Je souhaite pointer du doigt une dérive concernant les engrais azotés, qui sont de plus en plus utilisés.
Les émissions de protoxyde d’azote, notamment, sont à 87 % dues à l’agriculture, contre 59 % en 1990. La France est le premier consommateur d’engrais azotés dans l’Union européenne et le quatrième au niveau mondial.
Or ces engrais chimiques sont fabriqués dans des usines polluantes émettrices d’ammoniac. Quand celles-ci se trouvent en France – tel n’est pas le cas pour tous les engrais que nous consommons –, elles ne sont pas réglementées, parce que la présence d’ammoniac dans l’air ne l’est pas. La plupart de ces usines ne sont pas classées Seveso.
Quand ces engrais sont importés, par définition, ils nous placent dans une situation de forte dépendance économique aux importations ; le prix est fluctuant et l’empreinte carbone importante – vous vous en doutez – en raison du transport. Cela pose donc un problème de sécurité alimentaire.
Complétons le panorama : on constate que certaines plantes sont désormais suralimentées en azote et donc rendues plus sensibles aux ravageurs. Quand l’azote n’est pas absorbé par les plantes, il va dans les nappes phréatiques ou dans les cours d’eau et libère des nitrates, qui se retrouvent dans les aliments et favorisent la formation d’algues vertes, comme on le voit sur les côtes bretonnes. Je vous rappelle que la concentration en nitrates est limitée réglementairement à 50 milligrammes par litre pour les eaux superficielles.
Les émissions de protoxyde d’azote se combinent et produisent des particules fines. L’agriculture est responsable de 55 % des émissions de particules fines, qui provoquent – vous le savez – des milliers de morts chaque année. L’effet de serre du protoxyde d’azote est de surcroît 300 fois plus important que celui du dioxyde de carbone.
Quant aux émissions d’ammoniac, dont 94 % proviennent de l’agriculture, l’apport d’engrais représentant 29 % des émissions du secteur, elles provoquent, quant à elles, des pics de pollution.
Le panorama resterait incomplet si je n’ajoutais pas que les rendements, qui ont augmenté grâce au recours à ces engrais azotés, se mettent désormais à plafonner, voire à baisser, alors même que les apports, eux, ne connaissent aucun reflux et que les sols ainsi traités subissent des risques d’érosion, de ruissellement et d’inondation.