Intervention de Jean-Luc Mélenchon

Réunion du 7 mai 2008 à 15h00
Modernisation du marché du travail — Article 5

Photo de Jean-Luc MélenchonJean-Luc Mélenchon :

Où est le problème ? N’est-ce pas une relation civilisée, normale, entre deux personnes qui discutent tranquillement ? Non ! Nous faisons des lois parce que nous essayons d’organiser les relations humaines entre le faible et le fort dans l’intérêt général.

Je répondrai également à la remarque formulée par Mme Procaccia selon laquelle la rupture de contrat négociée de cette manière correspondrait à une demande des salariés parce que, dit-elle, et je veux bien la croire, statistiquement, sur 20 000 ou 30 000 employés, il y en a toujours un ou deux par an qui ont envie de quitter l’entreprise. Bien sûr ! Je ne conteste pas ce point, mais ces salariés peuvent partir et ils ont toujours pu le faire : cela s’appelle la démission.

Vous m’objecterez, madame Procaccia, mais vous y avez déjà fait allusion, qu’en cas de démission ces salariés ne peuvent pas obtenir d’indemnité, tandis que, dans la rupture par consentement mutuel, ils en obtiendront une.

Madame Procaccia, vous aurez mal lu le texte ! Le texte ne fait aucune obligation en ce sens dans le cas de rupture par consentement mutuel. Imaginez qu’une personne qui fait bien son travail mais qui veut quitter son emploi parce qu’elle ne se plaît pas chez son employeur lui demande une indemnité. Par consentement mutuel, que va répondre l’employeur ? Qu’il ne consent pas ! Et que peut faire le salarié qui aurait voulu partir avec une indemnité ? Rien ! C’est pour cela qu’il y a des lois qui prévoient que, dans certains cas de rupture, l’employé a droit à une indemnité et dans d’autres, pas !

Par conséquent, croire que cette disposition garantira à des salariés individuels qui voudraient quitter l’entreprise une indemnité qu’ils n’auraient pas pu obtenir en démissionnant n’est absolument pas conforme à la réalité de ce que contient ce texte.

La vérité, c’est que cette disposition n’a rien à voir avec la revendication des salariés. Personne ne peut signaler une seule pétition d’un seul syndicat, d’une seule association de travailleurs ayant demandé la mise en place de la rupture du contrat par consentement mutuel !

En revanche, je peux vous citer l’auteur de cette invention. Il s’agit – et c’est bien le travail des responsables du MEDEF – de la présidente du MEDEF ; c’est elle qui a inventé cette histoire de « séparabilité », ainsi qu’elle a nommé son nouveau concept. Mais c’est bien son droit, après tout, d’avoir des idées au regard des intérêts qu’elle défend.

La « séparabilité » date de 2006, donc ce n’est pas d’aujourd’hui. Je vous fais grâce des citations, car je pense que vous me croirez sur parole. Le cas échéant, je tiens à votre disposition l’extrait du discours qui vous permettra de vous assurer de l’origine, de la paternité, si je puis dire dans le cas qui nous occupe, de cette « séparabilité ».

Mais, ce qui est le plus frappant, c’est le cri de victoire à la sortie… Aucun des syndicats, même les plus sensibles aux arguments que vous avancez, n’a fait de communiqué pour dire que tout cela était excellent ou se réjouir qu’une de ses revendications ait été satisfaite ! En revanche, on a entendu Mme Parisot dire : « L’idée de la séparabilité était en France une idée totalement neuve. Elle a d’abord fait rire, car c’était impossible. » En effet, nous pensions que c’était impossible. « Elle a semé le trouble jusque dans les esprits des professeurs de droit et des observateurs les plus spécialistes. Peu à peu, elle s’est installée. […] Aujourd’hui, le mot de séparabilité n’est plus seulement labellisé MEDEF, et c’est tant mieux. »

En effet, elle a gagné et nous sommes invités aujourd’hui à consacrer sa victoire. Mais essayer de déguiser cette idée ou faire croire qu’il s’agit d’une revendication des travailleurs, c’est un très mauvais coup pour eux et pour leur vie professionnelle !

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