Intervention de Ronan Dantec

Réunion du 20 juillet 2021 à 15h00
Lutte contre le dérèglement climatique — Adoption des conclusions modifiées d'une commission mixte paritaire sur un projet de loi

Photo de Ronan DantecRonan Dantec :

… et leur dire que leur travail n’a pas été inutile, même s’ils en doutent eux-mêmes parfois, et qu’ils ont montré la voie pour une prochaine loi Climat, qui ne saurait tarder !

En effet, la loi que nous nous apprêtons à adopter ne répond pas, nous le savons tous, aux enjeux quantitatifs de réduction d’émissions de CO2 qu’exige la communauté scientifique.

Lundi dernier, sénatrices, sénateurs, députées et députés ont donc trouvé un accord en commission mixte paritaire. Il s’agit généralement d’une bonne chose, car cela permet de préserver une partie du travail d’amélioration des textes, ce qui est l’un des objets du bicamérisme et de la navette parlementaire. À cet égard, je salue les rapporteurs pour leur important travail, dans un temps très court. Ils n’ont pas ménagé leurs efforts et sont restés attentifs aux propositions des différents groupes du Sénat ; qu’ils en soient remerciés.

Toutefois, ce travail parlementaire montre que la recherche de compromis nous amène à des mesures a minima, quantitativement totalement insuffisantes.

Or justement, de manière quasi unanime, le Sénat avait tenu à inscrire dans le premier article de ce texte, qui a survécu à la commission mixte paritaire, le respect de l’objectif européen de réduction de 55 % des émissions de gaz à effet de serre d’ici à 2030 et sa déclinaison française.

Nous connaissons depuis quelques jours la proposition de la Commission européenne pour la France : une diminution de 47, 5 % de nos émissions d’ici à 2030. Si l’on suit l’avis des experts, ce texte nous amène vers une baisse de 30 % à 35 % des émissions en 2030. Il nous faudra donc, dans les toutes prochaines années, rehausser fortement notre ambition et voter de nouvelles mesures à fort impact carbone. Nous aurons alors, sans nul doute, à nous replonger dans les propositions de la Convention citoyenne.

Certains ont pu trouver, à commencer par le Gouvernement – mais reconnaissons que la majorité sénatoriale n’était pas très loin derrière –, que ces mêmes propositions étaient parfois trop ambitieuses et que la France n’était pas prête. In fine, le Gouvernement a décidé de ne pas respecter la parole présidentielle de présenter au Parlement, sans filtre, les propositions de la Convention.

En définitive, lesdites propositions étaient assez modérées au regard de certaines des mesures proposées aujourd’hui par la Commission européenne, comme la fin des véhicules thermiques en 2035 ou l’objectif de production de 40 % d’énergie dès 2030 à partir de sources renouvelables, dont l’énergie nucléaire, chère Sophie Primas, ne fait pas partie…

Ainsi, nous allons voter une loi assez largement périmée et obsolète par rapport aux discussions européennes actuelles. Nous devons déjà nous préparer, par exemple en 2023, lors de la révision de la programmation pluriannuelle de l’énergie, la PPE, à adopter un autre texte, « raccord » avec le cadre européen. Le débat ne fait donc que s’ouvrir.

Je n’ai pas le temps, en quelques secondes, de rappeler les avancées et, surtout, les reculs de ce texte. S’agissant des collectivités territoriales, nous avions voté, à la quasi-unanimité, une dotation climat. Il s’agissait d’un signal fort pour la mobilisation des collectivités et la mise en œuvre des schémas régionaux d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires, les Sraddet, et des plans climat-air-énergie territoriaux, les PCAET. Malheureusement, et ce n’est pas la première fois, le Gouvernement n’a pas souhaité retenir cette proposition.

Quelques satisfactions néanmoins : nous avons préservé les recettes de la taxe Chirac sur les billets d’avion – soit 400 millions d’euros par an pour la lutte contre le Sida et pour l’agence de financement des infrastructures de transport de France, l’Afitf – et l’interdiction des engrais azotés hors des terres agricoles.

Mes chers collègues, depuis que nous avons amorcé nos débats, le village de Lytton, au Canada, qui avait enregistré un record absolu de chaleur avec 49, 6 degrés Celsius, a brûlé à 90 %. En Allemagne, c’est par centaines que se comptent les victimes et par milliards les dégâts.

Nous nous devions donc de crédibiliser, par nos propres mesures, l’engagement européen, seul levier susceptible d’entraîner, avant la COP de Glasgow, une dynamique pour un effort mondial équitablement réparti et à la hauteur de l’enjeu.

Cette loi ne répond pas à cette urgence, raison pour laquelle le groupe écologiste n’a d’autre choix que de voter contre les conclusions de cette commission mixte paritaire.

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