Intervention de Serge Dassault

Réunion du 7 mai 2008 à 15h00
Modernisation du marché du travail — Article 6, amendement 22

Photo de Serge DassaultSerge Dassault :

J’aurais en effet pu lui apporter des éléments d’information complémentaires.

Je voudrais faire trois remarques préliminaires.

L’accord entre le patronat et les syndicats que tout le monde a salué comme une nouveauté constitue un compromis, et je m’étonne, comme l’a fait tout à l’heure M. Fourcade, que l’on passe son temps à casser tout ce qui peut éventuellement favoriser une certaine flexibilité telle qu’elle a été acceptée par les chefs d’entreprise. En effet, si tout cela est supprimé, il n’y a plus d’accord, et cela ne rime à rien !

Je regrette d’ailleurs que cet accord ait été signé avant la discussion, car c’est un facteur de blocage. Mais je m’aperçois que, en termes de blocage, nos collègues siégeant sur les travées de gauche de cet hémicycle reviennent en réalité sur tout !

S’il n’y a pas de compromis, il n’y a plus rien ! Or que faites-vous ? À chaque fois, vous voulez supprimer, sous prétexte de protéger les salariés, tout ce qui peut donner un brin de liberté de gestion aux entreprises, si ténu soit-il. Mais vous devez tout de même comprendre qu’un chef d’entreprise ne passe pas son temps à vouloir licencier ses salariés ! Quand il y a du travail et qu’il emploie un bon salarié, il garde ce dernier et n’a pas besoin de contrat pour cela ! Le but d’une entreprise est non pas d’embaucher des gens pour rien, mais de satisfaire des clients. Or, en l’absence de clients, il n’y a pas d’entreprise, il n’y a pas de salariés, il n’y a pas de production, il n’y a rien !

Par conséquent, si l’on empêche les entreprises de travailler normalement, elles s’en vont ailleurs ! Telle est aujourd’hui la raison majeure des délocalisations.

Si l’on continue à faire des contrats de travail qui enserrent les entreprises et qui, prétendument, favorisent les salariés afin de mettre fin à la précarité du travail, on se trompe ! En effet, le travail se fera ailleurs, comme cela se passe d’ailleurs aujourd’hui.

En effet, pour être rentable, une entreprise doit produire, vendre des matériels compétitifs. Or si, à chaque fois que c’est possible, on supprime la moindre liberté de gestion, on n’obtiendra rien et, en fin de compte, les salariés que vous voulez protéger se retrouveront au chômage ! Ils pourront alors dire que les socialistes les ont mis dans cette situation !

J’en viens à l’amendement n° 22, qui représente une possibilité de liberté d’action pour les entreprises. Il vise à ce que la durée minimale des nouveaux contrats soit ramenée de dix-huit mois à six mois.

En effet, un contrat à durée déterminée à objet défini a pour objectif de rendre plus flexible le marché du travail. Or certains, semble-t-il, ne veulent pas de la flexibilité !

Dans la plupart des secteurs d'activités, les missions de travail ont une durée de réalisation bien inférieure à dix-huit mois : cela peut-être six mois, voire moins. Dès lors, pourquoi limiter cette durée à dix-huit mois, même si certaines missions, il est vrai, peuvent être supérieures à trente-six mois ?

Il m’apparaît que, grâce à des contrats de mission limités à la réalisation d’objet défini, quelle que soit sa durée, les chefs d’entreprise seraient plus enclins à embaucher un grand nombre de chômeurs.

C’est la raison pour laquelle je souhaite modifier quelque peu l’article 6. En effet, dans la plupart des entreprises, le travail est aléatoire : il y a des contrats, mais pour combien de temps ? Ensuite, il y en aura peut-être d’autres, mais il n’y en aura peut-être pas.

Dès lors, certains chefs d’entreprise peuvent considérer qu’ils prennent un risque s’ils doivent embaucher pour réaliser tel ou tel contrat de travail. En effet, que feront-ils quand ce contrat arrivera à échéance ? Malgré le manque de travail, ils ne pourront pas licencier facilement le personnel. Dans ces conditions, ils n’embauchent pas, ils ne prennent pas la commande, ou ils vont embaucher à l’étranger, là où toutes ces contraintes n’existent pas.

Par conséquent, je souhaite, à travers cet amendement, une libéralisation du marché du travail, en ramenant la durée minimale de dix-huit mois à six mois et en supprimant la limite maximale de trente-six mois, qui d’ailleurs peut être inférieure ou supérieure à cette durée.

Grâce au contrat d’objectif élargi, de nombreux chômeurs seront immédiatement embauchés, que ce soit pour repeindre une maison, ce qui, évidemment, ne dure pas très longtemps, ou pour honorer une commande d’avion, ce qui, certes, demande un peu plus de temps mais ne dure pas non plus indéfiniment. Or que fera-t-on ensuite, lorsque le travail sera terminé ? Devra-t-on procéder à des licenciements massifs ?

Je rappelle que, aux États-Unis, quand l’entreprise Boeing perd une commande, elle n’hésite pas à licencier de 5 000 à 10 000 personnes, ce qui ne pose aucun problème. En revanche, lorsqu’elle obtient une commande, elle embauche immédiatement, et l’entreprise est ainsi toujours en bonne santé.

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