Ayant été rapporteure pour avis de la loi de 2008 au nom de la commission des affaires culturelles, aux côtés de René Garrec, rapporteur de la commission des lois, je ne peux qu’aller dans le sens de mes collègues.
Je regrette la manière subreptice dont l’article 19 a été introduit dans ce projet de loi, sans avis du ministère de la culture. Celui-ci est pourtant désigné comme ministère de référence par la loi de 2008. Ce n’est pas sans poser certaines questions.
Je déplore que le texte de modernisation et d’équilibre voté en 2008, qui prenait en compte les impératifs de sécurité nationale et prévoyait un régime d’exception, soit aujourd’hui battu en brèche. C’est un recul historique du principe de libre communicabilité des archives publiques !
Comme l’ont affirmé mes collègues, les associations de chercheurs, d’historiens et les services publics d’archives s’émeuvent du nouveau dispositif qui sera mis en place. Ils prennent certes acte de l’avancée importante que constitue la déclassification automatique des documents d’archives publiques à l’expiration des délais prévus par le code du patrimoine. Mais, en définitive, cette avancée ne fait que mettre fin à une pratique notoirement illégale : la fermeture de l’accès aux archives publiques – j’en veux pour preuve les récentes conclusions du rapporteur public du Conseil d’État.
En réalité, l’article 19, tel qu’il est rédigé, prévoit un allongement inédit du délai de communication d’un certain nombre de documents d’archives, avec toute la complexité que cela induit. Surtout, il tend à inverser la logique de la loi de 2008 : un mécanisme administratif prend l’ascendant sur ce qu’avait défini le législateur.
Quant aux délais glissants introduits dans le texte, ils dénaturent le régime de communicabilité en vigueur, ce qui présente divers risques : impossibilité d’accès aux documents, indétermination des délais, complexification du travail des archivistes, etc. Bref, l’article est susceptible de provoquer de nombreux effets particulièrement négatifs.