Je comprends mieux la question de Mme Cohen. Madame la sénatrice Vérien, vous avez parfaitement raison, il existe une trentaine d'établissements qui proposent ce dispositif. Nous souhaitons le généraliser. Il faut tout de même que la victime soit présente. On essaiera d'objectiver ses dires, qui ne seront pas recueillis dans le cadre d'une plainte. L'intérêt que présente cette expertise est qu'un certain nombre de conseils pourront lui être prodigués.
Au Cateau-Cambrésis, la femme est d'abord reçue par les médecins, prise en charge par un psychologue, puis par un assistant social - vous avez souligné les conséquences économiques sur la femme et ses enfants en cas de plainte - avant que les gendarmes arrivent, puis le procureur général et même un avocat. Tout cela se passe dans le même lieu, en prenant toutes les précautions inhérentes au secret professionnel. Je souhaite encourager cette initiative, ce partenariat mis en place par un jeune médecin.
Nous essayons de généraliser les solutions de ce type. Pour l'instant, trente établissements les ont mises en place. Nous aimerions qu'ils le fassent tous, évidemment.
Vous avez déploré qu'il n'y ait pas d'ordonnance de protection sans audition du conjoint. Oui, mais l'ordonnance de protection doit être rendue dans un délai de six jours. Il est compliqué de prendre une mesure de coercition sans avoir entendu tous les protagonistes. Vous ne pouvez pas exclure que si 99 % des plaintes correspondent à la réalité, 1 % des autres n'y correspondent pas. Nous n'allons pas exclure un homme de son domicile sans l'avoir entendu. Il suffirait alors de porter plainte pour le mettre à la porte. Ce risque existe. C'est l'essence même de la justice de respecter le contradictoire.
Le délai de six jours a été retenu en expertise avec le judiciaire de terrain. Je vois difficilement comment nous pourrions le raccourcir. Si nous le demandons, il nous sera répondu que les moyens manquent.
Je précise tout de même, sans persifler, que certains parlementaires n'ont pas voté le budget l'année dernière, en nous disant qu'il n'était pas suffisamment ambitieux. En cours d'année, on nous dit qu'il n'y a pas suffisamment de moyens, pourtant en augmentation historique de 8 %. Le budget a augmenté de 21 % depuis le début de la mandature. En matière civile comme pénale, nous avons envoyé beaucoup de gens en juridiction. Cela aide, en particulier dans le traitement des violences faites aux femmes.
Sur l'aspect des violences psychologiques, j'entends vos propos, qui rejoignent d'ailleurs ma réflexion sur les enfants. Souvent, ils sont victimes de ces violences lorsqu'ils voient leur père battre leur mère. C'est à mes yeux une violence intrinsèque qui est infligée. Je souhaite réfléchir à ces questions pour voir comment leur donner corps.
Par ailleurs, j'ai demandé au parquet, par une circulaire du mois d'août, de saisir toutes les armes dans les cas de violences conjugales. Nous travaillons avec le ministre de l'intérieur pour disposer d'un fichier visant à restreindre de façon drastique, pour ne pas dire interdire, l'accès aux armes pour les conjoints violents. Le vecteur législatif sera celui qui traitera de la responsabilité pénale, sur la base des travaux que j'ai été amené à conduire dans l'affaire « Halimi ». Nous allons élargir ce texte pour y mettre un certain nombre de dispositions, dont celle qui vous préoccupe. Nous devons être très efficaces là-dessus, pour ne plus laisser d'armes traîner.
Enfin, il est absolument inexact de dire que le ministère de la justice prévoit une limitation de la durée des conversations téléphoniques sur le numéro vert destiné aux victimes, sous peine de pénalités financières. France Victimes, que j'ai reçue récemment, m'a fait part d'un certain nombre de difficultés. Cet appel vise à orienter les victimes. Une femme venant de se faire violer ne s'entendra pas dire « appelez tel numéro, au revoir madame », surtout si elle est en pleurs et si elle peine à raconter son histoire. Aucune disposition de l'appel d'offres ne prévoit de limitation de la durée de l'appel. Nous nous référons à la durée moyenne, ce qui autorise les appels dépassant six ou neuf minutes. J'ai lu un certain nombre de choses inexactes. Je serai très attentif à la bonne prise en charge des victimes. C'est le b.a.-ba. C'est le premier contact téléphonique. Certaines personnes ont besoin de contextualiser ou d'autre rassurées. J'ai lu dans la presse que France Victimes indiquait que le ministre avait été très attentif à ses propos. Humainement, nous ne pouvons laisser croire - et encore moins faire en sorte - que les victimes ne sont pas prises en charge correctement lors de cet appel. Nous y travaillons.