C'est avec grand plaisir que nous retrouvons aujourd'hui Brigitte Grésy, présidente du Haut Conseil à l'égalité entre les femmes et les hommes (HCE), qui fut parmi nos premières invitées en début de session. Nous vous avions en effet auditionnée le 19 novembre 2020, quelques jours après la reconstitution de notre délégation à la suite du renouvellement sénatorial de septembre 2020, afin que vous nous présentiez les dernières actualités du HCE.
Nous vous accueillons aujourd'hui, en cette fin de session, sur un sujet très important pour notre délégation. Vous le savez, le monde de l'entreprise, la place qu'y occupent les femmes, à tous les niveaux, et les questions relatives à l'égalité professionnelle sont pour nous des sujets majeurs. D'ailleurs, il n'y aura pas d'égalité et les femmes ne pourront pas véritablement lutter contre les violences si elles n'obtiennent pas l'égalité et l'autonomie économiques.
La délégation a ainsi décidé cette année de dresser un bilan de l'application de la loi dite « Copé-Zimmermann », relative à la représentation équilibrée des femmes et des hommes au sein des conseils d'administration et de surveillance et à l'égalité professionnelle, dix ans après son adoption le 27 janvier 2011. Le 21 janvier dernier, nous avons organisé une table ronde permettant de dresser le bilan des dix ans d'application de cette loi, à laquelle participaient notamment Marie-Jo Zimmermann en personne, mais aussi Laurence Parisot, Chiara Corrazza du Women's forum, Catherine Ladousse du cercle InterElles ou encore Françoise Savés, de l'Association des femmes experts-comptables, pour ne citer qu'elles.
Nous avions désigné à cette occasion un trio de rapporteures pour guider notre réflexion :
- Joëlle Garriaud-Maylam, qui fut en 2010 l'auteure du rapport que notre délégation consacra à la proposition de loi de Marie-Jo Zimmermann, rapport intitulé Vers la parité pour la gouvernance des entreprises ;
- Martine Filleul et Dominique Vérien, toutes deux vice-présidentes de notre délégation.
Le 31 mars dernier, nous entendions également notre collègue députée Marie-Pierre Rixain, présidente de la délégation aux droits des femmes de l'Assemblée nationale, sur sa proposition de loi visant à accélérer l'égalité économique et professionnelle. Ce texte a été déposé le 23 mars et adopté en première lecture à l'Assemblée le 12 mai. Le calendrier de cette session est si chargé que, pour l'instant, aucun groupe n'a réussi à faire prospérer cette proposition de loi issue de l'Assemblée nationale.
Cette proposition de loi a pour ambition d'accélérer la participation des femmes au système économique et professionnel. Pour ce faire, elle préconise notamment de passer à une seconde étape, après la loi Copé-Zimmermann, dont le bilan est la hauteur des objectifs assignés, mais dont l'effet de ruissellement espéré sur la place des femmes dans l'ensemble des instances de direction des entreprises se fait toujours attendre. Cette seconde étape consiste à promouvoir activement la présence des femmes aux postes à responsabilité au sein des entreprises.
Dans sa version transmise au Sénat, l'article 7 de cette proposition de loi prévoit une modification du code du travail visant à assurer une répartition équilibrée de chaque sexe parmi les cadres dirigeants et les cadres membres des instances dirigeantes. Dans les entreprises d'au moins 1 000 salariés, l'employeur devra publier chaque année les écarts éventuels de représentation entre les femmes et les hommes parmi ces cadres.
En outre, la proposition de loi leur fixe un objectif de mixité de 30 % de femmes d'ici à cinq ans et de 40 % d'ici à huit ans après la publication de la loi.
Chaque entreprise ne se conformant pas à ces obligations dans les délais prévus par la loi disposera ensuite d'un délai de deux ans pour le faire. À l'expiration de ce délai de deux ans, l'employeur pourra se voir appliquer une pénalité financière.
La proposition de loi étend également l'obligation de quotas de femmes au sein des conseils d'administration aux sociétés d'assurance mutuelle.
En outre, l'article 8 de la proposition de loi introduit des mécanismes paritaires pour guider les actions en fonds propres de la Banque publique d'investissement (Bpifrance), à la fois dans la composition des comités d'investissement et parmi les bénéficiaires des actions en faveur de l'entrepreneuriat. L'article prévoit également le conditionnement de l'octroi de financements en prêts ou en fonds propres au respect de l'obligation de publication annuelle de l'Index de l'égalité professionnelle, pour toutes les entreprises de plus de cinquante salariés. Hier, lors du Forum Génération Égalité, nous avons entendu des témoignages de femmes relatant leurs difficultés à obtenir des financements en raison de leur genre. Ce constat est valable dans le monde.
Sur ces différents sujets, nous souhaitons donc vous entendre, Madame la présidente, et connaître le point de vue du HCE sur les dispositions de la proposition de loi visant à instaurer des quotas dans les instances de direction des entreprises d'au moins 1 000 salariés.
J'aimerais aussi savoir ce que vous avez à répondre aux détracteurs des quotas qui estiment qu'il sera difficile de trouver un vivier de femmes compétentes pour siéger dans les instances de direction, notamment dans les secteurs peu féminisés.
Plus généralement, vous pourriez nous faire part des récentes propositions du HCE pour accompagner l'égalité professionnelle et salariale dans les entreprises, car comme le rappelait Marie-Jo Zimmermann lors de notre table ronde du 21 janvier : « Si, aujourd'hui, on se pose la question de la parité au sein des Comex et des Codir, c'est, entre autres, parce que la loi «Génisson» de 2001 sur l'égalité professionnelle n'a pas été appliquée ».
Je donnerai bien sûr la parole à mes collègues Martine Filleul, Joëlle Garriaud-Maylam et Dominique Vérien après l'intervention de Brigitte Grésy pour qu'elles complètent mon introduction par des questions.