Intervention de Catherine Deroche

Réunion du 15 juillet 2021 à 14h45
Orientation des finances publiques et règlement du budget et approbation des comptes de 2020 — Débat et rejet d'un projet de loi

Photo de Catherine DerocheCatherine Deroche :

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, c’est devenu un lieu commun que de dire que la crise sanitaire a agi comme un révélateur de nos failles et de nos fragilités.

S’il est un domaine où cet effet de loupe a été spectaculaire, c’est bien celui des finances sociales.

La construction de notre protection sociale a certes donné une large place aux partenaires sociaux, même si l’État n’était jamais très loin. Or cette place s’est érodée au fil du temps, pour deux raisons principales.

D’une part, le financement de la protection sociale fait désormais une très large place à l’impôt : au total, 55 % des prélèvements obligatoires sont affectés à la sphère sociale dans notre pays.

D’autre part, la sécurité sociale n’est plus le lieu des seules assurances sociales, elle est le bras armé de l’intervention de l’État dans le domaine social.

Monsieur le ministre, face à ce constat, nous avons un désaccord de fond sur ce que doit être l’intervention du Parlement.

Si le Parlement s’est un temps effacé au profit de la démocratie sociale, ce ne sont pas les partenaires sociaux qui occupent cet espace, c’est bien le Gouvernement, laissé libre d’agir à sa guise dès lors que la sécurité sociale finance ses interventions.

Ainsi, en 2021 pas plus qu’en 2020, nous n’aurons de projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale. §Entre l’effondrement des recettes, l’insuffisance de la provision pour les tests comme pour les vaccins et les nouvelles mesures du Ségur, ce ne sont pourtant pas les motifs qui manquaient.

Si nous pouvons juger ce texte politiquement nécessaire, il n’est pas juridiquement imposé : c’est ce que vous nous avez rappelé, monsieur le ministre, tout en vantant la souplesse de cet outil. Nous en avons conclu quant à nous que l’obligation juridique était désormais nécessaire et nous nous efforcerons d’y parvenir.

Face à plus de 30 milliards d’euros de déficit de l’assurance maladie, quelle stratégie privilégier à l’avenir ? Je doute que notre débat d’aujourd’hui permette de répondre à cette question. Pas plus que d’un projet de loi de financement de la sécurité sociale rectificative, nous ne disposons d’une trajectoire des finances publiques révisée. De surcroît, les mesures du Ségur de la santé, prises dans l’urgence pour éteindre l’incendie de l’hôpital, puis du médico-social, ne dessinent pas les contours d’une stratégie claire ni même de priorités, qu’il s’agisse de l’attractivité des métiers, de l’accompagnement des carrières, de l’évolution des statuts ou encore des organisations.

Si la crise a révélé les vulnérabilités des services de réanimation, on peinerait ainsi à trouver dans le Ségur les éléments d’un changement structurel.

Au sujet des retraites, les objectifs sont plus clairs. S’ils avaient été formulés en ces termes et non sous la forme d’une grande réforme cérébrale censée in fine ne rien changer pour personne tout en étant plus juste pour tous, nous aurions certainement progressé collectivement.

Il est par ailleurs évident que les partenaires sociaux ne pourront seuls faire leur affaire de la dette accumulée par le régime de l’assurance chômage. Elle est hors de portée, même si un retour rapide à meilleure fortune s’annonçait sous l’effet d’une forte croissance. Là aussi, l’État devra intervenir et nous serions curieux de savoir sous quelle forme.

Bien sûr, il est encore trop tôt pour prendre les mesures correctrices nécessaires à une amélioration des comptes sociaux. En revanche, il est grand temps d’y réfléchir et, à tout le moins, de les esquisser.

C’est en principe l’objectif assigné au débat d’orientation des finances publiques. Ces dernières ne pourront plus très longtemps être gérées au fil de l’eau, sans cap clair dûment approuvé par le Parlement, dont c’est – faut-il le rappeler ? – la mission fondatrice !

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