Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, quarante années nous séparent effectivement de cette première grande loi de décentralisation travaillée autour de Gaston Defferre.
Si l’horizon peut paraître lointain, il en est de même de l’ambition de ce texte, qui est lointaine des objectifs fixés par le Président de la République au début de son quinquennat en juillet 2017, lui qui nous annonçait un élan en matière de décentralisation et de déconcentration.
Aujourd’hui, devant vous, j’aurais aimé parler des mesures de décentralisation, de déconcentration et de différenciation. J’aurais sûrement été moins allant sur la décomplexification, que le Conseil d’État a préféré traduire en simplification : c’est dire si, là aussi, l’ambition de ce texte n’est pas au rendez-vous !
Pour autant, nous souhaitons faire ici, comme toujours, œuvre utile.
Il y a un peu plus d’un an, nous avons, avec le président Gérard Larcher, fait des propositions en matière de décentralisation, de déconcentration et de différenciation, afin d’être au rendez-vous, de ne pas nous dérober et d’adopter une attitude constructive.
Aujourd’hui, force est de constater que, en dépit de notre volonté, nous sommes quelque peu déçus par la portée du texte que vous nous présentez. Nous nous efforcerons cependant, comme à notre habitude – Françoise Gatel l’a rappelé –, de l’enrichir, ainsi que vous nous y invitez : essayons donc de faire route commune. Mais, pour y parvenir, encore faut-il que le Gouvernement accepte une partie des propositions du Sénat. Je le dis avec force et détermination, parce que, même si le texte peut paraître éminemment technique, un souhait est exprimé par nos concitoyens, par les Françaises et les Français : plus de proximité et plus de clarté de l’action publique, qui leur semble parfois illisible, car trop lointaine.
Nous l’avons dit et redit, nous souhaitions que le préfet de département soit la porte d’entrée de l’État territorial et que les conséquences de la crise sanitaire que nous traversons encore puissent trouver des réponses très concrètes dans ce texte, en particulier au travers de la gouvernance des ARS. Or, là aussi, nous sommes un peu déçus. Nous aurions voulu que le président de région puisse être associé au préfet de région pour gouverner ces ARS et faire en sorte que les problématiques rencontrées chaque jour par les élus sur les territoires soient perçues. Nous aurions également souhaité que des mesures visant à rendre facultatif l’exercice de la compétence « eau » soient proposées, comme le Sénat le demande depuis longtemps.
Enfin, comment parler de décentralisation sans parler des moyens qui permettent aux collectivités d’exercer leurs compétences ? Pourtant, le volet financier est le grand absent de ce texte.
Nous essaierons, là encore, de faire œuvre utile et d’être constructifs, parce que nous sommes convaincus que les Françaises et les Français attendent une plus large décentralisation. Ils veulent que les décisions soient prises au plus proche de leur quotidien, que ce soit au niveau départemental, régional ou du bloc communal et intercommunal.
En effet, contrairement à ce que laisse croire la petite musique que l’on entend, nous sommes là non pas pour déconstruire ce qui existe, mais pour mettre de l’huile dans les rouages, pour introduire des modifications que nous considérons comme salutaires. Il ne s’agit pas de ce que nous pensons, nous, à titre personnel ! Il y a, dans cet hémicycle, 348 hommes et femmes qui représentent l’ensemble des territoires de France et qui ne cessent de nous faire remonter les problématiques singulières qu’ils rencontrent dans leur département. En tant que sénateurs, nous sommes les porte-voix de ces territoires auxquels nous sommes toutes et tous très attachés.
Nous allons engager des discussions et débattre pendant plusieurs jours et semaines ici même. La porte est entrebâillée, mais elle a tendance à se refermer, car vous êtes dans l’incapacité d’entendre certaines de nos propositions. Nous entrevoyons encore un filet de lumière, qui est pour nous porteur d’espoir.
Nous espérons que les débats que nous allons conduire pourront éclairer la politique du Gouvernement et formulons cet espoir collectif que nous pourrons avancer dans un sens utile à nos territoires. Nous attendons donc vos propositions, mais j’oserai dire, si vous me passez cette expression, qui vivra verra !