Intervention de Jean-François Husson

Réunion du 12 juillet 2021 à 16h00
Loi de finances rectificative pour 2021 — Adoption définitive des conclusions d'une commission mixte paritaire sur un projet de loi

Photo de Jean-François HussonJean-François Husson :

Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, une dizaine de jours après la première lecture du projet de loi de finances rectificative (PLFR) au Sénat, nous voici de nouveau réunis. La commission mixte paritaire (CMP), qui s’est déroulée lundi dernier, s’est en effet avérée conclusive.

En première lecture, nous avions pris acte de la mise à jour des données macroéconomiques du Gouvernement, en particulier de la très forte dégradation de nos finances publiques, avec un déficit public à 9, 4 points de PIB et un endettement à 117, 2 %. Le rebond d’activité reste, quant à lui, fragile et serait moins important que celui de nos principaux partenaires européens.

J’ai également émis de fortes réserves sur les reports opérés par le Gouvernement entre 2020 et 2021, qui atteignent un niveau exceptionnel cette année et qui vont, à mon sens, bien au-delà de l’autorisation parlementaire. Enfin, il apparaît clairement que l’augmentation des dépenses prévue dans le présent PLFR répond à un objectif de précaution et de grande prudence.

Pour autant, dès la première lecture, le Sénat a adopté, en responsabilité, les dispositions du collectif budgétaire tendant à accompagner la sortie de crise. Il en est ainsi de la prolongation, avec des adaptations, du fonds de solidarité ou encore de la nouvelle aide au paiement des cotisations et contributions sociales.

Le Sénat a également voté des mesures comme le renforcement du carry back, qu’il appelait d’ailleurs de ses vœux depuis un an, ou encore la prolongation de l’octroi de la garantie de l’État au titre des prêts garantis par l’État, les PGE, et la reconduction de la prime exceptionnelle de pouvoir d’achat, la PEPA.

Le Sénat s’est montré constructif et raisonnable dans ses propositions de modification. J’en veux pour preuve les faibles évolutions de l’article d’équilibre à la suite de nos travaux.

C’est ainsi que, outre des améliorations techniques et de sécurisation juridique, de nombreux apports du Sénat ont été conservés dans le texte adopté par la CMP, parfois à la faveur de compromis. Ce résultat est le fruit d’échanges fructueux avec nos collègues députés, en particulier avec le rapporteur général de la commission des finances de l’Assemblée nationale, que je remercie de son écoute et qui a permis de rapprocher nos attentes.

Ainsi, si j’ose dire, je suis globalement satisfait qu’un certain nombre de mesures aient pu rester dans le texte. Je ne les citerai bien sûr pas toutes – je vous renvoie au texte publié pour l’exhaustivité –, mais certaines méritent à mon sens d’être soulignées en ce qu’elles illustrent les objectifs que nous nous étions fixés pour l’examen de ce texte.

Nous avons obtenu que la prime exceptionnelle de pouvoir d’achat, la PEPA, puisse être portée à 2 000 euros et être exonérée d’imposition sur le revenu et de cotisations sociales, sans condition, pour toutes les entreprises de moins de cinquante salariés, et ce jusqu’au 31 mars 2022. Il s’agit ainsi de reconnaître l’action de tous les salariés ayant dû exercer leur activité dans des conditions particulières pendant la crise et de soutenir leur pouvoir d’achat.

Dans le même esprit, et pour assurer l’équité fiscale, la commission mixte paritaire a maintenu l’exonération d’imposition sur le revenu votée par le Sénat pour la majoration exceptionnelle des indemnités de garde des internes perçues au cours de la première vague de l’épidémie.

Nous avons également conservé plusieurs mesures permettant de soutenir les entreprises qui en ont encore besoin. Ainsi en est-il de l’exonération d’imposition de l’aide à la reprise des fonds de commerce perçue par les entrepreneurs ayant repris une activité au cours de l’année 2020, à l’instar de ce qui est prévu pour les bénéficiaires du fonds de solidarité, ou encore de la prolongation jusqu’à la fin de l’année 2022 du relèvement temporaire à 25 % du taux de la réduction d’impôt applicable aux investissements dans les foncières solidaires chargées d’un service économique d’intérêt général, par parallélisme avec ce qui avait été voté à l’Assemblée nationale pour les souscriptions au capital des PME.

En outre, la suppression du tarif réduit de TICPE applicable au gazole non routier a été reportée au 1er janvier 2023. Nous sommes ainsi revenus à ce qui avait été annoncé par le Gouvernement. Les secteurs concernés ont déjà été durement touchés par la crise et n’ont, à ce jour, que des solutions balbutiantes pour renoncer à l’utilisation du gazole.

Nous sommes aussi venus en soutien aux collectivités territoriales en votant, par exemple, l’extension aux régies départementales du dispositif de compensation des pertes d’épargne brute, ainsi que la reconduction pour 2021 des « filets de sécurité » applicables à certaines ressources spécifiques aux collectivités territoriales d’outre-mer et à la collectivité de Corse.

Nous avons maintenu l’abattement dérogatoire à la taxe locale sur la publicité extérieure, issu d’un amendement de Nathalie Delattre, ainsi que la réintégration des dépenses engagées pour la réalisation des documents d’urbanisme et la numérisation du cadastre dans l’assiette des dépenses éligibles au FCTVA (Fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée), mesure adoptée sur l’initiative de Sylvie Vermeillet et Patrick Chaize.

Par ailleurs, la commission mixte paritaire a retenu deux ouvertures de crédits du Sénat au titre du plan de relance et directement destinées à l’action territoriale.

D’une part, 10 millions d’euros supplémentaires sont consacrés à la forêt, afin que les travaux préalables à la reforestation entrent dans le champ des actions subventionnées, compte tenu des coûts parfois très élevés induits par de telles opérations à vocation environnementale. Nous comptons sur vous, madame la secrétaire d’État, pour vous en faire l’écho auprès du ministre chargé des comptes publics, afin que, concrètement, la réglementation qui ne relève pas de la loi évolue dans le sens souhaité par les parlementaires. Vous nous trouverez toujours disponibles pour vous y aider.

D’autre part, et comme le demandait le président Claude Raynal, 50 millions d’euros supplémentaires sont affectés aux opérations d’investissement des AOM, les autorités organisatrices de la mobilité.

Enfin, la commission mixte paritaire a adopté deux mesures tendant à mieux contrôler l’usage des crédits ouverts dans le cadre du PLFR. Cela concerne les crédits ouverts pour abonder le compte d’affection spéciale « Participations financières de l’État », ainsi que l’enveloppe exceptionnellement élevée de la dotation pour « dépenses accidentelles et imprévisibles », à hauteur de 1, 5 milliard d’euros.

Je profite de ces quelques instants pour vous rappeler, madame la secrétaire d’État, qu’une solution doit être trouvée pour aider les entreprises créées en 2020 et qui, faute de chiffre d’affaires déclaré, n’ont pu obtenir aucun soutien de l’État. De même, le décret d’application doit permettre de faire entrer dans le dispositif de l’article 10 les quelques régies nouvellement créées et qui n’ont pas de perte d’épargne brute à déclarer. C’est parfois le cas dans certaines intercommunalités.

Bien sûr, mes chers collègues, des regrets subsistent pour n’avoir pas su convaincre du bien-fondé de certaines mesures, comme celles qui visent à soutenir l’investissement dans la transition énergétique des entreprises. En tout état de cause, le PLFR se trouve indubitablement enrichi à la suite de son examen par le Parlement, notamment par le Sénat.

Une fois l’activité repartie, il faudra mettre fin à l’économie « sous perfusion » des aides de l’État. Dès à présent, il faut aussi regarder vers l’avenir et déterminer une stratégie de redressement de nos finances publiques. À ce titre, notre inquiétude grandit, mais j’aurai l’occasion d’en reparler dès jeudi dans cet hémicycle, à l’occasion de l’examen du projet de loi de règlement pour 2020 et, surtout, du débat d’orientation des finances publiques, préparatoire au PLF pour 2022.

Pour l’heure, je vous invite à voter les conclusions de la CMP, s’agissant d’un texte nécessaire pour accompagner une sortie de crise, que nous espérons tous définitivement derrière nous.

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