Madame la ministre, depuis 2015, la question des frontières et de leur contrôle a envahi de nouveau le débat public en France et en Europe, à la suite notamment des attentats de novembre 2015, des conséquences migratoires de la guerre en Syrie, mais également de la pandémie de la covid-19. Pour ma génération qui a connu la construction européenne, avec en point d’orgue la chute du mur de Berlin, le retour à la frontière marque, c’est certain, un net retour en arrière.
Ces dernières années, la vision humaniste d’accueil de notre pays, mais également du continent européen, a été sérieusement écornée par une gestion uniquement sécuritaire des migrations. Cette gestion a occasionné et occasionne toujours de terribles drames humains. Nous avons pu le voir encore récemment avec ces images de réfugiés, pour la plupart marocains, tentant de rejoindre l’enclave de Ceuta ; et nous pouvons malheureusement l’observer, chaque mois, chaque semaine, en Méditerranée, où des dizaines de milliers de réfugiés ont péri noyés depuis 2015.
Ces drames à répétition montrent bien qu’une gestion uniquement sécuritaire n’a que peu de conséquences sur la venue des réfugiés, qui préféreront toujours prendre tous les risques pour rejoindre l’Europe plutôt que de rester dans leur pays d’origine.
Cette déshumanisation de la question migratoire s’illustre également dans la gestion des centres de rétention administratifs, en Europe, mais également en France : je pense notamment au centre du Mesnil-Amelot, que j’ai visité plusieurs fois et où les conditions de rétention sont plus que difficiles, pour employer un euphémisme…
Madame la ministre, la réponse à la crise migratoire sera européenne, mais la position française restera-t-elle uniquement sécuritaire ? À quand, enfin, une dimension solidaire et humaniste ?