Intervention de Stéphane Ravier

Réunion du 7 juillet 2021 à 15h00
Différenciation décentralisation déconcentration et simplification — Discussion en procédure accélérée d'un projet de loi dans le texte de la commission

Photo de Stéphane RavierStéphane Ravier :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, les lois RCT, NOTRe et Maptam ont conduit les gouvernements de droite et de gauche à une erreur de jugement considérable depuis plus de dix ans. Le grand bazar administratif ainsi créé éloigne les centres de décision du terrain et, donc, des Français.

Nos compatriotes ne savent plus à quelle porte taper, ils n’ont plus de réponse à leurs interrogations. Perdus dans ce dédale administratif, ils en oublient aussi le chemin qui mène aux urnes. Vos réformes, mes chers collègues, ne sont pas étrangères à l’abstention massive.

Le texte que nous allons examiner lors des prochaines semaines était censé être le grand acte de décentralisation, déconcentration, différenciation et décomplexification. À cette loi dite 4D, j’en ajouterai un cinquième, le D de « déception », car son contenu est finalement sans ambition.

Il est assez paradoxal pour le Gouvernement de vouloir faire de la Nation une start-up sans remettre en cause la suradministration, semblable en de nombreux points à celle de la fin de l’Ancien Régime, lorsque l’on critiquait l’enchevêtrement des bailliages, des sénéchaussées, des provinces, des gouvernements, des généralités… Pour exemple, un Marseillais a huit niveaux d’administration au-dessus de la tête : la mairie de secteur, la mairie centrale, le conseil de territoire, la métropole, le département, la région, l’État et, bien évidemment, l’Europe. Cet entassement de strates est une source de confusion, un frein à la démocratie, un accélérateur de dépenses publiques et de clientélisme.

Au lieu de donner un coup d’arrêt à cette situation et de mettre en œuvre une réforme organique, ce texte partiel va grossir la tour de Babel administrative de dispositions nouvelles sans cohérence ni sans plus de simplicité, alors qu’il eut fallu, au contraire, simplifier radicalement.

Nos communes sont la cellule de base de notre corps national. La majorité d’entre elles sont rurales et leurs conseillers municipaux en grande partie bénévoles. En cette période de politique bashing, il n’est pas inutile de le rappeler. Ces élus sont au contact des réalités et, donc, des besoins, servant l’intérêt général dans des conditions chaque jour plus difficiles en raison justement des contraintes imposées par des intercommunalités et des monstropoles toujours plus avides de prérogatives et de pouvoirs, sans qu’elles aient d’ailleurs la capacité de les assumer.

L’impératif premier d’une loi de décentralisation doit être le principe de subsidiarité : la responsabilité de l’action publique doit revenir à l’échelon le plus proche des sujets concernés, mais c’est l’inverse qui se produit !

À force d’imposer la rationalisation administrative et l’idéologie du déracinement permanent, on fait table rase des communes et des départements, ces collectivités locales connues et reconnues pour leurs compétences et leur réactivité au profit de structures informes, aussi désincarnées qu’inefficaces.

La coopération intercommunale pourrait être mise en œuvre par les conseils départementaux avec un maillage cantonal, plutôt qu’imposée par un EPCI.

Si les métropoles sont des réalités économiques, la légitimité de l’administration métropolitaine doit être remise en cause. Cela équivaudrait à supprimer une strate administrative et conférerait de l’envergure au mandat départemental.

En pleine crise institutionnelle et démocratique, nous avons l’opportunité de pousser jusqu’au bout la logique de la différenciation en redéfinissant des régions à taille humaine et dont la réalité géographique et historique serait cohérente.

Le triptyque État-département-commune est l’aboutissement de cette décentralisation-différenciation. C’est autour de ce triptyque que je vous invite, mes chers collègues, à orienter nos travaux.

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