Intervention de Nicole Bricq

Réunion du 17 février 2011 à 9h00
Coordination des politiques économiques au sein de l'union européenne — Rejet d'une proposition de résolution

Photo de Nicole BricqNicole Bricq :

Croire que l’on pourra se sortir d’une telle crise en resserrant une discipline budgétaire privilégiée sur tout le reste et en revenant à l’équilibre à marche forcée ne fera que réduire la croissance déjà très molle. Surtout, ce n’est pas avec une telle stratégie qu’on préviendra la prochaine crise !

Certes, la Grèce doit réduire son déficit, mais il lui faut du temps. Et ce temps, les marchés le lui refusent.

Au Portugal, le rendement de la dette a atteint des niveaux inégalés et la prime réclamée par les investisseurs pour détenir le papier portugais ne cesse d’augmenter par rapport au Bund allemand.

Pourquoi refuse-t-on de discuter au fond de la proposition Juncker de mutualisation de la dette au niveau européen ? Cet attentisme, qui est mortifère, donne au marché une avance préjudiciable.

Pourquoi ne pose-t-on pas comme objectif de faire de l’Union une zone de croissance durable alors qu’on remet au goût du jour la notion de gouvernement économique ? L’appellation est, au demeurant, bien trompeuse quand on sait qu’il s’agit, d’abord, de coordination budgétaire, de retour en un temps record au pacte de stabilité et, ensuite, d’avancer vers un « pacte de compétitivité » qui propose, par exemple, d’harmoniser l’âge de départ à la retraite, ce qui ne répond absolument pas au problème posé, quand on veut, de surcroît, imposer une règle d’or d’interdiction des déficits publics. Toute règle, fût-elle inscrite dans le marbre constitutionnel, ne tient pas face à des situations exceptionnelles, comme nous l’avons vu, y compris en Allemagne !

Le « paquet gouvernance » qui est avancé présente le risque réel d’occulter les vrais sujets – l’harmonisation fiscale, la croissance, l’innovation, la recherche, l’emploi.

S’agissant de la convergence tant recherchée avec l’Allemagne, il faudrait avant tout se poser la question de savoir s’il existe un « modèle » allemand durable, quand l’économie de ce pays tire essentiellement sa force du marché intérieur. La meilleure phrase que j’ai trouvée est celle de l’économiste allemand Peter Bofinger, très écouté en Allemagne. Il disait tout dernièrement que « le modèle allemand de l’économie compétitive tournée vers l’exportation n’a fonctionné que parce que les autres nations ne l’ont pas adopté ».

Si gouvernement économique il doit y avoir, c’est celui qui présidera à un choix de relance économique européenne.

Le désendettement des États et la réduction des déficits sont, certes, une ardente obligation. Mais que pèseraient-ils sans un dispositif de convergence des politiques économiques ?

Mme Merkel a raison de déclarer que l’euro relève d’un projet politique. Encore faut-il définir lequel ! Cette question doit faire l’objet d’un débat dans notre pays et ne pas être mise sous le tapis, comme c’est le cas depuis 2005. Il s’agit en effet d’un enjeu démocratique, en France et en Europe.

Nous aurons certainement l’occasion de revenir sur ce point tout au long des mois qui nous séparent de l’échéance majeure de l’élection présidentielle. Je souhaite que ce débat ait lieu, pour la démocratie et pour l’Europe.

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