C'est avec plaisir que je vous présente l'analyse du SNIES Unsa Éducation.
Le harcèlement scolaire existe depuis que l'école existe, mais la reconnaissance des traumatismes que subissent les acteurs de ces drames est relativement récente.
Le harcèlement est le résultat de comportements conscients ou inconscients qui s'inscrivent dans la durée et placent les protagonistes dans des postures d'agresseur, de victime ou de témoin, qui peuvent évoluer et s'interchanger au fil du temps. Chacun porte une part de responsabilité et détient une clé de la porte de sortie de ce cercle délétère.
L'école est propice à ces comportements car elle constitue le lieu où, justement, on apprend à vivre ensemble, hors du cercle familial, en interagissant avec des individus ou des groupes étrangers à son univers connu.
Chaque membre de la communauté éducative a potentiellement un rôle à jouer pour permettre à nos jeunes d'acquérir les compétences psychosociales pour faire de ces interactions des leviers de développement et de l'épanouissement personnel ainsi que du bien-être. C'est un sujet de préoccupation qui nécessite des regards croisés et complémentaires de toute la communauté éducative.
De découverte toujours trop tardive, ce comportement induit de la souffrance pour la victime, la famille, mais aussi de la frustration et de l'incompréhension pour les professionnels de l'éducation. C'est le travail en synergie qui permet d'oeuvrer contre ce fléau et donne de la cohérence et de la force à nos actions de prévention. Des temps d'échanges et de formations transversales pluridisciplinaires permettraient de fédérer les équipes et de partager une culture commune de prévention.
Cette dernière décennie voit se développer une forme particulière : le cyberharcèlement. Il se traduit par une action négative plus rapide, en parallèle du harcèlement qu'il accompagne toujours. Il s'y surajoute avec un effet de propagation rapide. Les participants sont seuls, derrière un écran qui est, tour à tour, protecteur et persécuteur. La solitude engendre des comportements exacerbés, sans les ressources sociales pour les tempérer.
L'interdiction du portable à l'école et au collège est une mesure qui permet en partie de limiter cette forme de harcèlement pendant le temps scolaire. Mais malheureusement, il commence en « vrai » dans la cour de l'école, et les réseaux estompent la frontière entre le scolaire et le personnel, ce qui induit un envahissement pour les élèves, dans tous espaces de l'enfant via le canal des réseaux sociaux.
Les frontières entre la vie familiale, les vacances, les activités sportives ou culturelles et les temps scolaires sont gommées. L'élève n'a plus d'échappatoire.
Alors que faire ? Notre rôle, en tant qu'infirmières dans les établissements, est d'écouter, accompagner et orienter les protagonistes vers les partenaires internes ou externes. L'infirmière scolaire est souvent alertée par une modification du comportement. La difficulté du repérage réside dans la distinction à faire entre le registre du conflit et celui du harcèlement. Ce repérage s'effectue notamment lors d'un passage à l'infirmerie où les élèves qui se présentent bénéficient d'un accueil et d'une consultation de l'infirmière. Les motifs annoncés sont souvent bien loin du ressenti réel. Il faut alors toute notre expertise professionnelle pour déceler le besoin qui a motivé la demande.
Le repérage est également le fait des enseignants ou des services de vie scolaire. Ceux-ci ont alors besoin de relais, et se tournent vers les partenaires à leur disposition. La présence des infirmières dans les établissements, au plus près des élèves, est pourtant un atout indispensable.
En matière de prévention, nous participons à la construction des projets au sein même des établissements et des comités d'éducation à la santé et à la citoyenneté (CESC) en y apportant notre expertise professionnelle, et éventuellement les relais et les ressources à mobiliser. Cela constitue une de nos spécificités d'exercice d'infirmier.
Si la remédiation et la prévention sont l'affaire de tous (communauté éducative, famille, et partenaires internes et externes), nous constituons les seuls partenaires internes en santé affectés dans les établissements scolaires. Pour cela, chaque établissement devrait être doté d'un personnel infirmier, ce qui n'est pas le cas au regard de plusieurs dossiers qui nous mettent à mal.
Pour le SNIES, les missions des infirmières autour de ce thème doivent être mieux connues et reconnues pour s'exercer pleinement. Une communication appuyée constituerait un levier pour y parvenir.
Pour répondre à votre première question, la formation est incontournable, mais dans une dimension pluri professionnelle et au niveau des équipes. L'objectif est d'avoir un programme commun et une politique commune dans la prévention du harcèlement.