Je suis heureuse de vous recevoir, en tant que représentantes du Sénat de la République française. Je souhaite la bienvenue à Mme Annick Billon, présidente de la délégation aux droits des femmes du Sénat français, ainsi qu'à Mme Boyer, présidente du groupe d'amitié franco-polonais du Sénat et membre de la délégation aux droits des femmes.
Je suis Magdalena Kochan, vice-présidente de la commission sénatoriale de la politique de la famille, des seniors et des affaires sociales. Je suis accompagnée de Mme Gabriela Morawska-Stanecka, et de M. le Sénateur Marek Borowski, qui souhaitera certainement s'exprimer au nom du groupe d'amitié parlementaire polono-français.
Je souhaite également la bienvenue à Urszula Nowakowska, présidente du centre du Droit des femmes, ONG très dynamique en Pologne, et à Françoise Brié, directrice générale de la Fédération nationale Solidarité Femmes (FNSF).
Au nom de l'ambassadeur de France en Pologne, Frédéric Billet, j'ai le plaisir de vous souhaiter la bienvenue pour ce webinaire.
Nous sommes ravis de vous retrouver aujourd'hui de manière virtuelle des deux côtés de nos frontières, à la fois en France et en Pologne. Nous avons tenu à organiser ce webinaire en partenariat avec nos représentations nationales, mais aussi avec des représentantes de la société civile, acteurs essentiels pour évoquer ces sujets. Ceux-ci sont importants pour nos sociétés, mais également pour nos exécutifs, la question de l'égalité entre les femmes et les hommes étant la grande cause du quinquennat d'Emmanuel Macron.
Je laisse sans plus attendre la parole à nos modératrices et aux différents participants. Merci encore d'avoir été si actifs et d'avoir accepté de tenir ce webinaire aujourd'hui.
Mesdames et Messieurs, chers collègues du Sénat polonais, chers collègues du Sénat français, je suis très honorée de m'exprimer aujourd'hui devant vous, en tant que présidente de la délégation aux droits des femmes du Sénat français, et d'introduire ce webinaire franco-polonais sur la question de la lutte contre les violences faites aux femmes et de la protection des enfants dans les cas de violences domestiques.
Il s'agit, pour nos deux assemblées, d'une première, rendue possible grâce à une initiative de notre ambassade en Pologne. Celle-ci a souhaité organiser un échange sur ce sujet crucial pour nos deux pays et sur la traduction législative, dans nos droits respectifs, de l'article 31 de la Convention d'Istanbul du Conseil de l'Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l'égard des femmes. Cet article vise spécifiquement la nécessaire protection des enfants dans les cas de violences conjugales.
Cette convention a été récemment fragilisée par l'annonce du retrait de la Turquie le 20 mars dernier. Le président de la commission des affaires étrangères du Sénat français, Christian Cambon, et moi-même, en tant que présidente de la délégation aux droits des femmes, l'avons fermement condamné. Dans ce contexte, il apparaît primordial de consolider, dans l'ensemble des pays signataires, la mise en oeuvre de cette convention, tant du point de vue du législateur que de celui des forces de l'ordre et des magistrats qui appliquent la loi.
Chers collègues et amis polonais, comme vous le savez sans doute, la lutte contre les violences faites aux femmes a été déclarée « grande cause du quinquennat » par le Président de la République Emmanuel Macron, lors de son arrivée au pouvoir. L'organisation d'un Grenelle de lutte contre les violences faites aux femmes a permis de faire travailler ensemble le Gouvernement et les principales associations de lutte contre les violences. Cet évènement avait débouché sur l'annonce de plusieurs mesures fortes le 25 novembre 2019, et sur une campagne de communication sans précédent.
Certes, des progrès indéniables ont été réalisés depuis. Nous avons notamment assisté à une baisse du nombre de féminicides en 2020, à un renforcement de l'arsenal législatif et à une prise de conscience dans l'opinion publique du véritable fléau social que représentent les violences faites aux femmes. Pour autant, les statistiques des violences domestiques commises dans notre pays sont encore trop élevées. Les mentalités tardent à évoluer, s'agissant notamment de l'exercice de l'autorité parentale par un conjoint violent. Nous savons pourtant toutes et tous qu'un auteur de violences conjugales ne peut être un bon parent.
Sur ces différents sujets, je me réjouis donc des échanges que nous mènerons cet après-midi. J'espère que cette première rencontre virtuelle entre nos deux assemblées ne sera pas la dernière et qu'elle pourra un jour se prolonger par une rencontre réelle, en présentiel.
Je remercie l'ensemble des participants à ce webinaire et tiens à souligner à quel point le dialogue et l'échange de bonnes pratiques sont essentiels au renforcement de nos législations respectives. Le chemin à parcourir dans la lutte contre les violences faites aux femmes et aux familles - je préfère le terme « violences conjugales » à celui de « féminicide », puisque ces violences se déroulent au sein du foyer, lieu où l'on devrait être protégé - est encore long, et nécessite notre mobilisation à tous. Je crois que nous avons beaucoup à apprendre des expériences d'autres pays, et notamment de partenaires et amis comme la Pologne au sein de l'Union européenne. Je remercie à cet égard Mme la présidente Billon d'avoir dressé un portrait international de ce qu'il s'est passé et des difficultés auxquelles nous sommes confrontés, surtout depuis le retrait de la Turquie de la Convention d'Istanbul. Nous avons également assisté à une montée des violences dont les femmes sont les premières victimes.
La prise de conscience qui est en train de s'opérer sur cette question me semble salutaire. Elle est internationale. Trop longtemps, notre société a tu la réalité des violences intrafamiliales. Leur persistance est une meurtrissure qui ne peut plus être ignorée. Elle nous enjoint à agir.
La question de la lutte contre les violences intrafamiliales n'est cependant pas nouvelle en France. Je rappelle que sous le quinquennat de Nicolas Sarkozy, le gouvernement de François Fillon a créé, par la loi du 10 juillet 2009, un parcours d'orientation pour les femmes victimes de violences, lancé l'expérimentation d'un dispositif de surveillance électronique des conjoints violents et créé l'ordonnance de protection.
À l'époque, nous n'avions pas pu développer le bracelet anti-rapprochement car le Conseil constitutionnel l'interdisait, estimant qu'il s'agissait d'une atteinte corporelle. Nous avons mis plusieurs années à le mettre en place. Aujourd'hui, un budget a été débloqué pour 1 000 bracelets anti-rapprochement. Au 8 juin 2021, 147 bracelets ont été prononcés, dont 96 actifs. Ce dispositif n'empêche malheureusement pas toujours les crimes, mais je pense néanmoins que nous devons le développer, tout comme le téléphone grave danger, créé en 2010.
Ce sont les associations, les forces de l'ordre, les avocats et les magistrats qui sont en première ligne pour pallier les carences qui sont constatées sur le terrain. Leur travail et leur dévouement forcent l'admiration et le respect, bien qu'ils se sentent souvent livrés à eux-mêmes par manque de moyens, de temps ou de formation pour traiter ce phénomène de masse. Nous parlons toujours des femmes et enfants qui meurent. Dans ces chiffres, nous ignorons les centaines de personnes qui sont malades, qui souffrent ou qui finissent par décéder à cause de violences conjugales. Cette mort à petit feu n'entre pas dans les statistiques des décès. Elle est pourtant bien réelle. Elle pèse énormément sur la société française et, j'imagine, sur la société polonaise. Elle pèse par des violences psychosociales. Elle représente un coût très important pour la société. Surtout, elle représente un coût éminemment important pour les enfants de ces familles, qui sont des victimes. C'est ce que je pense et que j'ai porté dans plusieurs textes. Je souhaite faire en sorte qu'un enfant témoin de violences conjugales puisse être considéré comme une victime à part entière. J'espère que nous y parviendrons.
En tant que législateur, nous avons pour rôle de soutenir ces familles en améliorant l'efficacité des outils qui existent et en apportant des réponses concrètes aux nouvelles difficultés qui se posent.
Avant de siéger au Sénat, je siégeais à l'Assemblée nationale depuis 2007. J'y étais vice-présidente de la délégation aux droits des femmes et présidente du groupe d'étude sur les violences intrafamiliales. J'ai déposé dix propositions de loi sur les violences physiques et sexuelles à l'Assemblée nationale et il y a quelques mois au Sénat. Comme mes collègues s'intéressant à ces questions, je me suis attachée à trois priorités :
- d'abord, mieux définir les violences conjugales, notamment avec l'utilisation de plus en plus courante des moyens électroniques.
Je me félicite d'avoir fait voter, avec le soutien d'Annick Billon et de mes collègues, la reconnaissance du syndrome de la femme battue, ou plutôt de la personne battue, il y a une dizaine de jours. C'est extrêmement innovant en droit français. C'est une inspiration du droit canadien qui, depuis 1990 et l'arrêt Lavallée, reconnait ce syndrome. Le syndrome de la femme battue a été pour la première fois évoqué en France par un expert psychiatrique, dans l'affaire Valérie Bacot, qui sera jugée dans les jours à venir. Le jugement d'une femme ou d'une personne vivant depuis des années dans la terreur des coups qu'elle subit, sous l'emprise de son conjoint violent, est altéré, car elle vit en situation de danger de mort permanent. Le Sénat français a considéré, par le vote de cet amendement, que le fait d'être sous l'emprise d'une tierce personne depuis plusieurs années, d'être battue, torturée, violée, pouvait, dans des cas exceptionnels reconnus par des experts psychiatres, altérer le jugement d'une personne. La plupart du temps, une femme victime de violences meurt de dépression, de maladie ou sous les coups de son conjoint. Dans des cas exceptionnels, elle dit « c'est lui ou moi » ou « c'est lui ou moi et mes enfants » - les enfants entrent en effet souvent en jeu dans cette défense. Elle est alors bourreau, puisqu'elle a tué quelqu'un, mais aussi et surtout victime. C'est ce que nous devons considérer ;
- ensuite, mieux surveiller les auteurs de violences conjugales. Je crois que nous devons améliorer la prise en compte des plaintes. Nous avons vu dans de récentes affaires que la prise en compte des plaintes n'avait pas été assez performante, qu'elle n'avait pas empêché que des femmes soient assassinées. Personnellement, j'avais plaidé pour que nous procédions à une comparaison des dépôts de plainte et des affaires poursuivies, par juridiction. Cet amendement a été refusé. Je pense qu'il faudra y revenir, car il est très important de voir pourquoi, à certains endroits du territoire, les plaintes sont poursuivies, et pourquoi elles ne le sont pas ailleurs ;
- enfin, mieux protéger les enfants. Le Sénat français a voté le 28 décembre 2018 une proposition de loi, que j'avais soutenue, reconnaissant le fait qu'un parent violent ne peut pas être considéré comme un bon parent. Nous avons simplifié la possibilité de retirer l'autorité parentale de façon provisoire. Je pense qu'aujourd'hui nous devrions progresser pour faire en sorte que l'enfant témoin de violences soit lui aussi considéré comme une victime à part entière.
Je suis convaincue que nos échanges permettront de dégager des pistes d'action communes. La coopération entre les Sénats français et polonais est particulièrement dynamique. Je rappelle que nous aurons l'honneur d'accueillir une délégation du Sénat polonais à compter du 28 juin.
Je suis membre du groupe d'amitié franco-polonais au Sénat et membre de la délégation qui viendra en France fin juin. Nos contacts avec nos collègues du Sénat français n'avaient jusqu'à présent lieu que sous forme de voyages, ce qui était parfois un peu compliqué. La pandémie s'est accompagnée d'un développement des contacts virtuels.
Aujourd'hui, nous évoquons la Convention d'Istanbul, très importante en Pologne. Nous avons pour l'instant quelques soucis dans sa mise en oeuvre. Cet échange de points de vue sur les solutions juridiques et légales appliquées pour lutter contre les violences domestiques et conjugales est très précieux.
En France, 213 000 femmes sont victimes chaque année de violences physiques et/ou sexuelles commises par leur conjoint ou ex-conjoint. Près de 150 femmes en meurent. En 2020, le nombre de féminicides a enregistré une baisse significative de l'ordre de 40 % par rapport à 2019, puisque le nombre de femmes tuées par leur conjoint ou ex-conjoint s'est établi à 90. Il convient toutefois d'attendre les prochains mois pour voir si cette tendance se confirme. Depuis le début de l'année 2021, nous comptons déjà, hélas, 49 féminicides.
Ces violences n'épargnent pas les enfants.
140 000 enfants vivent dans un foyer violent. Les études montrent qu'ils sont témoins directs des violences dans 40 à 60 % des cas. 40 % des cas de maltraitance sur les enfants sont liés à la violence conjugale. En outre, chaque année ce sont vingt-cinq enfants mineurs qui sont tués par un de leurs parents dans un contexte de violences au sein du couple.
La question des violences conjugales et celle de la protection des enfants sont donc intimement liées, comme le soulignait Valérie Boyer. Je tiens à le dire avec force : un conjoint violent n'est pas et ne sera jamais un bon parent.
La France est depuis plusieurs années engagée dans la prévention et la lutte contre les violences intrafamiliales. En particulier, pour ne citer que les initiatives les plus récentes, un Grenelle des violences conjugales a été organisé à l'automne 2019, en présence d'acteurs de terrain, de professionnels, d'associations et de familles de victimes. Deux lois ont en outre été récemment adoptées sur ces sujets spécifiques : la loi du 28 décembre 2019 visant à agir contre les violences au sein de la famille et la loi du 21 juillet 2020 visant à protéger les victimes de violences conjugales.
Ces textes ont notamment permis d'accélérer la délivrance des ordonnances de protection (OP) et de faciliter l'attribution de téléphones grave danger (TGD). Ils ont autorisé la saisie des armes, introduit le bracelet anti-rapprochement (BAR) et prévu une suspension de plein droit de l'exercice de l'autorité parentale.
Hélas, les chiffres et les affaires des récents féminicides démontrent que la loi est là mais que son application reste limitée et insuffisante.
J'en viens au sujet qui nous occupe plus particulièrement aujourd'hui, à savoir la protection des enfants en cas de violences intrafamiliales.
L'article 31 de la Convention du Conseil de l'Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l'égard des femmes et la violence domestique, dite Convention d'Istanbul, impose la prise en compte des actes de violences lors de la délivrance des ordonnances judiciaires régissant les droits de garde et de visite. Il prévoit que l'exercice de ces droits ne doit pas porter atteinte à la sécurité des victimes et de leurs enfants.
Cet article se traduit aujourd'hui par plusieurs dispositions dans la législation française. Tout d'abord, le juge dispose de la faculté de retirer l'autorité parentale ou de restreindre son exercice en cas de violences intrafamiliales. En cas de crime ou délit sur la personne de l'autre parent, la juridiction de jugement a, depuis 2014, l'obligation de se prononcer sur le retrait de l'autorité parentale. Depuis la loi du 28 décembre 2019 visant à agir contre les violences au sein de la famille, il est possible pour un juge pénal ou civil de prononcer le retrait de l'exercice de l'autorité parentale dans tous les cas où il pouvait auparavant prononcer le retrait de l'autorité parentale, ce qui inclut donc les cas de violences conjugales. Auparavant, les juges ne disposaient que de la faculté de retirer partiellement ou totalement l'autorité parentale, décision radicale lourde de conséquences, ce qui restreignait très fortement son application.
Le retrait de l'exercice de l'autorité parentale entraîne le retrait du droit de visite et d'hébergement, sauf décision contraire du juge, sans pour autant affecter les obligations de contribution à l'entretien et à l'éducation des enfants pesant sur tout parent.
En outre, depuis la loi du 28 décembre 2019 visant à agir contre les violences au sein de la famille, l'exercice de l'autorité parentale et tout droit de visite et d'hébergement sont suspendus de plein droit dès le stade des poursuites en cas de crime commis par un parent sur l'autre parent. Cette suspension est effective jusqu'à la décision du juge et pour une durée maximale de six mois. Ces dispositions sont applicables à toutes les poursuites engagées et les condamnations prononcées depuis le 30 décembre 2019.
Désormais, il existe donc, dans la législation française, un double mécanisme de suspension de l'exercice de l'autorité parentale en cas de crime commis par un parent sur l'autre parent :
- la suspension de plein droit de l'exercice de l'autorité parentale qui revêt un caractère provisoire pour une durée de six mois à compter de l'engagement des poursuites ;
- au stade de la condamnation, une nouvelle suspension de l'exercice de l'autorité parentale peut être prononcée.
La plus récente loi du 30 juillet 2020 visant à protéger les victimes de violences conjugales introduit de nouvelles dispositions importantes. Elle prévoit l'attribution prioritaire du logement conjugal à la victime de violences domestiques. Elle donne au juge pénal la possibilité, dans le cadre d'un placement sous contrôle judiciaire, de suspendre le droit de visite et d'hébergement de l'enfant mineur. Enfin, elle réduit les droits des auteurs de violences conjugales en matière de succession et décharge leurs enfants de leurs obligations de pension alimentaire.
Le code civil permet aussi au juge aux affaires familiales de retirer l'autorité parentale ou son exercice, ou de restreindre les droits de garde et de visite si l'intérêt de l'enfant le commande, notamment dans des situations de violences conjugales, et ce même en dehors de toute condamnation pénale.
En cas de danger pour l'autre parent, le juge aux affaires familiales peut aussi organiser les modalités des droits de garde et de visite et prévoir, par exemple, que la remise de l'enfant s'effectue dans un espace de rencontre qu'il désigne ou avec l'assistance d'un tiers de confiance ou du représentant d'une personne morale qualifiée. Les moments où les conjoints séparés se retrouvent pour confier l'enfant à l'autre parent sont en effet souvent des moments de tension propices à la répétition des violences.
La législation française est donc désormais en conformité avec l'article 31 de la Convention d'Istanbul. Pour autant, des progrès peuvent encore être accomplis dans la mise en oeuvre de ces outils juridiques et dans leur appropriation par les magistrats.
Pour conclure, j'aimerais aussi profiter de nos échanges d'aujourd'hui pour vous dire quelques mots de la proposition de loi que j'ai déposée en novembre 2020 et qui a été promulguée le 21 avril 2021.
Cette loi vise à protéger les mineurs des crimes et délits sexuels et de l'inceste. Elle introduit dans le droit français le principe de non-consentement de tout mineur de 15 ans à une relation sexuelle avec un adulte. Désormais, tout rapport sexuel entre un mineur de 15 ans et un adulte sera considéré comme un viol sans que le mineur ait à apporter la preuve des éléments constitutifs du crime subi : violence, menace, contrainte ou surprise. En outre, ce seuil de non-consentement est fixé à 18 ans dans les cas d'inceste.
La loi française pose donc désormais un interdit clair et fort afin de protéger les enfants des violences sexuelles commises par des adultes, souvent d'ailleurs par ceux ayant un ascendant direct sur eux. Plus de 80 % des crimes sexuels sur mineur sont en effet le fait de l'entourage proche. Plus jamais un enfant de moins de 15 ans ne sera considéré comme « complice » ou « complaisant » à l'égard d'un adulte commettant sur lui des actes sexuels. La loi protège ainsi les enfants des agresseurs en inscrivant dans le code pénal des infractions spécifiques : le viol sur mineur, le viol incestueux, l'agression sexuelle sur mineur et l'agression sexuelle incestueuse.
Je vous remercie pour votre attention.
Je voudrais très brièvement vous présenter ce qui est en vigueur en Pologne. La loi sur la lutte contre la violence conjugale a été votée en 2005 et largement amendée en 2010, soit avant le vote de la Convention d'Istanbul, qui est entrée en vigueur en Pologne le 1er août 2015.
La loi de 2010 a, pour la première fois dans le droit civil, prévu une obligation de quitter le logement commun pour l'auteur du crime, qu'il en soit propriétaire ou copropriétaire. Elle a aussi a obligé les autorités publiques, aux niveaux local et national, à protéger les victimes de violences conjugales et à leur attribuer une aide médicale, psychologique, sociale, juridique, professionnelle, familiale gratuite. Des centres de soutien sont financés par l'État et organisés par les collectivités locales, à commencer par les communes.
Le gouvernement doit présenter au Parlement son plan national de lutte contre la violence familiale, avec un diagnostic de la situation et des pistes pour les années à venir. Un coordinateur est désigné pour assurer la coordination gouvernementale. Cinq ministres travaillent ensemble sur le sujet : les Affaires sociales, l'Éducation, la Santé, la Justice et l'Intérieur. Nous avons aussi besoin de la police et de la gendarmerie militaire. La coordination de tous ces acteurs montre que nous avons pris au sérieux ce phénomène. Nous ne pouvons être efficaces que si nous assurons des actions interdisciplinaires.
Les communes désignent des équipes interdisciplinaires pour s'occuper des affaires concrètes sur leur territoire, dresser des diagnostics et trouver des moyens de prévention.
Une autre loi, qui fonctionne très bien, met en place des assistants familiaux qui commencent à intervenir auprès des familles dès l'apparition du problème, lorsqu'il est encore possible d'agir. Les études montrent que le travail réalisé sur le terrain par ces assistants de familles, qui sont davantage des amis de la famille que des assistants réalisant des vérifications, est efficace dans plus de 40 % des cas. Il permet de sortir les familles du système d'assistance sociale.
Les équipes interdisciplinaires comptent également des pédagogues, des psychologues, des représentants du corps médical, des policiers de terrain, des organisations non gouvernementales dont l'activité ne doit pas être sous-estimée.
Les lois protégeant les victimes comprennent l'interdiction d'infliger des châtiments corporels à des enfants. Chaque personne voyant un parent appliquer un tel châtiment doit prévenir les autorités.
L'obligation pour l'auteur de quitter l'habitation n'est pour l'instant pas très efficace. Un amendement récent a permis de prévoir cette interdiction dans la loi civile, mais aussi pénale. La police pourra donc désormais faire sortir l'auteur du crime de sa propre maison. Dans 90 % des cas, les victimes de violences conjugales sont des femmes et des enfants. Des centres spécifiques doivent donc être créés. Laisser les appartements aux auteurs de violences ne serait pas décent. Pour cette raison, nous avons utilisé les solutions appliquées en Autriche.
Nous pouvons aussi évoquer l'application de l'emprisonnement ferme à l'égard d'un récidiviste déjà auteur d'un crime. S'y ajoutent une thérapie forcée et des actions correctives envers les auteurs de violence conjugale.
Toutes ces solutions légales font-elles leurs preuves ? Sont-elles suffisantes ? Non. Nous nous accordons tous à dire, en Pologne, qu'elles ne sont pas efficaces.
Aujourd'hui, au Sénat, nous discutons de travaux que nous avons lancés sur deux pétitions. La première concerne les pères demandant la garde alternée avec le consentement de l'autre parent ou non, sans nécessaire consentement de l'enfant. Nous ne défendons pas suffisamment les droits des enfants et prenons mal en compte l'existence de violences domestiques. Ce n'est pas vraiment conforme à la Convention d'Istanbul. La question de la violence économique est également passée sous silence. Elle est pourtant essentielle dans la qualité de la vie conjugale et familiale. Les pères réclament également des peines, y compris de prison, pour les mères les empêchant de voir leurs enfants.
Au travers d'une autre pétition, des mères réclament la mise en place de toutes les dispositions prévues par l'article 31 de la Convention. Je regrette que les avis soient divergents. Je suis persuadée qu'une action commune de la part des sénatrices, au-delà des tendances politiques, pourrait aboutir à une mise en oeuvre de toutes les dispositions de l'article 31 de la convention.
Le droit polonais prévoit le droit d'être élevé par les deux parents. Il n'impose pas d'obligation de contact entre un parent et un criminel qui lui fait du tort. Nous allons nous y tenir. Cela guidera tous les travaux que nous mènerons à l'avenir.
Je suis persuadée qu'au cours du débat qui va suivre, il sera bon d'entendre la voix des ONG travaillant avec les victimes de délits, se heurtant à un droit défectueux ou imprécis.
Je laisse maintenant la présidence de cette séance à Mme la rédactrice Anna Dudek. Elle s'occupe de ces problématiques et écrit sur ces sujets dans le périodique Wysokie Obcasy, le meilleur à mon sens.
En tant que journaliste, je parle avec une centaine de femmes chaque jour. Parfois, elles considèrent ma rédaction comme une dernière planche de salut. J'entends et j'écoute également les dires de nos amis de France. Parfois, je me dis que la naissance de nouvelles régulations est positive. Pour autant, les mères - car 98 % des victimes sont des femmes - appelant au secours, désemparées et désespérées, ont parfois l'impression de lancer une alerte dans le vent. Elles préfèrent créer un groupe pour écrire sur Internet. Elles restent anonymes, tandis que les pères, surtout lorsqu'ils sont issus d'organisations radicales, sont très bruyants et efficaces. Nous allons maintenant entendre les témoignages d'ONG qui portent assistance, au jour le jour, aux victimes, femmes et enfants.
Je vous remercie de cette invitation et de cet échange entre la France et la Pologne. Il est toujours intéressant de récolter des informations et des retours d'expérience dans différents pays.
Je commencerai évidemment par évoquer la Convention d'Istanbul et l'importance de son article 31 en matière de droit de visite et d'hébergement dans les situations de violence. Il rappelle qu'il est nécessaire de prendre en compte les actes de violence avant de décider de tout ce qui touche à l'autorité parentale et au droit de visite et d'hébergement. Il est essentiel de placer la mise en sécurité des femmes et des enfants avant toute autre chose. Je peux constater, en tant qu'association, que ce problème traverse de nombreux États et pas uniquement la France et la Pologne. D'autres pays, en Europe et ailleurs, sont également concernés. Cette question est centrale dans la sécurité et la prévention des femmes et des enfants.
En introduction, je souhaite ajouter que nous sommes bien conscients que les rôles parentaux sont toujours inégalitaires. Il est important de le souligner lorsque nous parlons de résidence alternée ou d'hébergement. Les tâches domestiques et parentales reposent principalement sur les épaules des femmes. Cet élément est important dans les suites qui seront données dans le cadre de séparations. Nous devons travailler en amont sur le partage de ces tâches, pour plus d'égalité entre les femmes et les hommes et pour nous assurer que la coparentalité dans le couple existe durant la vie commune, mais également après la séparation.
Les violences conjugales sont un facteur d'inégalité entre les femmes et les hommes extrêmement important dans la sphère privée. C'est un phénomène de grande ampleur. En France comme ailleurs, des femmes et des enfants sont tués par ces violences. Il est important de veiller à leur sécurité.
Il existe également des violences post-séparation. Nous le savons, la séparation est une période à risque. Les femmes, lorsqu'elles partent, s'exposent à un risque réel. 30 % des féminicides en France sont commis lors de la séparation. Les violences post-séparation se déroulent souvent à travers les enfants. Les agresseurs affirment aux femmes que, si elles partent, elles n'auront plus le droit de garder leurs enfants. L'idée reçue selon laquelle un mari violent peut être un bon père a la vie dure. Elle traverse nos deux pays. Il est important de rappeler que c'est un stéréotype et qu'il faut le casser. C'est la violence qui détruit la famille, pas la séparation. Il est nécessaire de prendre ces éléments en compte dans les décisions qui seront prises.
La ligne d'écoute nationale, le 3919, a reçu 42 370 appels de la part de femmes victimes de violences conjugales en 2019. 79 % d'entre elles avaient au moins un enfant. Nous voyons que ceux-ci sont très impactés par les violences conjugales. Ils sont présents et peuvent être considérés comme des co-victimes.
La résidence alternée ne doit pas être prononcée lorsqu'il y a des violences conjugales.
Chaque situation doit être observée avec une grande attention, en tenant compte des inégalités sur le plan économique, mais aussi au regard des violences physiques, psychologiques, sexuelles commises à l'encontre des femmes et des enfants. Nous savons que la maltraitance sur les enfants est bien plus importante dans les cas de violence conjugale. Certaines enquêtes montrent en outre que les cas d'inceste sont cinq à six fois plus élevés dans les couples où il y a de la violence conjugale, en particulier pour les filles. Ce point doit faire l'objet d'une vigilance accrue.
Sur le plan législatif, des évolutions très intéressantes ont eu lieu en France, notamment sur les enfants exposés aux violences, circonstance devenue aggravante dans le cadre des violences conjugales. Le Haut Conseil à l'égalité entre les femmes et les hommes vient de publier un rapport indiquant que 2 695 demandes de poursuites ont été lancées sur ces circonstances aggravantes en 2019. 1 480 situations ont entraîné une condamnation. Cette nouvelle avancée législative commence à être appliquée. Il faut absolument augmenter son impact.
En France, nous avons également l'interdiction de la médiation pénale et familiale dans les cas de violences conjugales, ce qui correspond aux demandes de la Convention d'Istanbul. Nous devons poursuivre son application pour qu'il n'y ait plus du tout de médiation familiale et pénale en cas de violences conjugales.
Existe aussi, depuis 2019, la possibilité de prononcer le retrait de l'autorité parentale au pénal et la suspension provisoire de l'autorité parentale et des droits de visite et d'hébergement d'un parent en cas de crime contre l'autre parent. Depuis 2020, une autre loi permet la suspension du droit de visite et d'hébergement dans le cadre d'un contrôle judiciaire. Des modifications législatives sur les ordonnances de protection prévoient également une motivation de la décision en cas de droit de visite non encadré au profit de l'auteur de violences conjugales.
Des statistiques de 2019 viennent de sortir sur ces points. Il faut continuer à améliorer les lois et mieux les appliquer. Nous devons en particulier permettre aux femmes de quitter le domicile avec leurs enfants sans être sanctionnées. Vous avez parlé des condamnations des femmes cherchant à protéger leurs enfants lorsque ceux-ci sont victimes de violences. Il est important d'étudier ces situations, et de ne pas re-victimiser les femmes par des condamnations lorsqu'elles cherchent à protéger leur famille. Évidemment, nous demandons l'exclusion de la résidence alternée en présence de violences conjugales et intrafamiliales. Surtout, nous demandons d'inscrire ces violences comme motif grave justifiant un retrait du droit de visite et d'hébergement ainsi que de l'autorité parentale du parent violent, au moins temporairement. Nous demandons également de faciliter les lieux médiatisés, lorsque les droits de visite et d'hébergement peuvent reprendre et de favoriser les mesures d'accompagnement protégé des enfants (MAP). Des intervenants peuvent conduire l'enfant chez le parent reprenant les droits de visite, observer la situation et en référer aux autorités judiciaires le cas échéant. L'augmentation de ces lieux médiatisés avec des professionnels nous semble nécessaire, comme la prise en compte des violences sur les enfants et des violences conjugales dans les dossiers de non-représentation de l'enfant.
Nous avons, vous le voyez, encore quelques améliorations à porter. Les enfants deviennent un enjeu majeur dans les séparations pour violences. C'est un élément essentiel à prendre en compte. Nous devons être extrêmement vigilants si nous ne voulons pas re-victimiser les femmes victimes de violences et si nous voulons garantir leur sécurité et la protection de leurs enfants.
Avant de donner la parole à Mme Nowaowska, permettez-moi de vous poser deux questions. Que signifie cette résidence alternée ? Que faites-vous, en France, contre l'aliénation parentale ? Ce terme est très connu et débattu en Pologne. Il est très présent dans nos juridictions et institutions. Les mères protestent, tandis que les pères radicaux poussent cette formule.
La résidence alternée correspond à la garde alternée et au partage du temps passé entre le père et la mère. Elle peut être organisée une semaine sur deux, par exemple. Elle est assez revendiquée par un certain nombre de couples et de pères, y compris dans les cas de violence. Elle est alors contraire à la Convention d'Istanbul. Elle représente de plus une vraie problématique pour les femmes sur le plan économique. Elle ne permet pas leur protection et leur sécurité, ni celles des enfants, dans le cadre de violences conjugales. Il nous semble important d'interdire cette résidence alternée dans ces situations.
Les associations françaises sont également opposées à la notion d'aliénation parentale, concept souvent utilisé contre les femmes. Nous refusons qu'elle soit employée pour justifier des droits de visite et d'hébergement. Je crois que des circulaires ont déjà été publiées sur le sujet. Nous pourrions être plus fermes.
Merci pour cette explication. Je laisse la parole à Urszula Nowakowska, présidente du Centre du droit des femmes.
Merci de me laisser la possibilité de rencontrer des membres du Sénat français et d'une association similaire à la nôtre. Je suis un peu moins optimiste que vous concernant notre législation. Je constate beaucoup de lacunes dans la loi polonaise et dans la construction même de la coopération interdisciplinaire prévue dans la loi de lutte contre les violences familiales. À mes yeux, le système mis en place en Pologne est trop bureaucratique. Il n'est pas favorable aux femmes victimes qui devraient être aidées rapidement. Il ne se base pas sur les entités spécialisées, par exemple les centres d'aide sociale, qui remplissent un rôle primordial. En outre, de nombreuses institutions et personnes ne souhaitent pas participer aux rencontres du groupe interdisciplinaire. Cela prend beaucoup de temps, sans nécessairement apporter une vraie assistance et une vraie aide.
De nombreuses personnes se présentant dans notre centre n'ont bien souvent pas bénéficié de l'aide de ce groupe interdisciplinaire.
En Pologne, nous peinons à connaître les chiffres exacts des victimes de violences conjugales. Les statistiques officielles sont bien souvent en baisse. Elles ne montrent pas l'ampleur du problème et ne font état que des cas enregistrés, dévoilés.
Dans la mise en place de la procédure évoquée par Mme la sénatrice, je m'inquiète également de la chute des condamnations constatées, notamment sur la base de l'article 207, qui traite de la violence conjugale. Nous constatons que la violence au sein de la famille n'est pas réellement perçue comme un crime, mais plutôt comme le problème d'une famille qui doit éventuellement être aidée.
Selon moi, nous devons repenser le système en vigueur en Pologne et décider si nous souhaitons traiter ces situations comme des crimes ou des problèmes familiaux.
Je m'inquiète aussi de savoir qu'il existe bien souvent des signalements réciproques en Pologne. Les agresseurs, pour se défendre, demandent également qu'un signalement de violences soit établi pour eux. En Pologne, contrairement à d'autres pays ayant mis en place des procédures pour constater qui est la victime et qui est l'agresseur, la défense des femmes contre l'agression est considérée sur le même pied d'égalité que la violence qu'elles ont subie. Deux signalements sont donc établis. Ce sujet doit être rediscuté avec l'aide des associations s'engageant dans la défense contre les violences.
Nous devons aussi nous intéresser à ces problèmes en prenant en compte le sexe. Durant des années, il a été très difficile de dire que le crime avait un sexe. La situation commence à évoluer grâce à la Convention d'Istanbul. Vous le savez, des tentatives ont visé à la supprimer en Pologne. Le Premier ministre a saisi le Tribunal constitutionnel pour qu'il constate son éventuelle inadéquation avec la loi polonaise. Nous nous préoccupons énormément de la suite qui sera donnée à la Convention en Pologne.
Nous ne partageons en outre pas la joie exprimée par le ministre de la justice et d'autres membres du gouvernement quant à la loi polonaise, si efficace que nous n'aurions même pas besoin de la Convention. Nous savons que les standards du pays ne sont pas à la hauteur. Nous assistons à une pénurie d'unités spécialisées d'aide. Vous avez mentionné les centres de soutien. Notre organisation en gère un. D'autres sont dirigés par des collectifs locaux. Il n'y en a que trente-six dans toute la Pologne. C'est très peu. Les autres centres auxquels peuvent s'adresser les femmes ne sont pas des centres spécialisés mais plutôt des centres de crise ou d'urgence. Ils peuvent aider d'autres personnes, et pas nécessairement les femmes, en cas de crise. Nous devons nous appuyer davantage sur les unités spécialisées, qui peuvent assurer une aide plus stable et efficace.
Les problématiques de violences à l'égard des femmes et des enfants ne sont malheureusement pas regardées de la même manière en Pologne et en France. Le fait que le partenaire soit violent à l'égard de sa femme représente pourtant une violence psychique à l'égard des enfants. Même si des procédures sont ouvertes, même si des signalements sont établis, l'enfant se perd dans cette affaire. Je me souviens d'une cliente qui souhaitait que son fils de treize ans témoigne devant la juridiction. Elle a été accusée d'impliquer cet enfant dans les problèmes des adultes. Ses compétences en tant que mère ont été remises en cause. Bien souvent, l'enfant est pourtant le seul témoin de la violence. Il devrait avoir la possibilité de prendre la parole. Dans notre pays, les enfants n'ont pas la parole, on ne leur pose pas de question, on ne leur demande pas s'ils préfèrent rester avec leur père ou leur mère. Du point de vue de la loi, c'est pourtant une obligation. Le code de la famille comprend une disposition concernant le droit de visite et de contact, mais aussi concernant l'obligation de contact. J'ai le sentiment que cette obligation ne concerne que les femmes et les enfants.
De nombreuses associations de pères sont désormais très actives. Ils veulent avoir des contacts avec leurs enfants. Les juridictions polonaises ne prennent pas en compte la violence lorsqu'elles décident de la résidence de la garde d'enfant ou du lieu de domicile. Dans certains cas extrêmes, les femmes, pour éviter l'agression, ont quitté le domicile avec leurs enfants pour chercher un abri. Le tribunal décide finalement que les enfants doivent retourner vivre chez leur père, puisque leur mère n'a pas de domicile ou de stabilité.
Cette décision a été prise dans une affaire que j'ai suivie. Se déroulait en parallèle une affaire pénale, très avancée. Le juge a tout de même décidé que les enfants devaient retourner chez leur père, qui ne souhaitait pas qu'ils puissent garder un lien avec leur mère. Celle-ci a dû payer des sommes importantes pour contacter ses enfants, leur père vivant à plusieurs centaines de kilomètres du lieu où elle s'était établie en fuyant la violence, puisqu'elle n'était pas en sécurité à proximité de son mari.
Nous sommes donc très éloignés des standards de la Convention. Pour l'instant, aucune initiative législative n'a été prise. À l'exception de pétitions, peu d'actions sérieuses sont menées. À l'heure actuelle, je ne pense pas qu'il soit possible de proposer des solutions en vigueur en France pour les appliquer en Pologne. Nous avons constaté de nombreux exemples au cours desquels le tribunal décidait que les enfants devaient avoir un contact illimité avec leur père, même en cas d'agression très brutale de sa part à l'égard de sa compagne. En Pologne, nous manquons d'endroits où organiser des contacts supervisés et médiatisés. Nous avons assisté à des décisions absurdes de tribunaux décidant que le père devait avoir la possibilité de voir dans quelles conditions vivait son enfant. Nous avons fait en sorte que ces décisions ne soient pas mises en oeuvre. Ce n'est maintenant plus le cas.
Nous disposons d'un centre au sein duquel nous proposons des consultations. Il n'existe pas d'autres endroits assurant cette supervision de contact dans les cas de violences passées. Nous avons proposé ce type de dispositif mais cette idée n'a pas, pour l'instant, été accueillie favorablement. Il nous est répondu que cela coûte cher et qu'il n'est pas nécessaire de faire entrer d'autres institutions dans ces situations. Le contact supervisé n'a pas été institutionnalisé.
Revenons aux questions de contact. J'ai observé les décisions concernant l'autorité parentale et son retrait. En 2019, seuls 300 pères ont été privés de leur autorité parentale. Nous comptons de nombreux exemples tragiques liés au contact entre le père agresseur et ses enfants. Je peux citer un cas très connu. Une femme accusait son mari de l'avoir maltraitée. Celui-ci a emmené son enfant sans le consentement de la mère, à plusieurs reprises. Ce contact était illimité et non supervisé. Après un nouvel enlèvement, le tribunal a décidé que le contact devait avoir lieu sous la tutelle d'un curateur. Malheureusement, durant un contact supervisé au sein d'une galerie marchande, cet homme est entré dans les toilettes et a empoisonné son fils. Ils sont morts tous les deux. Sa fille est restée seule à l'aire de jeux. Il y a quelques mois, un autre enfant a été tué par son père, qui s'est ensuite suicidé lui aussi. Avant, il a envoyé un texto à la mère lui indiquant qu'il ne lui permettrait pas de rester avec son enfant. Bien souvent, ces contacts sont utilisés par les hommes pour poursuivre les violences à l'égard de la femme et des enfants.
Dans des pareils cas, les femmes sont bien souvent accusées de ne pas avoir agi pour défendre leur enfant. Qu'a fait l'État pour les défendre ? Pas grand-chose. En Pologne, une conviction très forte perdure, selon laquelle le père doit être présent même s'il est violent. L'enfant a le droit de garder un contact avec celui-ci, mais ce droit se transforme bien souvent en obligation de contact avec l'agresseur. En revanche, si ce dernier ne souhaite pas de contact, il n'y est pas contraint. Il n'est pas pénalisé s'il ne paie pas la pension alimentaire. Les femmes, quant à elles, peuvent être pénalisées si elles défendent leur enfant contre les agressions. Nous avons de ce fait besoin d'une loi qui nous permettrait de mieux défendre les victimes, de les mettre plus en sécurité, pour éviter que le contact avec les enfants ne permette aux agresseurs de poursuivre la violence. Nous connaissons de nombreuses situations de ce type.
Le phénomène de la violence est toujours présent dans notre société. Nous devons avoir conscience que la violence est pratiquée par ceux qui veulent maintenir leur emprise sur les plus faibles, femmes et enfants. Vous avez largement parlé des conditions de cette violence. N'oublions pas que l'État est l'institution qui doit la prévenir et la combattre. C'est pour ça qu'il est très important de protéger la Convention d'Istanbul en Pologne. C'est elle qui nous aide à créer une bonne législation, à prévenir et lutter contre la violence. Le renforcement des institutions, de tous les centres et des ONG portant assistance aux victimes est également essentiel.
Avant de devenir sénatrice, j'étais avocate. J'ai souvent eu à traiter de cas de violences à l'égard de la femme ou au sein des foyers. Plusieurs conclusions résultent de mon expérience. La violence est héréditaire. Ceux qui subissent la violence en deviennent souvent auteurs, faute d'assistance institutionnelle. C'est le cas même lorsque les violences ont été décelées, lorsque l'auteur a été condamné. L'absence de protection et d'assistance psychologique, de travail sur la victime, conduit à une reproduction du modèle vécu et à de nouvelles violences. Les victimes de violences, lorsque cette violence n'a pas été traitée, ont de très graves difficultés à construire une vie avec un autre partenaire. Elles rencontrent des problèmes relationnels, même dans leur travail. Cette question est éminemment importante. Enfin, 99 % des cas que j'ai eu à défendre en tant qu'avocate concernaient des personnes provenant de familles dysfonctionnelles. J'utilise intentionnellement ce terme, car il ne s'agit pas uniquement de violence, mais aussi de parents qui partaient de la maison, qui fuyaient, qui s'évadaient pour échapper à la violence. Aucune institution n'a été à même de s'en occuper pour qu'ils ne s'écartent pas du droit chemin. Parfois, il n'y avait pas de violence dans ces familles, mais il n'y avait pas de sentiments non plus, ni de tendresse.
En tant que juriste, je peux scruter l'horizon de la législation polonaise. La question la plus importante consiste à régler, dans le code pénal, le problème de la violence économique. J'ai souvent eu à traiter de ces cas de violences économiques et émotionnelles dans ma carrière, notamment dans des affaires de divorce. C'est un énorme problème, puisqu'elles sont très difficilement prouvables. Les témoignages de la victime et de l'auteur s'opposent. Ce dernier sait à merveille manipuler les autres. Il isole souvent la victime de sa famille, de ses amis. Il ne reste que lui et elle. Qui le tribunal va-t-il croire ? Les auteurs de telles violences sont souvent très intelligents. Ils savent très bien manipuler jusqu'au tribunal. Nous en percevons les effets par la suite, lorsque nous voyons des affaires liées à la protection et à la garde d'enfants. Nous devons régler ce problème en Pologne.
Nous devons, de plus, modifier la définition du viol. Nous parlons de plus en plus souvent de la violence sexuelle. « Non » signifie « non ». La femme ne peut pas être exploitée sexuellement lorsqu'elle est endormie ou sous emprise de l'alcool, par exemple. Les députés de la gauche ont déposé un projet de loi sur la modification de la définition du viol dans le code pénal mais il est resté sans suite. Enfin, nous devons modifier la question de la protection alternative et de la prise en compte de l'avis de l'enfant lorsqu'il faut décider de son sort. Il sait lui-même, instinctivement et sans forcément tout comprendre, si ses relations avec ses deux parents sont appropriées. S'il évite le contact avec l'un de ses parents, s'il n'en veut pas, quelque chose cloche.
Je suis très impressionnée de ce que vous avez dit concernant l'initiative législative en France, et sa manière d'aller de l'avant. J'aimerais que nous arrivions à mettre en oeuvre des solutions analogues en Pologne.
Je constate, en vous écoutant, que la Pologne a décidé de s'emparer de ce sujet. Bien entendu, vous n'êtes pas encore totalement dans le cadre de l'article 31 de la Convention d'Istanbul. Pour autant, nous constatons une volonté d'avancer de votre part. C'est déjà important.
J'ai constaté que vous aviez mis en place certaines actions, parmi lesquelles l'aide médicale, psychologique ou familiale gratuite. Ces dispositifs assez innovants sont plutôt proches des victimes. Vous avez également mis en place un appui sur vos territoires, avec l'implication des communes. Je pense que les dispositifs qui commencent à apparaître dans votre pays semblent adaptés pour dispenser une réponse de proximité. Ils sont toutefois trop peu nombreux pour endiguer un phénomène d'une telle importance.
Comment arrivez-vous à organiser une thérapie forcée ? Ce point nous a interpellées ici.
Vous avez évoqué la garde alternée. Ce sujet a également fait débat en France. Certains sénateurs et députés étaient sensibles à la voix de certains pères et d'associations pour la rendre systématique et non exceptionnelle. Bien entendu, la délégation aux droits des femmes et la présidente du groupe d'amitié franco-polonais, Valérie Boyer, se sont opposées à cette systématisation. Les violences conjugales, lorsqu'elles existent, ne sont pas toujours décelées en raison d'un phénomène d'emprise parfois sous-jacent. Cette systématisation placerait des femmes déjà victimes dans des situations extrêmement compliquées. Nous nous sommes donc opposées à cette proposition de loi.
Vous l'avez dit, la loi doit correspondre à l'article 31 de la Convention d'Istanbul. Je souhaite également vous mettre en garde : tout ne sera pas résolu lorsque la loi sera votée. Aujourd'hui, la France a avancé en termes de législation, grâce à tous les groupes politiques. Si le Président Emmanuel Macron a porté la grande cause du quinquennat, certains députés ou sénateurs se sont aussi emparés du sujet. J'ai pu parler de ma proposition de loi sur la protection des enfants et le seuil de non-consentement. Je pense aussi aux travaux évoqués par Valérie Boyer tout à l'heure, ou à une proposition de loi sur le bracelet anti-rapprochement de notre collègue député Aurélien Pradié. Un certain nombre d'outils sont donc votés en France ; mais ils nécessitent désormais des moyens pour être appliqués. Les téléphones grave danger sont pour l'instant relativement peu attribués. Les parquets disposent également de bracelets anti-rapprochement, trop peu utilisés. Des ordonnances sont prononcées sans nécessairement être respectées. Les récentes affaires de féminicide ont mis en lumière des défaillances dans notre système judiciaire et de suivi. Désormais, les mains courantes et plaintes devraient systématiquement être transmises au parquet. Le garde des Sceaux s'est récemment adressé à toutes les juridictions au travers d'une note pour que la loi s'applique. En tant que sénateurs, nous sommes conscients des missions confiées aux forces de l'ordre, de sécurité, de police et de justice. Des moyens humains considérables sont nécessaires.
J'ai été interpellée lorsque vous avez indiqué qu'une victime se manifestant n'était en réalité pas davantage considérée comme une victime que son agresseur potentiel. Cela me semble être un frein considérable pour avancer dans le sens de la protection des victimes et de la lutte contre les violences conjugales et intrafamiliales.
Nous vous avons écoutés avec beaucoup d'attention. Nous vous avons présenté un état des lieux de la situation actuelle et un état d'avancement de ce que nous avons mis en place ces dernières années. Je crois avoir été complète. Vous avez vous-mêmes été très précises sur la situation du droit et des chiffres en Pologne. Vous ne disposez apparemment pas de statistiques comme nous en bénéficions en France. Cet échange a été très intéressant et constructif. Je peux éventuellement vous proposer de vous adresser des informations complémentaires sur certains textes de loi et certaines mesures prises ces dernières années.
Ce n'est pas que la femme est traitée comme un agresseur, mais elle fait l'objet d'une certaine méfiance. Elle n'est pas considérée comme une personne fiable.
La Convention d'Istanbul est un document-cadre imposant la réalisation de certaines missions à tous ses signataires. Ces dispositions doivent apparaître dans la législation des différents pays.
Nous avons beaucoup parlé de la violence. J'ai remarqué que nos collègues français avaient largement évoqué la violence conjugale et au sein du foyer. Cette violence n'a pas nécessairement lieu au sein du couple ou du foyer. Elle peut également voir le jour au sein de couples non formalisés vivant ensemble.
La Convention propose de nombreuses dispositions extraordinaires. Nous avons largement évoqué l'article 31. L'article 12 me semble lui aussi primordial. Il pose les obligations générales de la Convention d'Istanbul et indique que la tradition, la culture, l'honneur ne peuvent pas justifier des actes de violence. C'est très important. Nous avons beaucoup à faire dans ce sens dans la législation polonaise. La question du viol n'y est, par exemple, pas totalement réglée. Nous devrions prendre en compte la notion de consentement. La violence économique n'est pas réglée, elle non plus.
Le Premier ministre a saisi le Tribunal constitutionnel pour constater la conformité de la législation polonaise et de la Convention sur la question du sexe et du genre. La Convention n'est pas comprise par certains. Elle évoque la notion de sexe biologique et a conduit à de nombreux malentendus. Sur cette base, certains essaient d'abolir la Convention d'Istanbul. Pendant ce temps, d'autres communautés et sociétés ultraconservatrices commencent à créer un document différent, intitulé « oui pour la famille, non pour le genre ». Les hypothèses retenues sont dangereuses. Nous nous inquiétons. Nous craignons que ce document ne prenne la place de la Convention d'Istanbul. Au sein du Parlement, l'opposition défendra bien entendu cette dernière.
Quels sont les besoins les plus urgents à régler dans la loi française concernant la mise en application de la Convention d'Istanbul ? Avez-vous remarqué une violence croissante pendant le confinement ? Par la suite, avez-vous constaté un nombre croissant de déclarations de violences pendant le confinement ?
Concernant les besoins de la France, je vais m'exprimer en mon nom, puisque je ne peux pas le faire au nom de tous les groupes politiques, même si le sujet des violences est assez consensuel sur les bancs du Sénat. Dans la mesure où l'arsenal législatif est à niveau, nous avons besoin que la loi soit appliquée. Cette application dépend parfois d'une volonté politique, mais aussi des moyens humains et financiers disponibles. Dans tous les commissariats et toutes les gendarmeries, nous devrions former un référent violences pour accueillir les victimes et recueillir leur parole dans les meilleures conditions. On n'écoute pas une victime d'agression de la même manière qu'une personne qui s'est fait voler son portable ou sa voiture.
Lors du confinement, la délégation a immédiatement travaillé sur le sujet des violences intrafamiliales, estimant qu'elles allaient augmenter. Le Gouvernement a été assez réactif et a mis en place un certain nombre de dispositifs. Un système a permis de se déclarer victime de violences dans les pharmacies ou les centres commerciaux. Les associations pouvaient y assurer des permanences. Nous avons de plus largement communiqué sur des numéros d'appel et des tchats sur lesquels pouvaient s'exprimer les femmes et les enfants. Les commissariats et les gendarmeries ont de plus été poussés à reprendre les dossiers de violences ayant suivi un dépôt de plainte ou une main courante. Un suivi particulier a été assuré pendant cette période. Les chiffres de 2020 ont affiché une baisse importante du nombre de féminicides. Les conjoints se sont trouvés dans le même logement pendant deux mois. Ils pouvaient difficilement se séparer. Nous devrons vérifier que la tendance à la baisse des féminicides en 2020 se confirme en 2021. Cela ne semble pas être le cas, au vu des dernières semaines. En cette sortie de confinement, nous assistons désormais à une accélération des affaires et des faits, tous plus horribles les uns que les autres.
Comment faites-vous pour que la loi que vous adoptez soit mise en application de façon correcte par toutes les parties prenantes ? Que faites-vous en matière d'éducation des jeunes, des adolescents, mais aussi des adultes pour agir correctement face à la violence ?
Enfin, Mme Billon a évoqué cette loi concernant l'inceste et les actes sexuels à l'égard de mineurs. Vous avez indiqué que la victime ne devait pas apporter d'éléments de preuves de son statut. Il existe donc une grande crédibilité à l'égard de ces personnes dans votre société. Comment avez-vous pu l'atteindre ? Chez nous, leur parole doit être confirmée.
Concernant votre première question, nous sommes parlementaires. Nous faisons la loi et avons également un pouvoir de contrôle de son application. C'est ce que nous nous attachons à faire régulièrement. Nous n'avons toutefois pas de baguette magique. Nous menons des travaux pour vérifier l'application de la loi puis nous faisons le maximum avec tous les moyens à notre disposition pour mettre en application ce qui a été voté. C'est le rôle du Parlement.
Concernant la proposition de loi que j'ai portée en début d'année, sachez qu'Emmanuel Macron a annoncé en 2017 qu'il inscrirait un seuil d'âge dans la loi, fixé à 15 ans. Il avait pour objectif d'établir un interdit pour toute relation sexuelle entre un adulte et un enfant de moins de 15 ans. En 2018, le Gouvernement s'est emparé de ce sujet au travers de la secrétaire d'État Marlène Schiappa et de la garde des Sceaux Nicole Belloubet. Un projet de loi est sorti, sans faire référence à ce seuil d'âge. Pourquoi ? À l'époque, le Conseil d'État a émis un avis selon lequel cette disposition risquait d'être inconstitutionnelle. Il s'agissait à l'époque d'un seuil de non-consentement impliquant un non-respect des droits de la défense. De plus, un certain nombre de dispositions étaient déjà en vigueur, et notamment l'atteinte sexuelle en deçà de 15 ans. Ajouter une présomption de non-consentement dans la loi aurait entraîné une double qualification, ce qui n'était pas possible. Un an et demi plus tard, nous avons donc eu pour objectif de trouver un dispositif en mesure de contourner cet obstacle. Nous avons cherché à fixer un seuil d'âge à 15 ans, un interdit clair dans la loi. L'enfant n'a pas à prouver les critères du viol que sont la violence, la menace, la contrainte ou la surprise. Les droits de la défense sont toujours conservés puisque l'accusé a la possibilité de prouver qu'il ne connaissait pas l'âge de la victime. Vous comprendrez que les agresseurs sont mis dans une position difficile, puisque plus de 80 % des agressions sexuelles sur mineur sont commises par une personne de son entourage, connaissant donc son âge.
Il existe un seuil de non-consentement. Pour autant, la loi n'est pas faite pour poser un interdit moral ou pour fixer l'âge auquel les jeunes doivent avoir des relations sexuelles. Aussi, pour préserver les relations consenties entre adolescents, nous avons fixé un écart d'âge de cinq ans.
Dans un certain nombre de pays, le seuil d'âge existe déjà. J'avais proposé un seuil à 13 ans, et un renforcement de la protection entre 13 et 15 ans pour contourner plus facilement l'avis du Conseil d'État. Le texte final fixe un seuil à 15 ans avec des exceptions liées à l'écart d'âge de cinq ans. Ce texte a amené beaucoup de débats et d'incompréhensions. Expliquer le droit au grand public se révèle parfois être un exercice compliqué.
Mesdames et Messieurs, je tiens à vous remercier de ces débats, de cette rencontre, qui, je l'espère, n'est que la première d'un cycle consacré exclusivement à cette thématique et à nos différences dans la législation, dans les codes de la famille, dans l'approche de l'éducation des enfants. Beaucoup de points nous unissent, mais d'autres nous différencient. J'ai perçu dans votre intervention que la difficulté principale résulte des barrières érigées dans notre propre esprit. Je me souviens de l'interdiction de frapper les enfants, qui s'est heurtée à un débat public si fort en Pologne et au Parlement. Ce n'est qu'une intervention personnelle du Premier ministre de l'époque qui nous a permis de forcer le passage de cette loi au Parlement. Aujourd'hui, cette interdiction rassemble plus de 50 % de partisans. Elle affrontait auparavant plus de 50 % d'opposants.
Beaucoup de choses vont s'éclaircir. La loi elle-même ainsi que le droit ne suffiront sans doute pas, mais la formation des forces spéciales, de la police, de la gendarmerie militaire, du procureur et des juges de la famille me semble être une mission surmontable. Nous devons la mener en commun, puisque c'est là un problème partagé par la France et la Pologne.
Merci beaucoup, Madame Cherner-Drieux, d'avoir pris l'initiative de cette rencontre. Merci, Mesdames Billon, Boyer et Brié, d'y avoir pris part. Merci à mes amies sénatrices et à tous les participants. Merci, Madame Urszula Nowakowska, d'avoir été notre modératrice. Merci à nos secrétariats et aux services techniques. Je compte sur la continuité de cette coopération.
Merci beaucoup. Je vous remercie très chaleureusement, au nom de toute l'équipe de l'ambassade de France et de M. l'Ambassadeur Frédéric Billet, d'avoir permis l'organisation et le bon déroulement de ce webinaire. Je suis très heureuse de voir que nous avons encore beaucoup de sujets à évoquer. Nous nous réjouissons déjà de la venue de la délégation polonaise en France à la fin du mois. Nous attendons également avec impatience la venue du groupe d'amitié français en Pologne. Nous restons à votre disposition pour faciliter les échanges, l'envoi de documents et de textes de législation.
Cette année se tiendra la conférence pour l'avenir de l'Europe, très importante puisqu'elle a pour rôle de faire dialoguer la société civile dans tous les pays européens. Je pense que le sujet évoqué ce jour illustre parfaitement l'un des dialogues qui pourraient se tenir dans ce cadre.