Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, ce texte vise à répondre, à la suite de l’accord national interprofessionnel du 9 décembre dernier, à un enjeu majeur : la promotion de la prévention primaire, au moment même où nous sortons à peine d’une culture de la réparation.
Selon la dernière enquête du ministère du travail, moins de 40 % des entreprises employant moins de dix salariés ont élaboré ou actualisé au cours de l’année leur document unique d’évaluation des risques professionnels, le DUERP, qui est pourtant obligatoire.
Pis encore, cette proportion est en baisse par rapport à la précédente enquête, qui portait sur l’année 2013. La proportion de TPE ayant mis en œuvre des actions de prévention contre les risques physiques aurait ainsi diminué d’au moins 10 % entre 2013 et 2016.
Le constat est donc sans appel : la culture de la prévention est très insuffisamment répandue au sein des TPE et PME, qui vivent encore la santé au travail comme un ensemble de contraintes administratives, et non comme un levier d’amélioration de leur performance.
L’ambition de cette proposition de loi est précisément de systématiser la démarche d’évaluation des risques professionnels dans toutes les entreprises, indépendamment de leur taille, et de garantir sa traduction opérationnelle dans la mise en œuvre d’actions de prévention et de protection.
À cet effet, les services de santé au travail, renommés « services de prévention et de santé au travail », devront jouer un rôle pivot dans l’accompagnement des employeurs, tout particulièrement auprès des TPE et PME.
Or, en la matière, les partenaires sociaux se sont rejoints, dans le cadre de l’ANI, sur le diagnostic de la grande hétérogénéité des prestations des services de prévention et de santé au travail interentreprises. Nous en avions déjà fait le constat, mon collègue Stéphane Artano et moi-même, dans notre rapport de 2019 sur la santé au travail.
Dans cette perspective, la première réponse apportée par la proposition de loi est de prévoir que chaque SPSTI fournira obligatoirement un ensemble socle de services, ainsi que, de manière facultative, une offre de services complémentaires qu’il déterminera.
Soucieuse de garantir que les SPSTI proposeront à l’ensemble des entreprises adhérentes les prestations les plus homogènes possible, la commission a précisé la définition de cette offre socle.
La proposition de loi revoit en conséquence, à l’article 9, les modalités de tarification des SPSTI. Le texte issu de l’Assemblée nationale confirme implicitement le principe jurisprudentiel du calcul de la cotisation en équivalents temps plein, ou ETP, qui est source de contentieux, peu respecté en pratique et ne correspond pas à la réalité des missions des SPSTI – en matière de prévention et de santé au travail, on ne peut effectuer un suivi partiel des salariés. La commission propose donc de consacrer un mode de calcul per capita, et non proratisé en ETP.
Par ailleurs, suivant le souhait des partenaires sociaux affirmé dans l’ANI, elle a inscrit dans le texte le principe d’un « tunnel » pour encadrer la fixation de la cotisation par référence au coût moyen national de l’ensemble socle de services.
Le deuxième apport de la proposition de loi au sujet de la qualité et de l’effectivité des services rendus, également issu de l’ANI, est la mise en place d’une procédure de certification des SPSTI par un organisme indépendant et accrédité. Favorable à ce dispositif, la commission a souhaité que les partenaires sociaux aient l’initiative dans la définition du cahier des charges, via le Comité national de prévention et de santé au travail, le CNPST.
L’Assemblée nationale a par ailleurs élevé au niveau législatif la procédure d’agrément administratif à laquelle sont soumis tous les SPST, sans toutefois renforcer sa portée.
La commission a introduit, en complément de cette procédure, un régime d’administration provisoire qui doit permettre, sans interrompre le service, de lui donner les moyens de se réorganiser lorsque sa gouvernance est défaillante.
La proposition de loi franchit une première étape dans l’amélioration du suivi de l’état de santé de certaines catégories de travailleurs, suivi aujourd’hui insatisfaisant. Sont concernés, en particulier, les indépendants ou encore les intérimaires.
Nous souscrivons à cet objectif, et la commission a enrichi le texte sur ce point, en ouvrant au chef d’entreprise la possibilité de bénéficier du suivi délivré par le SPST auquel adhère son entreprise et en proposant des modalités spécifiques de suivi des salariés du particulier employeur.
Des améliorations pourront encore être apportées au texte lors de nos débats, avec l’objectif partagé de renforcer la prévention et le suivi de l’ensemble des travailleurs.
La commission des affaires sociales vous demande donc, mes chers collègues, d’adopter cette proposition de loi dans la rédaction qu’elle vous soumet.