Intervention de Joël Guerriau

Réunion du 9 juin 2021 à 15h00
Bibliothèques et développement de la lecture publique — Adoption en procédure accélérée d'une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

Photo de Joël GuerriauJoël Guerriau :

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, depuis André Malraux, la politique culturelle de la France a pour premier objectif l’accessibilité des œuvres au plus grand nombre et l’encouragement de la création.

L’accès à la culture au sens large est l’une des principales vocations des bibliothèques. Cette proposition de loi s’intéresse plus spécifiquement aux bibliothèques des collectivités territoriales et représente la première initiative visant à instaurer un cadre juridique pour ces lieux de culture indispensables à la vie locale.

Cela a été rappelé, la France compte 16 500 lieux de lecture publique accueillant près de 27 millions de lecteurs chaque année. Relais de culture, mais aussi de lien social, leur mission et leurs actions s’inscrivent pleinement dans les grands enjeux contemporains : 7 % des Français sont encore en situation d’illettrisme, soit 2, 5 millions de personnes, et 20 % des Français seraient concernés par l’illectronisme.

Si elles représentent un levier contre l’analphabétisme, les bibliothèques contribuent aussi à combler la fracture numérique territoriale et générationnelle et offrent désormais des services étendus, de l’éducation artistique à la maîtrise des outils numériques.

Dans les milieux ruraux et les banlieues, les bibliothèques sont de précieux relais de l’État sur le territoire et remplissent des missions aussi diverses qu’essentielles pour un public souvent isolé socialement : aides aux démarches administratives, accueil des migrants, accompagnement des personnes âgées dépendantes, des détenus ou encore des personnes marginalisées. Aussi ces lieux de culture sont-ils également des lieux d’intégration participant pleinement à la réparation du lien social.

Cette proposition de loi fixe les grands principes qui régissent les missions et l’organisation des bibliothèques de nos collectivités et favorisent le développement de la politique de lecture publique. Cependant, nous devons être attentifs à ne pas fixer un cadre trop contraignant pour les élus locaux, en particulier en ce qui concerne leur liberté d’organisation et de gestion de ces lieux de culture.

En effet, il faut analyser avec précaution le principe de liberté d’accès fixé à l’article 2 : les collectivités doivent pouvoir organiser le fonctionnement des bibliothèques, notamment en matière de réservation des plages horaires pour des publics particuliers, de fixation de jauges de fréquentation ou encore de respect de la tranquillité des lieux.

Par ailleurs, l’article 3 consacre le principe de gratuité d’accès aux bibliothèques des communes et intercommunalités.

Je suis favorable au principe de la gratuité de la consultation sur place, mais je considère que la mairie doit pouvoir conditionner l’emprunt de livres à une inscription ou à un abonnement si elle le souhaite. En effet, dans la mesure où les collectivités locales financent leurs bibliothèques et médiathèques, il appartient aux élus locaux d’adapter les conditions d’accès et les grilles de tarification de l’emprunt de livres. Ce point n’est pas contradictoire avec cette proposition de loi, je tenais simplement à le rappeler.

Ce texte présente donc des avancées que nous approuvons. Pour autant, d’autres progrès sont envisagés ; je pense en particulier à l’encouragement à la création. En effet, il convient de souligner que 15 % des auteurs professionnels en France perçoivent moins de 400 euros par mois ; je souhaite appeler votre attention sur ce point, madame la ministre.

Lorsque la création d’un artiste dans le domaine musical est diffusée dans un cadre public, la Société des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique, ou Sacem, impose à la collectivité de verser des droits d’auteur.

Pourquoi les livres empruntés dans le cadre de bibliothèques ne font-ils pas l’objet d’un comptage par auteur ? Il faut deux ans pour réaliser une bande dessinée ; il serait logique que les auteurs perçoivent, ainsi que les éditeurs, une juste rémunération de ce travail très souvent fastidieux. Cela permettrait d’encourager la création. Je rappelle que, pour nombre d’entre eux, ces auteurs vivent dans des conditions très difficiles. C’est un sujet auquel il faudra tôt ou tard s’attaquer.

Cette proposition de loi est une excellente initiative. Elle présente de nombreuses avancées. C’est pourquoi le groupe Les Indépendants – République et Territoires l’approuve et la votera.

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