Madame la présidente, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, le climat de déconfinement ne doit pas nous faire oublier le danger permanent qui plane sur notre pays et qui est lié au terrorisme. Les faits sont simples : 469 personnes sont actuellement détenues dans les prisons françaises pour des actes de terrorisme islamiste ; 253 sont condamnées et purgent leur peine ; 163 devraient être libérées dans les quatre prochaines années et présentent un risque réel de réitération des faits.
Je crois important de revenir sur ces chiffres, qui figurent dans le rapport de Muriel Jourda. Ce risque n’est pas théorique : de trop nombreux attentats ont été commis sur notre sol, jusque dans nos centres pénitentiaires. La question des sortants de prison illustre de façon emblématique l’évolution d’une menace de plus en plus endogène dans notre pays.
Nous éprouvons « plus qu’une inquiétude, une vraie peur » s’agissant « des dizaines de personnes qui vont sortir de prison, qui sont très dangereuses et dont les convictions sont absolues. Elles constituent la menace prioritaire aujourd’hui ». Ainsi s’exprime Jean-François Ricard, procureur de la République antiterroriste. Son constat est partagé par tous les acteurs concernés et nous dit l’urgence d’agir pour mieux protéger les Français.
Aussi, le 27 juillet dernier a été adoptée la loi instaurant des mesures de sûreté à l’encontre des auteurs d’infractions terroristes à l’issue de leur peine. En effet, la remise en liberté de détenus condamnés, potentiellement toujours radicalisés en dépit de l’accomplissement de leur peine et du travail réalisé, appelle des mesures spécifiques afin de prévenir la récidive. Il est donc de notre devoir de mettre tout en œuvre pour garantir la sûreté de nos concitoyens.
Dans sa décision du 7 août dernier, le Conseil constitutionnel a toutefois considéré que le dispositif retenu par le Parlement portait une atteinte qui n’était ni adaptée ni proportionnée aux droits et libertés constitutionnellement garantis. Plusieurs articles de la loi ont été jugés contraires à la Constitution. En dépit de cette censure, le Conseil constitutionnel n’a pas remis en cause le principe de la mesure de sûreté.
La proposition de loi que nous examinons cet après-midi est essentielle. En effet, elle répond à l’enjeu que représente la sortie de détention de ces personnes qui ne bénéficieront pas de mesures d’accompagnement.
Tout en reprenant le principe du dispositif adopté par le Parlement au mois de juillet dernier, ce texte y apporte des aménagements qui prennent en compte les objections formulées par le Conseil constitutionnel. Il a d’ailleurs été conforté par l’adoption de plusieurs amendements en commission.
Je pense notamment à la possibilité de prononcer une mesure de sûreté, lorsque le sursis probatoire est révoqué, et à l’impossibilité de cumuler une peine de sûreté avec une peine assortie d’un sursis simple.
Je pense aussi à l’ajout d’un avis systématique du juge de l’application des peines pour éclairer utilement les décisions prises dans le cadre des mesures de sûreté.
Avant de conclure, je tiens à remercier François-Noël Buffet de son initiative. Malgré une actualité qui pourrait nous laisser penser que ce sujet n’est pas une priorité, c’en est une !
Monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, les Français attendent de l’État qu’il les protège et c’est bien normal. La sécurité est l’un des fondements de notre contrat social. Si une menace existe, elle doit être prise en compte ; s’il existe un vide juridique, il doit être comblé. Tel est l’objectif de ce texte.
Le combat contre le terrorisme est aussi et surtout un combat collectif : il exige la mobilisation de chacun – services de renseignement, forces de sécurité, magistrats et responsables politiques.
En conclusion, le groupe Les Indépendants votera sans réserve ce texte, qui ajoute une arme à notre arsenal. Cet arsenal est celui de l’État de droit.