Cette stratégie a été développée par Olivier Noblecourt, qui était alors délégué interministériel à la lutte contre la pauvreté, et qui a quitté ces fonctions après avoir élaboré cette stratégie mais avant qu'elle n'est ait été pleinement mise en oeuvre. La délégation interministérielle est une toute petite instance, qui regroupe moins de dix personnes à effectif complet dans la délégation centrale, auxquels il faut ajouter les délégués régionaux - dont le nombre se limite à une personne par région. Vous voyez ce que cela peut vouloir dire à l'échelle d'une région comme la Nouvelle-Aquitaine ! C'est une toute petite équipe. Et en réalité, cet effectif a été plus souvent inférieur à l'effectif autorisé : certains départs n'ont été compensés qu'au bout d'un grand nombre de mois. L'institution chargée de piloter cela au niveau central et les délégués régionaux de cette institution ont donc très peu de moyens.
Deuxième point : les grandes administrations qui ont cette capacité, que ce soient les administrations nationales - notamment la direction générale de la cohésion sociale - ou les services départementaux ou régionaux, n'ont pas de liens hiérarchiques ou structurels avec cette mission interministérielle. Il existe donc une stratégie globale, mais pas de cohérence de pilotage global de la stratégie au niveau de l'État.
Troisième problème : les instruments de mesure, qui relèvent souvent de collectivités départementales ou municipales, n'ont pas été mis en oeuvre. Il n'existe pas de système informatique qui permette - je pense aux petits déjeuners et aux cantines - de suivre quantitativement et effectivement la mise en oeuvre des mesures. Nous demandons à ce que soit mis en place un système qui permette de faire ce suivi. Si vous essayez de suivre une stratégie nationale qui concerne des centaines de milliers d'enfants et que vous le faites au moyen de quelques exemples illustratifs, on voit bien que ce n'est pas un suivi satisfaisant. Cela a été pour moi une source d'étonnement. Mes souvenirs de l'administration étaient que les données remontaient, étaient centralisées, et qu'on avait des instruments de suivi. L'action était plus ou moins efficace, l'évaluation de cette efficacité était plus ou moins bien assurée, mais les instruments de remontée statistique, qui sont la base de tout, sont ici incomplets, indisponibles. Cela a été pour le comité une source de frustration.