Intervention de Pascale Gruny

Commission des affaires sociales — Réunion du 23 juin 2021 à 9h30
Proposition de loi pour la prévention en santé au travail — Examen du rapport et du texte de la commission

Photo de Pascale GrunyPascale Gruny, rapporteur :

Toujours dans cette logique de décloisonnement de la santé publique et de la santé au travail, nous préconisons le renforcement de la collaboration entre la médecine du travail et la médecine de ville et hospitalière, notamment au travers d'un accès réciproque et circonscrit à certaines données contenues dans le dossier médical partagé (DMP) et le dossier médical en santé au travail (DMST). Cet accès devra se faire, bien entendu, avec le consentement du travailleur, dans le respect le plus strict de la confidentialité de ses données de santé et conformément aux règles déontologiques et au secret professionnel applicables aux professionnels concernés. Nous proposons ainsi des amendements tendant à mieux encadrer l'accès réciproque de la médecine de ville et de la médecine du travail aux DMP et DMST, avec la préoccupation constante de préserver la relation de confiance entre le travailleur et les professionnels de santé.

Par ailleurs, alors que le niveau de numérisation des dossiers médicaux en santé au travail est encore très variable d'un SST à l'autre, nous plaidons, à l'article 13, pour une extension à l'ensemble des SPST d'une obligation de mise en conformité à des référentiels d'interopérabilité et de sécurité, comme nous l'avions fait lors de l'examen, en 2019, du projet de loi Santé pour les établissements de santé et les cabinets médicaux. La standardisation et l'interopérabilité des données de santé collectées par les SPST conditionnent, en effet, leur portabilité sur l'ensemble de la carrière du travailleur et leur exploitation, sous format anonymisé, dans le cadre de la recherche en santé au travail.

Concernant la qualité du service rendu par les SSTI, les partenaires sociaux se sont accordés dans l'ANI sur le diagnostic d'une grande hétérogénéité des prestations, notamment en matière de prévention pour laquelle il existe une forte attente. Comme nous l'avions relevé dans notre rapport d'information, certains SSTI ne satisfont pas pleinement à leurs missions alors même qu'ils bénéficient d'un agrément administratif.

Dans une approche de service rendu aux employeurs, aux salariés et à leurs représentants, et conformément au souhait des partenaires sociaux, la première réponse apportée par la proposition de loi est de prévoir que chaque service de prévention et de santé au travail interentreprises (SPSTI) fournira obligatoirement un ensemble socle de services, ainsi que, de manière facultative, une offre de services complémentaires qu'il déterminera. Il nous semble toutefois important de définir cet ensemble socle de services de manière à garantir que les SPSTI proposeront à l'ensemble des entreprises adhérentes les prestations les plus homogènes possible et ne privilégieront pas leur offre complémentaire au détriment de la prévention. Nous précisons, à l'article 8, que l'offre socle de services devra couvrir l'intégralité des missions prévues par la loi en matière de prévention des risques professionnels, de suivi individuel des travailleurs et de prévention de la désinsertion professionnelle.

En conséquence, la proposition de loi revoit, à l'article 9, les modalités de tarification des SPSTI, en confiant à leur assemblée générale la responsabilité d'approuver le montant des cotisations correspondant désormais à l'offre socle, ainsi que la grille tarifaire applicable à l'offre complémentaire. Le texte issu des travaux de l'Assemblée nationale confirme implicitement le principe actuel du calcul de la cotisation en équivalents temps plein (ETP) qui est source de contentieux et ne correspond pas à la réalité des missions des SPSTI ; en matière de prévention et de santé au travail, un salarié à temps partiel ou en contrat court doit bénéficier du même suivi qu'un salarié en contrat de travail à durée indéterminée (CDI) et à temps plein. Nous proposons donc d'instaurer un mode de calcul en fonction du nombre réel de personnes suivies. Suivant le souhait des partenaires sociaux affirmé dans l'ANI, nous présentons par ailleurs un amendement introduisant le principe d'une fourchette, fixée par référence au coût moyen national de l'ensemble socle de services, pour encadrer la fixation de la cotisation.

La deuxième réponse de la proposition de loi, également issue de l'ANI, est la mise en place d'une procédure de certification des SPSTI par un organisme indépendant et accrédité. Nous sommes favorables à ce dispositif, que nous avions préconisé en 2019, et plaidons pour que les partenaires sociaux, via la nouvelle instance de gouvernance mise en place au sein du conseil d'orientation des conditions de travail (COCT), soient à l'initiative de la définition de son cahier des charges.

L'Assemblée nationale a, par ailleurs, élevé au niveau législatif la procédure d'agrément administratif à laquelle sont soumis tous les SPST, sans toutefois renforcer sa portée. Afin de doter l'administration d'un moyen d'action plus efficace et constructif que le retrait d'agrément en cas de difficultés graves d'organisation ou de fonctionnement, nous suggérons d'introduire en complément un régime d'administration provisoire qui doit permettre, sans interrompre le service, de lui donner les moyens de se réorganiser lorsque sa gouvernance est défaillante.

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