Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la précarité étudiante ne fait que s’aggraver depuis des années : le coût des études augmente et le logement représente les deux tiers du budget.
Si 36 % des étudiants ont touché des bourses en 2019-2020, ces dernières ne permettent souvent pas de vivre sans travailler à côté. Or le cumul entre études et emplois est la première cause d’échec à l’université.
Au sortir de la crise sanitaire, le constat est d’autant plus frappant : la situation économique des étudiants s’est dégradée. Selon un sondage de la Fondation Abbé-Pierre, 20 % des jeunes ont eu recours à l’aide alimentaire en 2020. La moitié des étudiants a également rapporté des difficultés à payer repas et loyer.
Aussi, je ne peux que saluer l’intention de notre collègue et auteur de cette proposition de loi, M. Levi, qui a voulu répondre aux difficultés alimentaires et d’accès à une structure de restauration collective. Mais cette proposition de loi me semble être une fausse bonne idée et elle n’est pas à la hauteur des attentes des étudiants.
Tout d’abord, le montant du ticket est trop faible pour garantir l’accès à une restauration équilibrée, avec des produits de qualité. Nous courons ainsi le risque de favoriser les chaînes de restauration rapide, qui ne sont saines ni pour notre santé ni pour notre environnement.
Il est primordial de proposer une solution en accord avec les besoins et les attentes des étudiants. Et ce d’autant plus qu’une enquête de satisfaction du Cnous, menée en 2019, a fait ressortir que 59 % des étudiants se rendaient dans les restaurants universitaires pour avoir accès à des repas sains et équilibrés. Les Crous font des efforts considérables pour proposer une alimentation variée et équilibrée. Ils se sont engagés à renforcer une offre bio et végétarienne.
Par ailleurs, les missions des Crous ne se limitent pas à distribuer des repas. Ce sont des lieux de sociabilité et d’échange, qui permettent d’identifier les étudiants les plus fragiles et de les accompagner tout au long de leurs études.
Avec cette mesure, l’État devra effectuer des dépenses publiques pour permettre aux étudiants de consommer dans le privé, sans les avantages ni l’accompagnement qu’un établissement du Crous pourrait garantir.
Dans sa première mouture, cette proposition de loi mettait en danger le fonctionnement des restaurants universitaires, et par extension celui des Crous. Monsieur le rapporteur, lors des auditions, vous avez entendu les critiques des syndicats étudiants et des Crous et proposé de limiter le champ de cette mesure aux zones blanches. Mais cela ne règle pas tous les problèmes que risquent d’engendrer ces tickets restaurant.
Or d’autres solutions sont possibles. On pourrait ainsi déployer le réseau des restaurants universitaires dans les zones blanches, élargir les horaires en soirées et week-ends et permettre aux Crous de conclure et de renforcer des partenariats avec des collectivités, des associations ou divers établissements – lycées, hôpitaux, Ehpad…
On pourrait également pérenniser le repas à 1 euro, mesure rapide et efficace qui a permis de limiter l’insécurité alimentaire pendant la crise du covid-19.
Mieux encore, il existe une mesure simple pour régler en grande partie les difficultés financières et les inégalités entre étudiants. Il s’agit du revenu universel d’autonomie pour tous les jeunes, idée évoquée en 2019 par le Gouvernement. Malheureusement, c’est encore un espoir d’avancée sociale que ce gouvernement aura déçu.
Vous l’aurez compris, et pour toutes les raisons que j’ai invoquées, le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires votera contre cette proposition de loi.