Madame la ministre, ma question porte sur le versant fiscal. Les nouveaux géants du numérique atteignent une valorisation boursière supérieure à celle des entreprises traditionnelles, et pourtant, leur taux d’imposition est largement inférieur, en raison du caractère immatériel de leur création de valeur qui leur permet de mettre en place des stratégies d’optimisation fiscale.
En effet, la taxation de ces géants échappe au cadre fiscal traditionnel où les bénéfices sont taxés par les États dans lesquels les entreprises ont leur siège, plutôt que là où elles exercent leurs activités, sauf établissement stable qui suppose des locaux et du personnel.
Cette fiscalité des géants du numérique suscite, depuis plusieurs années, d’âpres débats au sein de l’Union européenne. En mai dernier, Amazon a remporté une victoire lorsque la justice européenne a validé les rabais fiscaux obtenus par le géant du commerce en ligne au Luxembourg. Cette validation a été un camouflet pour la Commission européenne, qui y voyait des aides d’État illégales dont elle exigeait le remboursement.
Bruxelles avait déjà perdu face à Apple, en juillet 2020, devant cette même juridiction. Les juges avaient alors annulé le remboursement à l’Irlande de 13 milliards d’euros d’avantages fiscaux considérés comme indus par la Commission.
Face à l’enlisement de la situation, certains États ont tenté de faire cavalier seul. La France a ainsi adopté la taxe de 3 % sur le chiffre d’affaires réalisé par les géants du numérique, qui n’a rapporté, comme cela a déjà été dit, que 400 millions d’euros en 2019.
Pourtant, la France s’est exposée aux représailles des États-Unis qui ont relevé des droits de douane sur certains produits, tels que le vin – vous comprendrez que pour un élu du Beaujolais ce soit douloureux. Elle a également subi la réaction des Gafam, tels que Google ou Amazon, qui ont augmenté le tarif des publicités des annonceurs.
Joe Biden a suggéré, en avril dernier, de taxer à 21 % les multinationales partout dans le monde, mais le Trésor américain a depuis revu ses ambitions à la baisse, en proposant un taux de 15 % à ses partenaires.
Une étude de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) sur ces propositions a révélé qu’aucun pays, à part les paradis fiscaux, ne subirait de pertes de revenus au titre de l’impôt sur les sociétés. Encore mieux, les recettes fiscales de l’Union européenne pourraient gonfler de 13 % à 50 % selon l’ambition de la réforme en négociation. Nous voyons clairement se dessiner la perspective d’un accord historique lors du prochain G7, …