Intervention de Arnaud Bazin

Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation — Réunion du 7 juillet 2021 à 9h30
Contrôle budgétaire — Rôle des maisons départementales des personnes handicapées dans la gestion de l'allocation aux adultes handicapés aah - communication

Photo de Arnaud BazinArnaud Bazin, rapporteur spécial :

Nous n'avons également pas manqué d'être frappés, dans le cadre de nos travaux, par la connaissance très imparfaite que nous avons de l'AAH et de ses bénéficiaires, alors même que celle-ci représente une dépense de plus de 11 milliards d'euros, par ailleurs très dynamique.

Nous avons trop longtemps laissé perdurer une situation dans laquelle chaque MDPH pouvait disposer de son propre système d'information, en dépit de l'obligation légale clairement posée en 2005 tendant à l'institution d'un système d'information commun. Cette situation rendait impossible la remontée d'une information robuste sur les bénéficiaires de l'AAH.

Néanmoins, nous avons eu l'occasion de constater que des progrès certains avaient été accomplis en ce sens, avec la mise en place d'un système d'information qui, à défaut d'être commun, est au moins harmonisé. Celui-ci doit notamment permettre un traitement homogène des données relatives aux demandes et offrir un cadre commun pour les échanges de données entre les MDPH et leurs partenaires, comme les CAF ou encore les établissements médicaux-sociaux.

Le déploiement de ce SI a par ailleurs permis la publication d'un « baromètre MDPH » par la CNSA, qui marque également un progrès en termes de transparence, même si l'outil est à ce jour un peu fruste et ne permet pas d'isoler de façon satisfaisante les données relatives à l'AAH de celles relatives aux autres types de dispositifs instruits par les MDPH.

Ce choix du SI harmonisé n'en reste pas moins source de complexités et nous avons tout de même tendance à considérer, avec Éric Bocquet, qu'un système réellement commun aurait sans doute été préférable. Reste à voir si l'on peut capitaliser sur l'existant pour progresser sur cette voie. En tout état de cause, toute évolution du système devra être pensée pour et avec le point de vue des agents des MDPH, en déployant simultanément un réel effort de formation en leur direction.

La nécessité de s'approprier ces nouveaux outils, parfois à marche forcée et avec une formation minime, s'est en effet imposée aux agents comme une contrainte lourde s'ajoutant à leurs tâches quotidiennes d'instruction. Ces dimensions concrètes sont trop souvent négligées.

Plus largement, il existe un consensus parmi les MDPH pour considérer que l'effort de formation actuellement déployé par la CNSA est largement lacunaire. De réels efforts sont à mener en ce sens, en partenariat avec le CNFPT.

Cet enjeu de la formation m'amène, pour conclure, à vous présenter notre dernière série d'observations, qui porte sur l'animation du réseau et la nécessité de renforcer son pilotage.

La CNSA montre une réelle volonté pour assumer son rôle de pilote du réseau. Elle coordonne à ce titre la feuille de route gouvernementale « MDPH 2022 ».

L'hétérogénéité des pratiques entre MDPH est encore. On peut la constater en matière de délais de traitement, mais aussi en matière de taux d'attribution de l'AAH, et encore davantage en matière d'appréciation du critère de RSDAE. L'harmonisation des pratiques, qui va dans le sens d'une plus grande égalité de traitement entre usagers, justifie donc pleinement un renforcement du pilotage national.

Pour autant, la forme que celui-ci est en train de prendre laisse parfois un peu dubitatif. Les responsables de MDPH que nous avons auditionnés ont été unanimes pour regretter une évolution de la CNSA vers un pilotage très directif et centralisé, focalisé sur la remontée d'indicateurs et les enjeux budgétaires. Il y a une vraie obsession de la donnée, sans que leur partage ne donne lieu à un véritable dialogue individualisé entre la CNSA et la MDPH afin d'en faire un réel levier de progrès d'amélioration de ses performances.

L'État semble de son côté s'efforcer de reprendre quelque peu la main sur l'AAH, en lançant une mission nationale d'audit et de contrôle dont les contours, les objectifs et les moyens semblent encore flous, de même que ses modalités d'articulation avec l'action de la CNSA.

Le renforcement du pilotage ne suffit donc pas, encore faut-il que celui-ci reste clair et - j'ai envie d'ajouter - soit plus partenarial et plus humain et plus efficace.

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