Intervention de Alain Milon

Réunion du 17 février 2011 à 15h00
Réforme de l'hôpital — Discussion d'une proposition de loi

Photo de Alain MilonAlain Milon, rapporteur :

Mais je ferme la parenthèse.

L’article 2 de la proposition de loi prévoit une nouvelle rédaction de la définition des maisons de santé, qui sera la troisième depuis leur création en 2008. Cette partie de l’article n’appelle pas de longs commentaires, d’autant qu’un nouvel amendement du Gouvernement remet en cause à la fois le texte de la commission et celui de la proposition de loi initiale. Mais je voudrais, en revanche, insister sur le problème du partage des informations sur la santé des patients, que pose aussi cet article.

J’ai été un peu surpris – et je n’ai pas été le seul ! – par l’idée selon laquelle l’exercice coordonné au sein d’une structure supposerait un élargissement de la communication des données personnelles et de santé des patients.

La commission n’a pas non plus compris pourquoi le partage des informations sur la santé des patients devrait obéir à des règles différentes selon que les soins de ville sont assurés par des praticiens et des auxiliaires médicaux exerçant individuellement ou par des professionnels regroupés dans une maison de santé.

Nous n’avons pas accepté, en tout cas, de considérer que le consentement au partage des informations médicales pouvait se présumer. À cet égard, je rappelle dans cet hémicycle, comme je l’ai fait en commission, ce que m’avait appris l’un de mes professeurs de médecine : « le secret médical appartient au malade ». J’ajoute que le droit au respect de la vie privée est constitutionnellement protégé.

C’est dans le même esprit que nous avons supprimé l’article 12, qui prévoyait, avec un peu de légèreté, que l’on se passe, jusqu’à l’entrée en vigueur de la proposition de loi dont nous commençons l’examen aujourd’hui, du consentement des patients à l’hébergement des données de santé collectées dans les établissements de soins, ce qui, je viens de le rappeler, serait contraire à une exigence de nature constitutionnelle.

Au moment où l’on espère enfin le démarrage du dossier médical personnel, et pour encourager l’adhésion à un outil qui sera très utile, il nous paraît important de préserver et de renforcer la relation de confiance entre patient et médecin, de ne pas troubler ce « colloque singulier » sans lequel, d’ailleurs, il n’est pas de bonne médecine.

J’en viens à présent au volet social et médico-social de la proposition de loi, qui rassemble, dans les trois derniers articles du texte, des mesures simples et de bon sens. Notre commission les a donc accueillies très favorablement.

L’article 14, tout d’abord, permettra de sécuriser le statut juridique des groupements de coopération sociale ou médico-sociale, les GCSMS, en supprimant une ambiguïté résultant des modifications apportées par la loi HPST et par l’ordonnance de coordination de février 2010, sur la transposition ou non, au secteur social et médico-social, de la distinction entre GCS de « moyens » et GCS « établissements ».

Afin de lever toute incertitude, cet article énonce clairement que le GCSMS n’a pas la qualité d’établissement social ou médico-social. En effet, il n’a pas vocation à devenir un établissement social ou médico-social titulaire d’une autorisation.

Notre commission avait émis de profondes réserves sur la pertinence des GCS « établissements » lors de l’examen de la loi HPST ; nous approuvons donc pleinement cette utile clarification.

L’article 15, ensuite, réécrit la section IV du budget de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie, la CNSA, relative au financement des actions de modernisation des établissements et services pour personnes âgées et personnes handicapées, et des actions de formation et de professionnalisation des personnels intervenant auprès de ces publics.

Il supprime la division en deux sous-sections – l’une consacrée aux personnes âgées, l’autre aux personnes handicapées – afin de mutualiser les financements attribués aux mêmes types d’actions. Il donne aussi à la CNSA la possibilité de déléguer, dans certains cas, aux ARS la gestion des crédits correspondants.

Il apporte donc des mesures de rationalisation et de simplification administrative très positives, et qui ont été d’ailleurs élaborées en accord avec la CNSA.

L’article 16, enfin, tend à clarifier la procédure applicable aux transformations d’établissements sociaux ou médico-sociaux. Une lecture combinée des dispositions législatives et réglementaires laisse en effet supposer que certaines transformations – celles qui ne modifient pas la catégorie de bénéficiaires de l’établissement ou du service – peuvent être mises en œuvre sans autorisation préalable. Une telle interprétation ne peut évidemment pas être soutenue, compte tenu des enjeux associés à la nouvelle procédure d’autorisation à laquelle sont attachées de nombreuses protections des personnes accueillies.

Les projets de transformation sans changement de la catégorie de bénéficiaires ne seront donc pas exemptés de la procédure d’autorisation. En revanche, dans un souci d’allégement des démarches administratives, ces projets seront dispensés de l’appel à projet. Cette solution nous a paru équilibrée.

Le temps nous étant compté, monsieur le président, je ne passerai pas en revue les mesures plus ponctuelles, et de nature diverse, que comporte la proposition de loi. Nous y reviendrons lors de la discussion des articles.

Je voudrais tout de même dire un mot de l’article 9 qui concerne les fondations hospitalières et qui tient particulièrement à cœur à Jean-Pierre Fourcade.

La loi HPST a créé cette nouvelle catégorie de fondations, en s’inspirant des fondations universitaires, pour développer la recherche médicale et promouvoir le transfert de crédits privés vers la recherche publique au sein des établissements publics de santé.

Un décret en Conseil d’État devait fixer les règles générales de fonctionnement de ces fondations hospitalières. Mais le projet de décret soumis au Conseil d’État n’a pas recueilli son assentiment. En effet, il a relevé, à juste titre, que la loi HPST ne permet pas aux fondations hospitalières de s’affranchir de la quasi-totalité des règles applicables aux fondations reconnues d’utilité publique.

L’article 9 tend donc à leur permettre d’y déroger. Il prévoit, par exemple, que les fondateurs disposeront de la majorité au conseil d’administration de la fondation et que les directeurs généraux des ARS auront le pouvoir de contrôler les fonds affectés aux fondations par les établissements publics de santé – et seulement ceux-ci.

Cette nouvelle rédaction ne nous a pas paru satisfaisante. Elle n’apporte en effet, selon nous, aucune garantie ni en matière de prévention des risques ou de conflits d’intérêts, ni sur le plan du contrôle de l’utilisation des fonds publics hospitaliers.

C’est pourquoi la commission a supprimé cet article. Nous avons considéré qu’il n’y avait pas de réelle urgence et qu’il était plus sage d’approfondir la réflexion sur ce point, d’autant que nous pouvons parfaitement nous en tenir au texte actuel de la loi HPST et que d’autres dispositifs juridiques peuvent être utilisés, comme les fondations de coopération scientifique.

J’ajoute d’ailleurs que, pour bénéficier de financements accordés dans le cadre du grand emprunt, le statut requis est celui des fondations de coopération scientifique.

Je mentionnerai également deux articles qui ont été ajoutés par notre commission au texte initial de la proposition de loi.

Le premier, l’article 14 A, prévoit la suppression des groupements de coopération sanitaires « établissements », sur lesquels nous avions exprimé d’assez vives réserves lors de l’examen de la loi HPST et qui ne sont toujours pas convaincants.

Le second, l’article 9 bis, tend à faire avancer l’idée d’une publication des liens d’intérêts entre médecins et laboratoires, sur le modèle des Sunshine Acts américains.

Ce texte, très technique, nous offrait l’opportunité d’améliorer la loi HPST. Nous ne pouvions que la saisir. C’est pourquoi, mes chers collègues, la commission des affaires sociales demande au Sénat d’adopter la proposition de loi dans le texte de la commission, complété par les amendements auxquels elle a donné un avis favorable.

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