Intervention de Annie David

Réunion du 7 mai 2008 à 15h00
Modernisation du marché du travail — Article 9

Photo de Annie DavidAnnie David :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, voici enfin un article pour lequel les sénatrices et sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen voteront, même si, malgré ce moment de plaisir que vient si bien de décrire M. Mélenchon, ils ne le feront pas des deux mains.

En effet, nous ne pouvons que regretter les nombreux lots de consolation accordés au MEDEF et au patronat dans son ensemble, pour compenser la perte d’un outil que les employeurs défendaient tant. Ils l’ont défendu bec et ongles au point que, en commission, le représentant de la CGPME a exhorté les sénatrices et sénateurs à ne pas supprimer cette disposition, quitte à continuer dans le chemin du non-respect des engagements internationaux, quitte aussi, je le signale au passage, à ne pas respecter l’ANI.

Quelle drôle de conception de la légalité, tout de même, que de préférer bafouer la convention n° 158 de l’Organisation internationale du travail, dont nous sommes signataires, pour permettre à quelques employeurs de poursuivre leurs politiques de précarisation du salariat !

Car, nous le savons aujourd’hui, le recours au CNE n’aura pas permis de créer le nombre d’emplois escompté. Comme toujours, on a voulu vendre aux Français la précarisation comme outil de relance de l’emploi – nous avons eu droit tout à l’heure aux explications toutes personnelles de M. Dassault sur ce sujet – et, comme toujours, cela s’est soldé par un échec statistique.

Selon une étude de la DARES, la direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques, dont on ne peut remettre en cause la neutralité, seuls 8 % des employeurs affirment qu’ils n’auraient pas embauché si le CNE n’avait pas été adopté. Autant dire que l’effet d’aubaine fut grand !

On découvre encore, dans la même étude, ce titre qui laisse pour le moins dubitatif : « Le CNE favorise les embauches dans les petites entreprises, mais l’enquête ne permet pas d’en mesurer les effets nets sur l’emploi. »

Cette étude, fort intéressante, vient également confirmer ce que nous dénoncions : au bout d’un an, 60 % des salariés embauchés ne sont plus sous contrat dans l’entreprise et ils ne sont pas plus de 28 % à avoir mis fin eux-mêmes à la relation contractuelle. Autant dire que les employeurs ont pris ce projet de loi pour ce qu’il était, un outil de flexibilisation et de précarisation supplémentaires.

La suppression du CNE est donc une bonne et, même, une très bonne nouvelle. Mais il est dommage qu’elle s’accompagne d’autres mesures « précarisantes », mesures que nous n’avons cessé de dénoncer lors de nos précédentes interventions. C’est d’autant plus regrettable que chacun sait ici qu’une telle suppression résulte non pas de l’accord négocié, mais bien de condamnations successives de la France, de la part, notamment, du BIT.

Ce n’est pas très flatteur pour notre pays, à quelques semaines du début de la présidence française de l’Union européenne !

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