trompe-l’œil, témoignant d’une volonté d’annoncer la fin de l’état d’urgence sanitaire, tout en permettant au Gouvernement de conserver des prérogatives exorbitantes du droit commun en matière de restriction de circulation, d’interdiction de rassemblements ou d’événements, de fermeture d’activités ou d’établissements. En définitive, la seule chose que le présent projet de loi n’autorise pas le Gouvernement à faire est d’imposer un confinement total… qu’il peut mettre en œuvre par décret !

La discussion entre l’Assemblée nationale et le Sénat s’est donc conclue par un accord, dans lequel la majorité sénatoriale a dû renoncer à plusieurs garanties votées la semaine dernière par notre assemblée – c’est tout le sens du compromis. Malheureusement, elle a souvent « lâché » sur des dispositions issues de l’adoption d’amendements du groupe socialiste.

Si la situation en France et en Europe apparaît plus favorable aujourd’hui, avec une vaccination offrant des perspectives optimistes en dépit des foyers de reprise, la pandémie frappe encore très durement dans le monde et plusieurs pays sont aujourd’hui tragiquement touchés. En conséquence, nous ne pouvons pas totalement baisser la garde et prétendre que nous sommes sortis de la crise.

Cela rend indispensable le débat sur le pass sanitaire, que l’on ne peut pas restreindre au fait de savoir si la liberté réside dans l’adoption ou non de ce pass. Il est évident que, sans pass, il y aura des risques et que, tant qu’il y a des risques, on ne pourra pas retrouver une vie normale. Voilà pourquoi le groupe socialiste a fait le choix du pass sanitaire, bien encadré.

Pour autant, le texte ne prévoit pas un encadrement strict du dispositif. Nous avons été vigilants sur la protection des données et sur l’usage du pass, mais nous devons constater que l’ensemble des recommandations de la CNIL n’ont pas été prises en compte.

Si celle-ci avait bien pris acte des précisions apportées par le Gouvernement quant à la nature des lieux, établissements et événements concernés par ce dispositif et du fait que ceux-ci seraient définis par voie réglementaire, elle suggérait que la jauge, le seuil de fréquentation minimale au-delà duquel le pass sanitaire pourrait être utilisé, et les types d’établissements fassent l’objet d’un encadrement législatif. Cette suggestion n’a pas été retenue, et c’est une des raisons majeures de notre rejet du présent texte.

Le débat parlementaire n’a pas non plus montré, à ce stade, la volonté du Gouvernement de reconnaître les certificats de vaccination et de rétablissement établis à l’étranger.

Si l’on peut considérer que le règlement européen sur le certificat vert numérique encadre cette reconnaissance pour les documents européens, nous n’avons rien au-delà. De nouveau, nous avons constaté au cours du débat que le Gouvernement n’envisageait aucune reconnaissance systématique et, alors qu’une telle mesure avait été adoptée au Sénat, elle a été sacrifiée sur l’autel de l’accord avec l’Assemblée nationale.

Il semble également que le Gouvernement – cela a été dit au cours des discussions au Sénat – envisage de poser des conditions plus strictes à l’entrée que les simples conditions liées au certificat vert numérique européen. Si cela signifie que ce dernier s’appliquera lorsque l’on arrivera d’un pays de l’Union européenne, avec des restrictions supplémentaires dans les autres cas, il faut au moins prévoir un dispositif coordonné au niveau de l’Union européenne. Sans quoi, ces mesures ne seront pas effectives et n’auront d’autre but que de s’adresser à l’opinion ; ce seront des mesures politiques, non sanitaires.

Hier, par exemple, le Gouvernement a décidé d’imposer une quarantaine aux voyageurs en provenance du Royaume-Uni, alors que la situation y est plus favorable qu’en France. C’est, on le comprend bien, pour tenir compte du variant indien, mais nous savons que, pour avoir une utilité, ces mesures doivent être coordonnées au niveau européen. À quoi sert-il de négocier des convergences sur certains sujets si, dans le même temps, on prend des initiatives divergentes ? Quelle est l’efficacité ? On se le demande…

Enfin, en tant que sénateur des Français établis hors de France, je ne saurai prendre la parole sur ce texte sans évoquer l’article 12.

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