Intervention de Dominique Vérien

Délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes — Réunion du 1er juillet 2021 : 1ère réunion
Audition de Mme Brigitte Grésy présidente du haut conseil à l'égalité entre les femmes et les hommes sur les dispositions de la proposition de loi visant à accélérer l'égalité économique et professionnelle adoptée par l'assemblée nationale le 12 mai 2021

Photo de Dominique VérienDominique Vérien, rapporteure :

Merci Madame la présidente du HCE, pour vos propos très complets. Ils ont répondu à un certain nombre des questions que nous aurions pu poser. Ils rejoignent également certaines préconisations que nous pourrions formuler dans notre rapport. Je pense notamment à la limitation à trois mandats cumulés au lieu de cinq au sein des conseils d'administration.

Je souhaite vous parler de l'accès aux filières techniques. J'entends bien la notion de quotas. Effectivement, les filles sont moins nombreuses que les garçons en écoles d'ingénieurs. Il me semble que le travail doit être mené bien en amont. Je suis personnellement ingénieure en travaux publics. Nous étions 10 % de filles à l'école. Nous n'étions pas beaucoup plus nombreuses en prépa, ni même en terminale scientifique. C'est bien au collège que tout s'est joué, pour savoir vers quelle filière nous orienter. Si nous disons souvent qu'un travail doit être réalisé, je vois peu d'évolutions sur ce sujet. Comment aider une petite fille à se projeter et à se dire qu'elle sera cosmonaute, grande chirurgienne, ou programmatrice ?

Sur les quotas dans les métiers, je serai également provocatrice. Ne devrions-nous pas mettre en place des quotas sur les métiers féminins et les formations féminisées ? Nous voyons bien qu'une formation se féminisant énormément se dévalorise. Je pense notamment aux filières de la justice. Il me semble dommageable pour notre société de ne pas atteindre un équilibre hommes-femmes parmi nos juges ou nos procureurs. Comment pouvons-nous réfléchir dans ce sens, afin de moins dévaloriser certains métiers ?

En ce moment se tient au Sénat une mission d'information sur l'uberisation des métiers. Nous avons réalisé que l'algorithme, qui ne devrait normalement pas être sexiste, le devient finalement. Même sur les missions purement confiées par des algorithmes, les femmes sont moins bien payées sur un même emploi. J'ai demandé si cet écart pouvait être lié à un nombre d'heures réalisées plus faible chez les femmes, qui ont plus de tâches notamment ménagères à réaliser. Ce n'est pas le cas. Il s'agit bien d'un taux horaire. À la naissance de chaque algorithme, il y a majoritairement un homme. Il introduit un biais, même sans s'en rendre compte. L'algorithme s'autoalimentant, le biais devient de plus en plus important. Là où les femmes ne sont, au départ, pas censées être pénalisées, elles le deviennent à la fin.

Enfin, j'ai moi-même monté un réseau féminin appelé Les femmes du bâtiment. Il visait à mettre en place des partages d'expérience, puisque nous sommes assez peu nombreuses chacune dans nos entreprises. Le fait de se rencontrer et de réaliser que nous vivons toutes plus ou moins la même chose est important. Comment faire pour aider ces réseaux à se développer ? Lors de la création de celui que j'évoquais, nous nous sommes rendu compte que les femmes ne savaient pas demander une augmentation. Un homme pousse une porte pour faire savoir à son patron qu'il n'a rien eu l'année dernière, qu'il a bien travaillé cette année, ce qui justifie une augmentation. Une femme n'ose pas le faire. Les patrons en jouent. Une de mes amies a voulu commencer à parler de sa future augmentation lors d'un trajet Paris-Lyon avec son chef. Il lui a répondu « Ah non, tu ne vas pas me parler d'argent, j'ai horreur de ça ! » Elle n'a pas été augmentée. L'année suivante, elle y est retournée, car elle a été poussée par son mari. Ce n'est pas possible. On ne peut pas être poussée par un homme pour lutter contre un homme. Soyons solidaires entre femmes. Aidons-nous. Ce qui lui est arrivé arrive à presque toutes les femmes. Ces réseaux me semblent donc très utiles. Pour autant, comment pourrions-nous les aider à mieux se faire connaître et se développer pour mieux aider les femmes ?

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