Intervention de Clément Beaune

Commission des affaires européennes — Réunion du 17 juin 2021 à 16h35
Situation des pêcheurs français à la suite du retrait du royaume-uni de l'union européenne — Audition de Mme Annick Girardin ministre de la mer et M. Clément Beaune secrétaire d'état auprès du ministre de l'europe et des affaires étrangères chargé des affaires européennes

Clément Beaune , secrétaire d'État :

Nous nous trouvons dans un moment extrêmement difficile. Nous savions que la mise en oeuvre de l'accord serait tout aussi compliquée que sa négociation, qui, il y a quatre ans, a représenté un véritable test de souveraineté et d'unité européenne. Nous devons maintenant en réussir l'application.

Il s'agit d'un bon accord, y compris sur la question de la pêche, négocié de bonne foi en toute transparence avec les professionnels, même s'il existe effectivement des difficultés. Aujourd'hui, notre préoccupation est vive, car la partie britannique ne respecte pas intégralement ce texte, tant sur la question de la pêche que sur d'autres aspects, relevant du protocole irlandais. Nous constatons beaucoup d' « intox » dans la façon dont le Royaume-Uni présente l'attitude de l'UE. Notre relation mérite mieux que cela. Pourtant, l'UE ne fait pas preuve d'inflexibilité, et l'on ne peut pas dire que la souveraineté britannique n'a pas été respectée. Au contraire, nous avons toujours cherché le compromis dans la négociation. Par exemple, au sujet des contrôles sanitaires et phytosanitaires simplifiés, Maros Sefcovic a déclaré être prêt à trouver des modalités simplifiées, pour 80 % des contrôles aujourd'hui effectués. Nous attendons de la part des Britanniques autre chose qu'un mauvais récit : une application stricte des engagements pris, et la fin de cette triste comédie consistant à accuser l'UE de créer des difficultés en Irlande.

Au titre de la réserve d'ajustement, 5 milliards d'euros étaient réservés pour limiter les impacts économiques du Brexit, notamment dans les régions concernées par la pêche. Cependant, la proposition de la Commission ne prenait pas suffisamment en compte nos intérêts. Nous avons finalement trouvé un compromis qui, je le crois, est conforme à ces derniers, avec une enveloppe de près de 700 millions d'euros pour la France. Ce compromis est en passe d'être finalisé en trilogue par la Commission, le Parlement européen et le Conseil. Nous aurons ensuite à discuter des modalités précises de répartition de ce montant au niveau national.

Cela ne signifie pas pour autant que nous devons baisser la garde sur la délivrance des licences, ainsi que sur l'accord du 2 juin dernier relatif aux taux admissibles de capture (TAC). Nous devrons poursuivre notre mobilisation pour obtenir la délivrance des licences, puisqu'il en manque 80. Cela a été évoqué par le conseil de partenariat, réuni le 9 juin.

Au sujet de l'application des accords sur la pêche, nous avons indiqué être prêts à poursuivre les procédures que nous avons engagées si la situation ne s'améliorait pas. Nous n'hésiterons pas à saisir le tribunal arbitral pour constater la violation des accords, et si cela est nécessaire, à prendre les mesures de rétorsion qui s'imposent. Il ne s'agit pas de menaces, mais de faits. Force est de constater que les choses commencent à durer, et l'impatience monte légitimement. Nous n'avons jamais hésité à faire preuve de la plus grande fermeté tout au long de la négociation de l'accord. Nous n'hésiterons pas à le faire au sujet de sa mise en application.

Le conseil de partenariat est l'organe transversal d'évocation des difficultés à résoudre. Il s'accompagne de comités spécialisés, dont un comité sur la pêche qui pourrait se réunir fin juillet pour traiter des difficultés que nous avons évoquées, à la demande de la France. Les professionnels du secteur pourront également être consultés à cette occasion.

En outre, nous devons d'ores et déjà réfléchir à l'après-2026. Quand bien même les dispositions prévues pour la période transitoire seraient bien respectées pendant les cinq ans à venir, les Britanniques auront en effet en main la possibilité de restreindre et, dans un cas extrême, d'empêcher l'accès à leurs eaux à l'occasion des nouvelles négociations. Mais nous, Européens, disposons aussi de mécanismes et de moyens d'action : le cas échéant, nous devrions ainsi utiliser toutes les mesures compensatoires ou de rétorsion à notre disposition, y compris dans les autres domaines sectoriels de l'accord, en particulier l'énergie.

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