Je vais expliquer pourquoi j’ai déposé cet amendement et pourquoi je préfère cette rédaction à celles proposées par un certain nombre de sénatrices et de sénateurs, et notamment par Mme la rapporteure. Les raisons sont très précises.
Avec les autres amendements, il est en fait proposé d’encadrer l’utilisation de la notion de neutralité carbone pour un produit ou un service au lieu de l’interdire, afin que les entreprises puissent communiquer sur leurs actions de compensation. Je rappelle la note de l’Ademe, qui spécifie bien que la neutralité carbone peut être envisagée à l’échelle nationale ou internationale, mais pas à partir d’un seul produit précisément. Attachée à un produit ou un service, cette notion est donc trompeuse pour le consommateur.
On comprend bien la logique des amendements et la référence qui est faite aux travaux en cours pour l’élaboration d’une norme ISO sur les allégations de neutralité carbone. D’ailleurs, les services de mon ministère y sont associés, mais cela ne nous paraît pas garantir à ce stade une pleine transparence pour le consommateur. En effet, alléguer la neutralité carbone d’un produit ou d’un service revient à mettre en avant une démarche de compensation, étant précisé que c’est la dernière étape de la séquence « éviter, réduire, compenser ». « Compenser » ne peut évidemment en aucun cas se substituer à « éviter et réduire ».
La compensation peut être réalisée de manière plus ou moins vertueuse, à des coûts très différents. Par exemple, 1, 5 euro la tonne de CO2 pour des projets d’énergies renouvelables dans les pays en développement, pour lesquels l’additionnalité est assez questionnable, et jusqu’à 10 à 15 euros la tonne de CO2 pour des projets de reforestation qui sont vraiment vertueux. Dans les deux cas, on parle de compensation, et vous voyez bien que l’on n’est pas du tout sur les mêmes niveaux.
En l’état actuel des travaux sur la norme ISO 14068, les projets les moins vertueux de compensation carbone seraient toujours éligibles pour démontrer la neutralité carbone d’un produit ou d’un service. Dans ces conditions, les garanties de transparence pour les consommateurs ne sont pas réunies.
Toutefois, il ne s’agit pas de décourager les entreprises qui s’engagent sur la neutralité carbone de leurs activités, ni celles qui souhaitent développer plus de compensation carbone pour leurs émissions résiduelles. C’est pourquoi le Gouvernement propose cet amendement, qui permet de dissocier une communication sur la neutralité carbone d’un produit ou d’un service d’une communication sur un engagement à la neutralité carbone d’une entreprise.
Nous suggérons de communiquer sur des produits intégralement compensés en carbone, tout en rendant publique la manière dont la compensation est réalisée, ce qui permet précisément d’identifier les pratiques plus ou moins vertueuses au profit des entreprises les plus ambitieuses.
Ma présentation valant avis sur les autres amendements, monsieur le président, je propose à leurs auteurs de les retirer au profit de celui du Gouvernement. Mon but est d’éviter que, sous couvert de bonnes intentions, on permette à des démarches très peu vertueuses d’être mises en avant.