Intervention de Magdalena Kochan

Délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes — Réunion du 9 juin 2021 : 1ère réunion
Échange avec le centre pour les droits des femmes polonais et des sénatrices polonaises sur la situation des droits des femmes en pologne et la législation en matière de violences intrafamiliales

Magdalena Kochan, vice-présidente de la commission de la famille, des seniors et des affaires sociales du Sénat polonais :

Je voudrais très brièvement vous présenter ce qui est en vigueur en Pologne. La loi sur la lutte contre la violence conjugale a été votée en 2005 et largement amendée en 2010, soit avant le vote de la Convention d'Istanbul, qui est entrée en vigueur en Pologne le 1er août 2015.

La loi de 2010 a, pour la première fois dans le droit civil, prévu une obligation de quitter le logement commun pour l'auteur du crime, qu'il en soit propriétaire ou copropriétaire. Elle a aussi a obligé les autorités publiques, aux niveaux local et national, à protéger les victimes de violences conjugales et à leur attribuer une aide médicale, psychologique, sociale, juridique, professionnelle, familiale gratuite. Des centres de soutien sont financés par l'État et organisés par les collectivités locales, à commencer par les communes.

Le gouvernement doit présenter au Parlement son plan national de lutte contre la violence familiale, avec un diagnostic de la situation et des pistes pour les années à venir. Un coordinateur est désigné pour assurer la coordination gouvernementale. Cinq ministres travaillent ensemble sur le sujet : les Affaires sociales, l'Éducation, la Santé, la Justice et l'Intérieur. Nous avons aussi besoin de la police et de la gendarmerie militaire. La coordination de tous ces acteurs montre que nous avons pris au sérieux ce phénomène. Nous ne pouvons être efficaces que si nous assurons des actions interdisciplinaires.

Les communes désignent des équipes interdisciplinaires pour s'occuper des affaires concrètes sur leur territoire, dresser des diagnostics et trouver des moyens de prévention.

Une autre loi, qui fonctionne très bien, met en place des assistants familiaux qui commencent à intervenir auprès des familles dès l'apparition du problème, lorsqu'il est encore possible d'agir. Les études montrent que le travail réalisé sur le terrain par ces assistants de familles, qui sont davantage des amis de la famille que des assistants réalisant des vérifications, est efficace dans plus de 40 % des cas. Il permet de sortir les familles du système d'assistance sociale.

Les équipes interdisciplinaires comptent également des pédagogues, des psychologues, des représentants du corps médical, des policiers de terrain, des organisations non gouvernementales dont l'activité ne doit pas être sous-estimée.

Les lois protégeant les victimes comprennent l'interdiction d'infliger des châtiments corporels à des enfants. Chaque personne voyant un parent appliquer un tel châtiment doit prévenir les autorités.

L'obligation pour l'auteur de quitter l'habitation n'est pour l'instant pas très efficace. Un amendement récent a permis de prévoir cette interdiction dans la loi civile, mais aussi pénale. La police pourra donc désormais faire sortir l'auteur du crime de sa propre maison. Dans 90 % des cas, les victimes de violences conjugales sont des femmes et des enfants. Des centres spécifiques doivent donc être créés. Laisser les appartements aux auteurs de violences ne serait pas décent. Pour cette raison, nous avons utilisé les solutions appliquées en Autriche.

Nous pouvons aussi évoquer l'application de l'emprisonnement ferme à l'égard d'un récidiviste déjà auteur d'un crime. S'y ajoutent une thérapie forcée et des actions correctives envers les auteurs de violence conjugale.

Toutes ces solutions légales font-elles leurs preuves ? Sont-elles suffisantes ? Non. Nous nous accordons tous à dire, en Pologne, qu'elles ne sont pas efficaces.

Aujourd'hui, au Sénat, nous discutons de travaux que nous avons lancés sur deux pétitions. La première concerne les pères demandant la garde alternée avec le consentement de l'autre parent ou non, sans nécessaire consentement de l'enfant. Nous ne défendons pas suffisamment les droits des enfants et prenons mal en compte l'existence de violences domestiques. Ce n'est pas vraiment conforme à la Convention d'Istanbul. La question de la violence économique est également passée sous silence. Elle est pourtant essentielle dans la qualité de la vie conjugale et familiale. Les pères réclament également des peines, y compris de prison, pour les mères les empêchant de voir leurs enfants.

Au travers d'une autre pétition, des mères réclament la mise en place de toutes les dispositions prévues par l'article 31 de la Convention. Je regrette que les avis soient divergents. Je suis persuadée qu'une action commune de la part des sénatrices, au-delà des tendances politiques, pourrait aboutir à une mise en oeuvre de toutes les dispositions de l'article 31 de la convention.

Le droit polonais prévoit le droit d'être élevé par les deux parents. Il n'impose pas d'obligation de contact entre un parent et un criminel qui lui fait du tort. Nous allons nous y tenir. Cela guidera tous les travaux que nous mènerons à l'avenir.

Je suis persuadée qu'au cours du débat qui va suivre, il sera bon d'entendre la voix des ONG travaillant avec les victimes de délits, se heurtant à un droit défectueux ou imprécis.

Je laisse maintenant la présidence de cette séance à Mme la rédactrice Anna Dudek. Elle s'occupe de ces problématiques et écrit sur ces sujets dans le périodique Wysokie Obcasy, le meilleur à mon sens.

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