Intervention de Jérôme Fournel

Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation — Réunion du 9 juin 2021 à 9h10
Modalités de sortie des aides aux entreprises — Audition de Mm. Jérôme Fournel directeur général des finances publiques christophe beaux directeur général du mouvement des entreprises de france erick lacourrège directeur général des services à l'économie et du réseau de la banque de france et william nahum président du centre d'information sur la prévention des difficultés des entreprises

Jérôme Fournel, directeur général des finances publiques :

Je commencerai par un constat : la mobilisation de la DGFiP pendant la crise a été très forte. Le bilan a été fait des mesures de bienveillance fiscale, impôt par impôt, prises pendant la crise : il y en a plus d'une cinquantaine. Nous avons fait dans la dentelle, si je puis dire, pour adapter les dispositions fiscales en vigueur. J'ajoute que le prélèvement à la source et les acomptes contemporains destinés aux indépendants ont eux aussi été adaptés, lorsque les entreprises le demandaient, à la réalité de leur situation économique.

Quant au déploiement du fonds de solidarité, il n'est absolument pas terminé. En comptant les demandes d'indemnisation payées jusqu'au mois d'avril, nous en sommes à 2,8 milliards d'euros ; le fonds de solidarité est en train de franchir, ces jours-ci, les 30 milliards d'euros de décaissement d'aides aux entreprises.

L'heure est venue également de l'action de sortie de crise ; celle-ci passera par des structures comme les comités départementaux d'examen des problèmes de financement des entreprises (Codefi), qui sont chargés de rassembler sur chaque territoire les parties prenantes économiques autour du préfet. Ces organismes ont enregistré une multiplication par trois du nombre des saisines pendant la crise. Une curiosité : là où d'ordinaire on constate une corrélation entre ce qui se passe du côté des Codefi et ce qui se passe ensuite du côté des commissions des chefs de services financiers (CCSF), qui rassemblent les créanciers publics, en matière de prise en charge des dettes fiscales et sociales, on observe en l'espèce que le nombre de dossiers traités par les CCSF a été divisé par deux. Un niveau de surveillance très fort, donc, s'assortit de statistiques très basses concernant les défaillances financières d'entreprises.

La sortie de crise se présente de deux manières.

D'une part, nous sommes encore loin d'avoir totalement épuisé nos missions de crise. Le Gouvernement est en train de prendre les décrets qui vont lui permettre d'organiser le retrait en paliers des dispositifs d'urgence, la logique étant de faire perdurer le fonds de solidarité au titre du mois de mai dans les mêmes conditions qu'en avril et, concernant juin, juillet et août, d'éteindre progressivement les dispositifs s'agissant des secteurs qui rouvrent, en préservant ceux qui sont destinés aux secteurs qui restent fermés. D'autre part, va être engagé le plan annoncé par Bruno Le Maire voilà une semaine, organisé selon trois axes.

Premièrement, il faut que les acteurs qui sont au contact des entreprises travaillent ensemble. La sortie de crise se passera mal si chacun fait cavalier seul. Le premier acte de ce plan consiste donc à mettre autour de la table tous les professionnels qui gravitent autour des entreprises, d'où l'accord formalisé dans la récente charte d'engagement. Des entreprises se retrouveront en difficulté, c'est certain - on ne sait pas quand. Vu la robustesse de la reprise, on peut estimer que ces difficultés seront moins importantes que prévu. Mais nous ne sommes pas là pour faire des paris : il faut que nous soyons prêts, ce qui veut dire nous montrer capables de capter un maximum de signaux. Le comité départemental à la sortie de crise incarne cette volonté, qui passe aussi par des rapprochements effectués entre des outils jusqu'alors fragmentés.

Deuxièmement, le conseiller départemental à la sortie de crise, qui sera un agent de la DGFiP, jouera un rôle d'orientation auprès des entreprises, leur indiquant quelles sont les solutions adaptées sur la base des informations collectées et dans le respect du principe de confidentialité.

Troisièmement, s'agissant des solutions de sortie de crise proprement dites, elles sont notamment de nature financière, avec des prêts du Fonds de développement économique et social (FDES) et des prêts participatifs par exemple. Je citerai également les mesures de report d'échéances fiscales et sociales, jusqu'à 48 mois dans le cas des procédures qui passent devant la CCSF - nous avons allongé le report à 36 mois même là où aucune procédure n'est engagée par les créanciers publics. Nous nous sommes donc montrés très volontaristes en matière d'accompagnement des entreprises en difficulté.

Un champ nouveau s'est mis en place, qui consiste à maximiser tout ce qui a trait à la prévention et à l'accompagnement, dans le cadre de procédures raccourcies à trois mois - c'est le dispositif de sortie de crise -, afin que les entreprises ne craignent pas de rencontrer les juges ou de se faire déposséder de leur activité. L'objectif est, au contraire, qu'elles soient mises en situation de reprendre leur activité.

L'intérêt de l'accord, qui rassemble toutes les parties prenantes, est que tout le monde accepte de jouer le jeu. Le dispositif inclut l'administration judiciaire - la charte est cosignée par le garde des Sceaux -, mais également l'ensemble des autres acteurs - les administrateurs judiciaires et mandataires judiciaires (AJMJ) et toutes les personnes ayant un mandat de l'entreprise pour faire de la conciliation ou de la restructuration de dette privée -, qui acceptent de limiter le coût de leurs prestations, puisqu'il s'agit d'un tissu très large d'entreprises de petite taille.

Telle est, en résumé, la philosophie que nous défendons.

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