Quoi qu’il en soit, je regrette de n’avoir pu m’exprimer plus tôt, c’est-à-dire à la fin du débat commun.
Les orateurs qui sont intervenus ont pris la peine d’exposer leurs arguments, qu’il s’agisse du projet de loi de règlement ou du débat d’orientation des finances publiques pour l’année 2022. Dans ces conditions, je ne peux pas leur répondre point par point, ce dont je les prie de m’excuser. Je me contenterai de deux remarques générales.
Tout d’abord, je tiens à revenir sur les interrogations, légitimes, et sur les reproches qu’ont inspirés les reports de crédits prévus dans le projet de loi de règlement.
Monsieur le président de la commission des finances, dans sa rédaction actuelle, la LOLF autorise le Gouvernement à procéder à des reports dans la limite de 3 % de chaque programme. Certes, le report global n’est pas plafonné, mais la dérogation à la règle des 3 % est soumise à l’accord du Parlement, lequel nous a été donné au cours de la navette. Je sais que ce choix n’était pas nécessairement celui des deux assemblées, mais les procédures sont ainsi faites et le Gouvernement a reçu l’autorisation de procéder à ce report.
Nous avions prévu l’inscription de plusieurs dizaines de milliards d’euros au titre du PLFR 4 pour faire face aux conséquences de la crise sanitaire. À ce titre – j’ai déjà eu l’occasion de le dire devant vous –, nous avions retenu l’hypothèse du pire, car telle était notre responsabilité : nous avons imaginé la possibilité d’un confinement couvrant les mois de novembre et de décembre 2020, assorti d’une perte d’activité de 20 %.
En réalité, le confinement n’a duré que jusqu’au 15 décembre, date à laquelle il a été remplacé par un couvre-feu. Quant à la perte d’activité, elle a été de 11 % au mois de novembre et de 6 % à 7 % au mois de décembre.
C’est cette situation, moins dégradée que prévu, qui a conduit à une sous-consommation des crédits d’urgence que nous vous avons proposé d’inscrire au budget. Reportés sur le début de l’année 2021, ces fonds nous ont permis de financer à un niveau plus élevé que prévu les mesures d’urgence imposées par la poursuite de la crise.
Aussi, je réfute le reproche d’insincérité de notre construction budgétaire : ces chiffres reflètent notre prudence et je l’assume. Je le répète devant vous : je préfère mille fois cette situation un peu inconfortable – j’en conviens volontiers – de reports massifs, y compris de reports croisés, au risque d’être confronté à une absence de crédits pour financer les mesures d’urgence, au moment où la crise était à son paroxysme.
Ensuite, je tiens à revenir sur les orientations budgétaires pour l’année 2022, lesquelles sont désormais connues : nous sommes sur la voie de la normalisation.
Le moins que l’on puisse dire, c’est que l’on ne peut parler d’austérité, comme j’ai pu l’entendre parfois, lorsque la dépense des ministères doit croître de 10, 8 milliards d’euros.
Certains orateurs, notamment Rémi Féraud, ont évoqué le financement de la sécurité sociale : les niveaux d’objectif national des dépenses d’assurance maladie (Ondam) hors crise et hors Ségur sont systématiquement supérieurs à 2, 4 % par an. Ces volumes sont près d’une fois et demie supérieurs à ce que l’on connaissait au cours des années précédentes.
Cette construction budgétaire est caractérisée à la fois par une forme d’incertitude liée à l’épidémie, par une forme de confiance liée à la reprise économique et par une forme de liberté : d’une part, la politique monétaire de la Banque centrale européenne (BCE) nous permet de mener les financements dans de bonnes conditions, d’autre part, la Commission européenne a prolongé la période de suspension de l’application d’un certain nombre de clauses des traités européens, ce qui nous renvoie d’ailleurs à notre propre responsabilité – c’est un point important à noter. Or notre responsabilité, c’est d’organiser le retour progressif vers une situation budgétaire normale, c’est-à-dire tout à fait soutenable.
Il nous reste désormais à travailler sur la question des recettes et sur l’articulation des plafonds que nous vous avons transmis avec l’ensemble des ressources. Nous devons préparer l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale. Évidemment, nous devons nous pencher sur les questions fiscales, afin que le budget soit le plus équilibré possible et nous devrons procéder en ayant en tête le débat organique évoqué à plusieurs reprises.
Cette réforme de la LOLF aura pour base les propositions de loi que l’Assemblée nationale examinera lundi prochain et celles que votre assemblée a pensées pour les enrichir. Par exemple – il s’agit là d’une seconde réponse au président de la commission des finances –, nous pourrons mener un exercice commun au programme de stabilité et au débat d’orientation des finances publiques. En soi, il peut être intéressant d’examiner conjointement la trajectoire pluriannuelle et les perspectives pour 2022.
Enfin, madame Lavarde, vous nous avez reproché de ne pas avoir transmis de chiffres assez précis au sujet du schéma d’emploi. Je vous confirme la stabilité observée en la matière. Lorsque nous créons des emplois dans un certain nombre de secteurs, comme nous nous y sommes engagés, nous appliquons la règle du non-remplacement, qui implique de prélever dans d’autres secteurs pour atteindre l’équilibre et assurer cette stabilité à l’échelle du quinquennat.
Évidemment, je prends acte des votes du Sénat : selon toute probabilité, l’article 8 connaîtra le même sort que les précédents. Comme d’autres l’ont fait avant moi, je vous donne rendez-vous cet automne, pour l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale et du projet de loi de finances !