Intervention de Raymonde Poncet Monge

Réunion du 20 juillet 2021 à 15h00
Renforcement de la prévention en santé au travail — Adoption des conclusions modifiées d'une commission mixte paritaire sur une proposition de loi

Photo de Raymonde Poncet MongeRaymonde Poncet Monge :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, lors de l’examen du texte en première lecture, nous avions regretté une occasion manquée de présenter un texte pour renforcer la prévention en santé au travail ambitieux, plutôt qu’une transcription incomplète de l’accord national interprofessionnel de 2020, qui n’en respecte même pas tous les équilibres, au détriment des salariés.

Non seulement le texte n’est pas à la hauteur des enjeux, mais il poursuit la démédicalisation de la santé au travail. Il ne revient pas sur la dégradation des services de santé au travail issue des réformes antérieures, et, par certains de ses dispositifs, l’aggrave, comme il n’écarte pas le risque d’échappement de la responsabilité personnelle de l’employeur quant à ses obligations en termes de santé et de sécurité.

Pendant les débats, les écologistes ont porté une autre vision du travail et de la santé au travail. En intimant au Parlement de se contraindre au respect de l’accord interprofessionnel signé par quatre syndicats, la majorité présidentielle a dénié à l’État et au Parlement leur responsabilité propre quant à la santé au travail.

Beaucoup de nos propositions ont été rejetées, y compris celles qui avaient été coconstruites avec les professionnels et les syndicats, dont certains avaient pourtant signé l’ANI. Le résultat est encore aggravé au sortir de la commission mixte paritaire.

Nous avions rappelé que la santé et la sécurité des salariés n’étaient pas optionnelles, mais le texte prévoit une offre socle et complémentaire au sein des services de santé au travail, lesquels ne disposent pourtant déjà pas de suffisamment de temps médical.

Nous avions réaffirmé la responsabilité personnelle de l’employeur en matière de santé et de sécurité, car, si le pouvoir d’organisation n’est pas partagé, alors la responsabilité ne saurait l’être ; or le texte consacre des dispositifs qui la relativisent.

Nous voulions mettre en lumière les risques psychosociaux, deuxième cause d’arrêts de travail en mai 2020, mais le texte ne saisit pas l’occasion d’en faire progresser la prise en compte.

Nous avions défendu les droits des salariés et de leurs instances, notamment en demandant l’intégration de l’avis du comité social et économique (CSE) dans le DUERP, ainsi que la protection des données personnelles de santé ; or le texte confirme l’accès au dossier médical partagé pour les professionnels des SPST et balaye le renforcement du consentement du salarié, pourtant adopté en commission au Sénat.

Nous avions combattu les dispositifs qui actent l’effacement des médecins du travail et déprécient leur spécialité. Ainsi, le texte prévoit le recours à des médecins de ville correspondants pour le suivi des salariés. Nous souhaitons à ce propos souligner un élément très grave : la commission mixte paritaire a rétabli la possibilité offerte au médecin du travail de déléguer l’animation et la coordination de l’équipe pluridisciplinaire, qui avait été supprimée en commission au Sénat.

Enfin, nous avions proposé de donner le grade de master au diplôme d’infirmier de santé au travail, ainsi que d’offrir à cet infirmier le statut de salarié protégé. Le texte que nous examinons aujourd’hui recule dans ce domaine : la mention d’une formation universitaire spécifique en a même été supprimée.

Maigre consolation dans cet exercice décidément préoccupant pour quiconque est attaché à la santé au travail, la disposition issue du seul amendement que nous avions pu faire adopter par la commission des affaires sociales de notre assemblée, à savoir le remplacement dans le code du travail de l’expression « qualité de vie au travail » par les termes « qualité de vie et des conditions de travail », a été maintenue.

Pour toutes ces raisons, comme vous l’aurez compris, les écologistes voteront contre les conclusions de cette commission mixte paritaire, en réaffirmant la nécessité d’une réforme ambitieuse de la santé au travail.

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