Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, avec cette nouvelle lecture – en l’espèce, la troisième – du projet de loi relatif à la bioéthique, nous arrivons au bout d’un long chemin. Il est grand temps de statuer définitivement sur ces dispositions, dont nous pensons qu’elles constituent, pour la plupart, des avancées utiles et attendues.
Globalement, ce texte issu des travaux de l’Assemblée nationale nous satisfait à quelques dispositions près. Nous nous réjouissons bien sûr que soient réintroduites les mesures phares que la majorité sénatoriale avait purement et simplement supprimées.
Je pense à l’article 1er, qui prévoit l’ouverture de l’AMP aux femmes seules et aux couples de femmes et sa prise en charge par l’assurance maladie.
Je pense aussi à la possibilité pour les femmes d’une autoconservation de leurs ovocytes.
Je pense encore à l’accès aux origines pour tous les enfants conçus avec tiers donneur, à leur majorité.
Si nous souhaitions aller plus loin sur l’AMP post mortem ou dans le traitement de l’accès à l’AMP, en assurant une égalité de traitement au regard de l’identité de genre, il est certain que cette rédaction constitue déjà une avancée sociétale majeure et attendue.
L’AMP n’est pas une concession faite à l’époque : elle est l’aboutissement d’un long processus, qui nous amène à reconnaître une liberté, parce qu’elle correspond à une nécessité. Il y a une réalité biologique, mais il y a également une vérité humaine à laquelle nous devons répondre.
La société française a évolué vers un modèle familial qui ne se résume plus à une configuration unique, issue d’un modèle conjugal unique. Nos citoyens y sont prêts : les deux tiers des Françaises et des Français y sont favorables. Il faut maintenant l’acter.
Nous sommes également satisfaits que les députés aient répondu favorablement à un certain nombre de dispositions que nous défendions en deuxième lecture, comme la possibilité du recours au prélèvement d’organes chez les jeunes protégés ou encore l’interdiction de l’usage de l’IRM (imagerie par résonance magnétique) fonctionnelle à des fins judiciaires.
Nonobstant ces avancées, je formulerai rapidement quelques regrets.
L’Assemblée nationale a maintenu l’article 4 bis, qui interdit la transcription totale de l’acte de naissance ou du jugement étranger établissant la filiation d’un enfant né d’une GPA à l’étranger. Cette mesure est à contresens des récentes décisions judiciaires, selon lesquelles une GPA réalisée à l’étranger ne saurait faire, à elle seule, obstacle à la reconnaissance en France d’un lien de filiation intégral.
Pour ce qui est des modes de filiation, nous privilégions la présomption de parenté pour les couples non mariés, pour le conjoint ou la conjointe, lorsqu’un enfant naît d’une AMP, l’idée étant d’étendre aux couples de femmes le régime de droit commun prévu pour les couples hétérosexuels. C’est pour nous la solution la plus à même de garantir l’égalité entre les couples.
Sur les questions de recherche, nous actons de réelles divergences de fond avec l’Assemblée nationale, le Sénat restant attaché au maintien de l’interdiction absolue de la création d’embryons chimériques afin d’écarter tout risque de franchissement de la barrière des espèces. Cette position est partagée par le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires.
Enfin, nous regrettons que l’Assemblée nationale n’ait pas voulu profiter de ce véhicule législatif pour clarifier les pratiques et réaffirmer que l’interruption médicale de grossesse (IMG), que ce soit pour raison médicale ou en cas de détresse psychosociale, doit s’appliquer uniformément, dans tous les territoires. On constate encore trop souvent, localement, des divergences d’interprétation quant à l’opportunité de prendre en considération l’ensemble des détresses parmi les causes de péril grave justifiant la réalisation d’une IMG.
Quoi qu’il en soit, les sénateurs du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires soutiennent globalement cette réforme. Nous sommes heureux que l’AMP pour toutes, ce droit nouveau, soit enfin consacrée.
Dans nos sociétés contemporaines en mutation, la reconnaissance d’un tel droit est salutaire. Sur ces enjeux, notre boussole est et restera l’humain et l’intérêt supérieur de l’enfant.