Intervention de Cédric Perrin

Réunion du 23 juin 2021 à 15h00
Programmation militaire — Débat et vote sur une déclaration du gouvernement

Photo de Cédric PerrinCédric Perrin :

Tout d’abord, pour ce qui concerne le Rafale, le risque que fait peser la cession de matériels d’occasion sur notre programmation militaire est nouveau, sur le plan tant financier que capacitaire. Ainsi, la cible fixée à l’horizon de 2025 pour le parc des Rafale de l’armée de l’air et de l’espace ne sera pas atteinte. Le président de la commission a précédemment indiqué qu’elle s’élevait à 129 unités, en raison du non-remplacement des douze Rafale d’occasion cédés à la Croatie ; peut-être nous donnerez-vous de bonnes nouvelles à ce sujet, monsieur le Premier ministre, mais j’en doute…

Se posera en outre l’équation complexe de la disponibilité opérationnelle d’un parc réduit – il faut le souligner – de 9 %. La question de la réduction capacitaire ne trouve pas de réponse à ce stade, comme le chef d’état-major des armées – je veux moi aussi lui rendre hommage – nous l’a confirmé en commission, sauf à améliorer l’activité du parc existant et à prolonger, le cas échant, la durée de vie des Mirage 2000-5, au prix d’un surcoût en EPM et en maintien en condition opérationnelle (MCO).

Quant à la dimension financière de l’opération, il s’agit de céder des appareils opérationnels qu’il faudra remplacer au prix du neuf ; le modèle économique de ces partenariats stratégiques atteint donc déjà ses limites… Par ailleurs, bien qu’il faille se féliciter du nouveau succès à l’export du Rafale en Indonésie, en version neuve cette fois, ce n’est pas un problème de coût qui se posera à l’armée de l’air, mais bien celui du calendrier de livraison des futurs avions par Dassault, qui ne dispose que d’une seule chaîne de montage de Rafale – je rappelle qu’il faut trois ans entre une commande et une livraison.

Je regrette en outre que l’ambition d’une LPM « à hauteur d’homme » soit remise en cause par les retards de livraison sur les véhicules blindés légers et les véhicules des forces spéciales. Ces programmes s’avèrent déterminants pour la sécurité et la protection de nos soldats en OPEX, comme vous l’avez fort justement rappelé, monsieur le Premier ministre. Les véhicules blindés légers, du fait des missions de reconnaissance et de liaison qu’ils remplissent, sont particulièrement exposés aux risques balistiques, aux mines et autres engins explosifs improvisés (EEI). Or le retard pris dans la régénération des VBL semble acté dans l’actualisation de 2021.

J’ai maintes fois alerté Mme la ministre des armées ou le délégué général pour l’armement (DGA) sur cette question, sans qu’aucune solution tangible n’ait été présentée en vue d’une résolution du problème avant la fin de la LPM, pour accélérer par exemple l’arrivée des véhicules blindés d’aide à l’engagement, ou VBAE. La même question peut se poser pour le véhicule qui remplacera l’engin blindé du génie en matière de lutte contre les risques de mines et autres EEI.

Il y va de la protection individuelle de nos militaires. On ne saurait se satisfaire que de tels retards soient imputés à des problèmes industriels.

D’ici à 2025, il reste quatre ans pour exiger que le retard soit rattrapé ; monsieur le Premier ministre, il s’agit d’une demande que je vous adresse solennellement aujourd’hui, au nom du groupe LR.

En conclusion, permettez-moi de vous livrer le fond de ma pensée. Le Gouvernement a raté la dernière occasion qui lui était offerte avant 2022 de présenter dans de bonnes conditions les efforts d’adaptation de nos armées à l’environnement international plus menaçant et imprévisible qui nous entoure.

Nous ne voudrions pas que cette loi de programmation militaire souffre des mêmes syndromes que les grandes réformes portées par votre gouvernement, à savoir le syndrome de la déconnexion entre les déclarations et les actes et les ravages de la politique du « en même temps ».

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