Intervention de Claude Malhuret

Réunion du 1er juin 2021 à 14h30
Modification du règlement du sénat — Article 9

Photo de Claude MalhuretClaude Malhuret :

À la différence de la plupart des mesures envisagées dans ce texte, qui sont consensuelles, celle qui est prévue à l’article 9 a cristallisé une opposition nette de six des groupes de notre assemblée lors des débats au sein du groupe de travail.

Ce n’est pas étonnant, puisque cette mesure et, encore plus, la proposition n° 30 du groupe de travail qui sera étudiée en conférence des présidents et qui consiste à remplacer le tirage au sort actuellement utilisé pour fixer l’ordre des interventions en discussion générale par l’importance numérique des groupes, ce qui relèguera systématiquement les groupes les moins nombreux en fin de discussion, aboutiront à ce que les interventions de ces groupes seront désormais pénalisées et, j’allais dire, marginalisées.

La règle actuelle du tourniquet est beaucoup plus démocratique. Elle permet de faire en sorte que l’ordre des interventions n’obéisse pas à la loi du plus grand nombre. C’est le système qui est en vigueur à l’Assemblée nationale, mais il l’est également dans la plupart des parlements des pays démocratiques.

Ces propositions, qui ne figuraient pas dans les propositions de notre rapporteur, ont été introduites lors de la dernière séance du groupe de travail par le groupe Les Républicains. Aux six présidents de groupe qui s’y opposaient, le président du groupe Les Républicains a répondu qu’il s’agissait de l’application du fait majoritaire – c’est d’ailleurs ce qu’on vient de nous répéter aujourd’hui – et, donc, de la démocratie.

Il y a deux conceptions de la démocratie : celle, traditionnelle, qui donne tout le pouvoir à la majorité et celle, plus actuelle, qui consiste à protéger les droits des minoritaires, comme l’a expliqué tout à l’heure Vanina Paoli-Gagin en citant Albert Camus. C’est cette dernière conception qui règne aujourd’hui au Sénat et qui donne à celui-ci une ambiance particulière, tenant notamment au respect et à l’attention accordés aux petits groupes et aux groupes d’opposition.

Bien entendu, comme notre collègue Kerrouche vient de le dire, ce gentleman ’ s agreement ne remet pas en cause le fait majoritaire ; il traduit simplement l’écoute que nous portons aux sénateurs de tous les groupes, quelle que soit leur taille.

C’est un peu de cet esprit d’ouverture et de tolérance qui s’en va avec ces deux propositions, un peu de l’esprit du Sénat. C’est la raison pour laquelle six groupes sur huit s’y sont opposés.

Je demande à mes collègues des deux groupes majoritaires de préserver cet esprit d’ouverture et de tolérance et de se joindre à nous pour supprimer cet article.

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