Intervention de Julien Denormandie

Réunion du 3 juin 2021 à 9h30
Questions orales — Apaisement des conflits familiaux et rôle de l'avocat-médiateur

Julien Denormandie :

Madame la sénatrice, vous appelez l’attention du garde des sceaux, dont je vous prie de bien vouloir excuser l’absence, sur la proposition de loi que vous avez déposée le 13 juillet 2020. Celle-ci a trois objets.

Premièrement, vous souhaitez rendre obligatoire l’entretien d’information préalable sur la médiation dans toute procédure familiale, sauf en cas de violence. Cette généralisation risque d’alourdir et d’allonger les procédures. Elle imposerait de multiplier les permanences d’information à la médiation, car les séances d’information collectives se révèlent souvent moins efficaces que les entretiens individuels. Il convient d’achever l’expérimentation de la tentative de médiation familiale obligatoire, actuellement en cours dans onze juridictions et prochainement élargie à d’autres juridictions, afin d’avoir de premiers résultats.

M. le garde des sceaux est, comme vous, favorable au développement de la médiation, comme en témoignent les amendements qu’il a déposés sur le projet de loi pour la confiance dans l’institution judiciaire. Ceux-ci ont également été défendus par le secrétaire d’État Adrien Taquet.

Deuxièmement, vous invitez à légiférer sur la résidence alternée, afin de mettre fin à l’aléa judiciaire. Le taux de 12 % d’enfants en garde alternée que vous évoquez s’applique toutefois à l’ensemble des situations de séparation, qu’elles soient judiciaires ou non. De nombreux parents séparés organisent en effet la vie de leurs enfants sans recourir au juge. Dans le cadre judiciaire, dans 80 % des situations, les parents s’accordent et ne choisissent la résidence alternée que dans 19 % des cas.

En cas de désaccord, le juge applique les critères fixés par l’article 373-2-11 du code civil, tels que la pratique antérieure des parents, les sentiments exprimés par l’enfant, l’aptitude de chacun des parents à assumer ses devoirs et respecter les droits de l’autre, etc.

Il n’est donc pas opportun de définir un cadre rigide comportant un seuil d’âge ou une distance géographique. Les situations familiales sont par nature complexes et le juge doit pouvoir apprécier au cas par cas l’intérêt de l’enfant. En pratique, les juges motivent tout particulièrement ces décisions sensibles sans que la loi ait à l’imposer.

Le recours à la résidence alternée, qui a augmenté de 15 % sur les quatre dernières années, évolue avec la société.

Troisièmement, en cas de déplacement durable de l’un des parents, vous souhaitez que soit favorisé le maintien des repères de l’enfant. Cette orientation est conforme à la pratique des juridictions, qui veillent, dans le cadre de l’article 373-2-11 du code civil, au maintien de la stabilité du cadre de vie de l’enfant. Il n’est donc pas nécessaire de légiférer en la matière.

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