Évidemment, cette citation est à prendre avec recul et humour ; cela étant, elle nous interroge tout de même sur le lien entre travail et santé.
Comme nombre d’entre nous sur ces travées, je suis issu d’une génération qui ne s’est jamais posé la question du travail. Celui-ci donne un socle et, d’une certaine façon, un sens à la vie. Comme mes parents, je n’ai jamais imaginé une vie sans travail.
Cependant, le monde évolue et d’autres questions s’imposent, dont celles qui sont liées à la pénibilité, aux troubles musculo-squelettiques, à l’exposition à des matières ou substances dangereuses ou encore aux risques psychosociaux. Longtemps passées sous silence, elles ont été identifiées, puis considérées progressivement.
Le rôle de la médecine du travail est donc fondamental, notamment pour la détection, la prévention et la protection face à ces risques.
Toutefois, la baisse du nombre de médecins du travail ne peut qu’affaiblir l’accompagnement que les travailleurs sont en droit d’exiger. De plus, notre paradigme se devait d’être réévalué, et le concept One Health invite à un rapprochement entre le suivi dans le cadre du travail et la médecine de ville. Cela correspond à une évolution de nos sociétés vers une vie plus équilibrée et sans doute, nous l’espérons, plus heureuse.
Cette proposition de loi est le fruit d’un long travail d’échanges avec les syndicats et les partenaires sociaux, comme l’a souligné M. le secrétaire d’État. Je m’en réjouis à mon tour. Depuis mon élection en tant que parlementaire, je milite pour une démocratie plus apaisée, qui écoute et sollicite les corps intermédiaires.
Ces corps sont une source de propositions et d’informations essentielles pour le législateur. En étant au plus proche du terrain, dans les entreprises, ils nous communiquent régulièrement l’état des demandes, l’ambiance, les ressentis, mais aussi les difficultés vécues par les salariés, pour que nous puissions y répondre le plus rapidement possible.
Quand je vois que cet accord national interprofessionnel a été signé par l’ensemble des organisations patronales et syndicales, à l’exception de la Confédération générale du travail, la CGT, et que nous sommes capables de le transformer en un texte ambitieux pour la santé des travailleurs, mon attachement au paritarisme et au dialogue social en sort renforcé.
Le paritarisme n’est pas le concurrent de la démocratie parlementaire ; il est son indispensable complément !
Je tiens par ailleurs à féliciter nos rapporteurs Pascale Gruny et Stéphane Artano de la qualité du texte obtenu.
J’en viens à quelques-unes de ses principales avancées, celles qui tiennent particulièrement au groupe Union Centriste. La première d’entre elles est le renforcement de la prévention et la fin du cloisonnement entre les notions de santé au travail et de santé publique.
Je suis intimement persuadé que la prévention doit être au cœur de notre action pour toutes nos politiques publiques. Mais cela vaut encore plus pour les questions de santé, car un mal traité en amont coûtera moins à l’État. Si nous sommes capables de le voir venir, de le prévenir, alors nous pourrons le maîtriser. C’est vrai pour le tabac ou l’alcool, mais pas seulement : savoir déceler les premiers signaux d’un mal-être au travail peut sauver une carrière et permettre à un salarié de se remettre sur les rails.
Cette prévention doit être la même partout, et je me réjouis que ce texte mette fin aux inégalités que l’on peut observer entre les entreprises en fonction de leur taille ou de l’engagement de leurs dirigeants sur ces questions essentielles.
Cette prévention s’accompagne d’une simplification bienvenue des procédures. J’entends effectivement les patrons de nos TPE et PME qui, loin de ne pas être sensibilisés à la santé de leurs salariés, se plaignent régulièrement de procédures trop complexes, trop techniques ou trop nombreuses, d’autant plus que la prévention est le talon d’Achille du système de santé français.
Un autre point essentiel de ce texte est la reconnaissance de la contribution de la santé au travail à la santé publique. « Enfin ! », ai-je envie de dire…
Je ne sais pas pourquoi, mes chers collègues, nous avons si longtemps mis une barrière entre la santé publique et la santé au travail. Comme si nous revenions chez nous dans un autre corps que le nôtre ou que nous étions capables de laisser sur le pas de notre porte tous nos tracas professionnels. C’est évidemment faux, chacun le sait ici.
C’est pourquoi je salue pleinement la dynamique engagée par nos rapporteurs. La santé au travail, au même titre que la santé maternelle ou infantile, la santé environnementale, la santé par le sport, etc. a toute sa place dans la réalisation des objectifs de notre politique nationale de santé publique.
C’est sans doute évident pour certains, mais cela va mieux en le disant : la santé publique peut et doit concerner tous les domaines de la santé.
Un deuxième sujet de cette proposition de loi qui me semble important à relever et à saluer est l’homogénéisation de l’offre des services de prévention et de santé au travail, ainsi que la garantie de leur haut niveau de qualité.
Quand je lis dans l’accord national interprofessionnel que les partenaires sociaux se sont accordés sur le diagnostic d’une « grande hétérogénéité » des prestations rendues par les SPST, notamment en matière de prévention, je trouve cela tout simplement insupportable. Or c’est dans ce domaine que l’attente est la plus forte de la part des employeurs et des salariés.
Nous devons nous engager pour que chaque salarié dispose de la prévention en santé au travail dont il a besoin. Ce texte permettra, je l’espère, et nous devrons y veiller particulièrement, de combler les trous dans la raquette et de s’assurer que les salariés disposent d’un socle minimal ambitieux.
Un troisième axe développé dans cette proposition de loi m’a aussi particulièrement interpellé. Il met en lumière la désinsertion professionnelle – le terme est peut-être mal choisi, mais il correspond à un mal profond de notre société – et propose des solutions pour mieux la prévenir.
Je tiens donc à saluer, au nom des membres de mon groupe, toutes les mesures de la proposition de loi qui permettront de lutter contre ce phénomène : création d’une cellule pluridisciplinaire dédiée ; systématisation des échanges d’informations entre les organismes d’assurance maladie et les services concernés ; mise en place d’une visite à mi-carrière ; organisation de visite de préreprise et reprise, ainsi que de rendez-vous de liaison avec l’employeur. Ces mesures vont dans le bon sens.
Enfin, le quatrième et dernier sujet important aux yeux de mon groupe est la revalorisation de l’engagement des professionnels de santé au travail.
Les inégalités d’accès aux ressources médicales en santé sur notre territoire sont un véritable problème. Face à la pénurie médicale à laquelle nous sommes confrontés, ce texte va évidemment dans le bon sens.
Pour toutes ces raisons, mes chers collègues, le groupe Union Centriste votera en faveur de cette proposition de loi. Nous nous félicitons que le Parlement, main dans la main avec les syndicats, porte une proposition ambitieuse pour les travailleurs de notre pays et pour leur santé.
J’espère qu’elle est la première d’un cycle de propositions de loi importantes, coconstruites et pragmatiques, que nous pourrons nous féliciter d’adopter.