Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, nous achevons quinze jours d’examen d’un projet de loi dont les débats furent finalement plus engagés qu’attendu, même s’ils furent toutefois sous-tendus par la fatigue du marathon législatif particulièrement intense que nous avons subi cette année. À cela s’ajoute l’amer constat, quasi unanimement souligné lors de la discussion générale, de voir combien ce texte, en arrivant sur nos pupitres, nous a paru éloigné de son ambition initiale et des fortes attentes qu’il suscitait de la part des collectivités, d’autant que son examen a suivi de quelques jours un scrutin marqué par une abstention record et préoccupante.
Face à cet horizon encombré, le Sénat a toutefois su faire remonter toute la profondeur des problématiques locales. Nos échanges ont traduit combien la vie de nos territoires était riche et montré que s’y jouaient des questions majeures de la vie de notre nation. Je pense, par exemple, à nos discussions autour de l’article 17 et de l’application de la loi SRU.
Certains ont fait part de leur crainte que ce projet de loi ne dénature l’esprit initial de la loi au motif de davantage de souplesse. D’autres ont pu souligner, au contraire, qu’à défaut de souplesse, les objectifs de la loi SRU ne seraient jamais atteints, car parfois irréalisables. Néanmoins, au-delà des positions soutenues, nous nous accordons à regretter qu’un tel sujet n’ait pas fait l’objet d’une discussion à part entière, au lieu de le traiter entre le transfert des compétences « voiries » et la réforme de la gouvernance des ARS.
Au cours des débats, certaines mesures adoptées ont révélé des clivages profonds mettant en lumière, là aussi, toute l’importance de la vie politique locale. Ce fut le cas, par exemple, de la disposition adoptée en commission des lois qui permet au département de décider de priver du RSA les personnes disposant d’une épargne trop importante. Une majorité des membres du RDSE doutent que cette mesure soit la plus à même de lutter efficacement contre les abus de notre système de solidarité.
Nonobstant ces premières considérations, je veux saluer le travail du Sénat, à commencer par celui de nos rapporteurs. Notre assemblée a su non seulement s’approprier pleinement un texte au sujet duquel nous avions d’abord fait part de notre déception, mais aussi garder sa cohérence. C’est le cas de la réintroduction d’un droit à l’erreur pour les collectivités locales, qui, hélas ! peine toujours à vous convaincre, madame la ministre.
Le groupe du RDSE tient également à saluer la transposition, dans ce texte, de la proposition de loi visant à moderniser et faciliter la procédure d’expropriation de biens en état d’abandon manifeste, largement adoptée au Sénat le 14 avril dernier, avec un avis favorable du Gouvernement. Ces dispositions devraient permettre de mieux soutenir la revitalisation de nos communes face au problème croissant de la sous-optimisation des biens immobiliers et des terrains abandonnés par leurs propriétaires.
Malgré tout, je crains que nous n’ayons pas pleinement su rattraper les défauts et les insuffisances initialement constatés dans le volet de la différenciation, et cela malgré les améliorations apportées au cours de cet examen. La question de la portée réelle de ce principe se pose toujours, notamment au regard des moyens, d’autant que la différenciation porte en elle-même le risque d’une inégalité territoriale qui se creuserait encore davantage avec le temps. Si nous voulons que ce nouveau souffle territorial soit porteur d’un meilleur avenir pour nos collectivités, il faudra se montrer particulièrement vigilant dans les années à venir pour éviter toute forme de dérives et de particularismes locaux au détriment des territoires moins favorisés.
Reste qu’il est difficile de rejeter ce projet de loi pour ce motif, tant il est fait de dispositions diverses qui comportent de bonnes mesures, pour beaucoup introduites par le Sénat. Parmi ces améliorations, je pense à l’article inséré dans le texte après l’adoption de l’amendement de notre collègue Jean-Yves Roux visant à permettre aux communes touristiques membres d’une communauté d’agglomération de retrouver l’exercice de la compétence « promotion du tourisme ». Nos débats nous auront aussi permis d’éviter de commettre certaines erreurs, comme sur la modification de la composition des Ceser, à travers un amendement que je portais au nom de mon groupe.
J’aimerais revenir sur la non-suppression de l’article 7 du projet de loi, qui institue une expérimentation permettant aux régions d’exercer la compétence d’aménagement et de gestion des routes nationales et autoroutes non concédées.
Nous avons dit combien cette disposition nous interrogeait quant à la lisibilité des compétences des collectivités en matière de voirie routière, d’autant que les départements sont connus et reconnus pour l’exploitation de leur domaine routier, alors que les régions sont loin de disposer de telles compétences. Aussi, je regrette que cet article n’ait finalement pas été supprimé à la faveur d’un second vote, à minuit et demi, hier soir, alors que l’amendement que je portais avait été adopté dans la semaine.
Pour l’essentiel, notre groupe demeure attaché aux communes et aux départements et ne souhaite pas privilégier à l’excès les échelons intercommunaux et régionaux.