Un rapport remis à la suite du féminicide de Mérignac comportait un certain nombre de recommandations. Vous en avez cité quelques-unes. Certaines n'ont pas été reprises. Pourquoi ? Que comptez-vous faire pour que les victimes soient informées à chaque stade de la procédure, notamment aux moments pouvant être source de danger pour elles ? Je pense notamment à la remise en liberté sous contrôle judiciaire de l'agresseur présumé ou à la sortie de détention de l'auteur de violences. Deux autres mesures m'interpellent, et n'ont pas été reprises. Je pense d'abord à la fusion des grilles d'évaluation du danger avec la grille d'évaluation des victimes des ministères de la justice et de l'intérieur. Pourquoi ne peuvent-elles pas être fusionnées ? Cela éviterait peut-être une surcharge administrative et, parfois, des difficultés d'évaluation du danger pourraient être écartées. Le conditionnement par voie législative de tout aménagement de peine concernant les auteurs de violences conjugales graves à la réalisation d'une expertise psychiatrique ou médico-psychologique préalable n'a pas été repris, lui non plus.
Vous avez indiqué qu'il vous serait répondu que le budget était insuffisant. Plus tôt, vous avez évoqué un effort complémentaire au budget. Il est vrai que la lutte contre les violences faites aux femmes est une grande cause du quinquennat. J'attire votre attention sur le fait que des procureurs ont, il y a quelques semaines, tiré la sonnette d'alarme sur la difficulté à appliquer l'ensemble des circulaires et dispositifs prévus par la loi pour lutter contre les violences sexistes et sexuelles. Pouvez-vous nous en dire davantage sur les efforts supplémentaires prévus sur le sujet ?
Je profite de votre venue pour vous exposer un exemple local illustrant à mon sens les impasses judiciaires dans lesquelles se trouvent parfois les femmes victimes de violences. Il s'agit du cas d'une femme bénéficiant d'une ordonnance de protection à l'encontre de son conjoint, m'ayant amenée à me poser quelques questions. D'une part, sur le fonctionnement même des ordonnances de protection. Celles-ci interdisent les interactions, mais n'empêchent pas le conjoint violent de se trouver à proximité ou de venir parler aux enfants, alors même qu'il n'a plus l'autorité parentale. Dans les faits, elles ne suffisent donc pas à mettre la mère en sécurité. Quelle évolution du système judiciaire pourrions-nous envisager pour que les injonctions d'éloignement soient privilégiées en lieu et place des ordonnances de protection ? D'autre part, dans ce cas précis, l'individu a enfreint l'ordonnance de protection. La femme a porté plainte. Malgré un contexte chargé, avec un individu connu des services de la justice et condamné à de la prison ferme pour des faits de violence conjugale moins de deux ans auparavant, ce dernier n'a eu qu'un simple rappel à la loi. C'est donc la victime qui subit le poids de l'angoisse. Notre impuissance collective devant cette situation est difficile. Selon vous, que faudrait-il faire évoluer pour apporter des solutions aux femmes, trop nombreuses, vivant des situations similaires ?
Je ne peux pas terminer sans évoquer la loi contre le système prostitutionnel. Je me souviens de la difficulté à la faire voter, à mes débuts au Sénat. Elle n'y a d'ailleurs pas été votée en l'état. Vous avez engagé une réflexion au sein de votre ministère suite à la publication d'un rapport établi en 2019. Je rejoins celles qui se sont exprimées avant moi, la pénalisation du client a fait débat. Comment faire en sorte que cette loi soit appliquée ?