Intervention de Pierre Lellouche

Réunion du 17 février 2011 à 9h00
Coordination des politiques économiques au sein de l'union européenne — Rejet d'une proposition de résolution

Pierre Lellouche, secrétaire d’État :

Face à cette divergence entre la réalité économique et la perception des marchés, nous avons tous un devoir de fermeté absolue pour réaffirmer notre détermination à défendre la stabilité de la zone euro, notre solidarité avec les États membres les plus vulnérables et notre engagement intangible vers la consolidation budgétaire. En effet, le défaut n’est pas une option, tout simplement parce qu’il n’est pas une solution.

Le Président de la République a déclaré à Davos, il y a quelques semaines : « Je peux vous assurer que, aussi bien Mme Merkel que moi-même, jamais, vous m’entendez jamais, nous ne laisserons tomber l’euro. Jamais ».

Je vais maintenant répondre point par point aux questions que vous avez soulevées.

Premièrement, vous indiquez que « la situation économique et sociale de l’Europe ainsi que les mesures prises ou envisagées contreviennent manifestement » aux « engagements des États européens dans les traités convenus entre eux et les actes pris pour leur application dans les domaines économique, social, financier et monétaire ».

Je ne comprends pas très bien cette affirmation. La crise de 2007-2008, importée des États-Unis, s’impose à nous : c’est une réalité ! Je ne vois pas en quoi elle serait contraire aux traités, avec lesquels elle n’a pas grand rapport ; elle a à voir avec la réalité économique du monde.

Nous devons plutôt nous demander, monsieur Collin, si l’Europe s’en est plutôt mieux sortie grâce à la construction européenne, ou non. Le précédent de la crise de 1929, caractérisé par l’éparpillement des ripostes nationales à la crise, montre bien que l’Europe a agi comme un écran de protection pour l’ensemble de nos sociétés.

Grâce à l’Europe, depuis le début de la crise économique et financière survenue il y a trois ans, nos États – et notamment la France, qui était chargée de la présidence de l’Union européenne ! – ont pris, ensemble, des mesures qui nous ont permis d’en limiter les effets sur nos économies, et donc sur la vie de nos concitoyens. En outre, la France a œuvré avec force pour que la réponse mondiale soit coordonnée dans le cadre d’une institution nouvelle, le G20, qui regroupe les grandes puissances établies et émergentes. Je trouve donc votre critique excessive.

Deuxièmement, vous insistez, à juste titre, sur la nécessité de respecter les processus démocratiques. Le vieux parlementaire que je suis ne peut que vous approuver. Cette exigence, loin d’être remise en cause, me semble pourtant largement mise en œuvre.

M. Badré, grand partisan de l’Europe, sait bien que le traité de Lisbonne a largement contribué à une prise de décision plus démocratique dans l’Union européenne ; M. Bel, lui-même, a évoqué les pouvoirs des parlementaires européens.

Tout d’abord, le rôle du Parlement européen, institution élue au suffrage universel direct, a été considérablement renforcé – certains d’ailleurs le déplorent, à l’instar de M. Chevènement ! –, notamment par l’extension de la procédure de codécision législative, qui donne au Parlement des pouvoirs législatifs comparables à ceux du Conseil des ministres, à près de cinquante nouveaux domaines. Par ailleurs, la participation directe des citoyens a été rendue possible par l’introduction dans le droit communautaire d’un droit d’initiative citoyenne. Celui-ci permet à un million de citoyens provenant d’un nombre significatif d’États membres de demander à la Commission de proposer un projet de texte législatif.

Les parlements nationaux sont également de plus en plus impliqués : le Parlement est déjà systématiquement saisi des projets de directives et de règlements européens, mais nous sommes allés encore plus loin.

J’attire votre attention sur une réforme fondamentale qui a été évoquée, à plusieurs reprises, par des orateurs de toutes sensibilités : le « semestre européen ». Le principe est d’informer les parlements en amont des envois à Bruxelles des documents relatifs à la gouvernance économique de l’Union européenne et de la zone euro.

Je précise, pour Mme Bricq, que le conseil pour les affaires économiques et financières, dit conseil ECOFIN, procède ensuite à l’examen des textes. L’ensemble de la procédure se déroule entre les mois d’avril et de juin ou juillet. Ces textes reviennent ensuite au niveau des États et font l’objet d’un vote des Parlements nationaux dans le cadre du projet de loi de finances. Ce vote intervient donc après la consultation en amont et l’examen des textes par les instances communautaires et le Conseil.

La loi de programmation pluriannuelle des finances publiques pour la période 2011à 2014 prévoit ainsi que le projet de programme de stabilité sera adressé au Parlement au moins deux semaines avant sa transmission à la Commission européenne, afin que le Sénat et l’Assemblée nationale puissent porter un regard conjoint sur la coordination des politiques européennes. Le principe est également de permettre une meilleure prise en compte des préconisations européennes, dans le strict respect des compétences de nos parlements respectifs, dans les grands choix de politique économique et budgétaire des États membres, et une meilleure articulation de la surveillance budgétaire avec celle des politiques de croissance, dans le cadre de la stratégie Europe 2020.

Je voudrais également souligner le fait que le plan d’assistance à la Grèce – et je m’en souviens très bien, c’était il y a exactement un an –, de même que la création du Fonds européen de stabilité financière ont été discutés et votés ici même comme à l’Assemblée nationale. Permettez-moi de vous rappeler que c’est le 6 mai 2010, alors que nous célébrions en France le 60e anniversaire de la Déclaration de Robert Schuman du 9 mai 1950, qu’a été voté, à la quasi-unanimité des deux chambres, le plan d’assistance à la Grèce.

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