J’aimerais introduire la présentation de cet amendement par l’évocation de l’histoire professionnelle de Karim Ben Ali, chauffeur routier employé par Suez en sous-traitance pour ArcelorMittal à Florange. Fin 2016, ses employeurs lui ordonnent de transporter des matières liquides pour les déverser en pleine nature. Il a été contraint de déverser chaque jour, de décembre 2016 à février 2017, près de 28 mètres cubes d’un liquide jaune fluorescent ultratoxique.
Je le cite : « À mesure que le liquide s’écoulait sur le sol, des rochers éclataient. Tout autour du lieu de déversement, il y avait des marcassins crevés, des lapins qui gisaient au sol et tout un tas d’autres carcasses de bêtes, à même pas 200 mètres d’habitations. J’ai alors décidé de tourner des vidéos, histoire d’avoir des preuves. Puis j’ai tenté de faire un signalement auprès de mon employeur, mais personne ne l’a relayé. Au lieu de ça, j’ai été licencié. À cause des produits toxiques que je transportais, j’ai eu une perte du goût et de l’odorat et des irritations au niveau des yeux. Maintenant, je vis au RSA. C’est simple : ma vie est foutue aujourd’hui. »
L’histoire de Karim Ben Ali est celle d’un lanceur d’alerte qui a été contraint de réaliser un acte illégal et polluant sans qu’aucun dispositif au sein de l’entreprise ait pu être activé et sans que la législation ait pu lui conférer une protection pourtant nécessaire, au moins le temps de l’instruction du dossier.
L’objet de cet amendement est donc de renforcer le dialogue social en entreprise, en cohérence avec les objectifs écologiques de ce texte. Il s’agit d’élargir les compétences du CSE en lui attribuant un droit de regard sur les orientations de l’entreprise en matière de lutte contre le changement climatique tout en instaurant un droit d’alerte écologique en continuité du droit d’alerte sociale, qui existe déjà. Ainsi deviendra-t-il possible de mettre en place des procédures adaptées à l’étude de ce genre de dossiers au sein de l’entreprise et de protéger les employés qui défendraient l’intérêt général en alertant les autorités.