Intervention de Anne-Catherine Loisier

Commission des affaires économiques — Réunion du 15 septembre 2021 à 9h30
Proposition de loi visant à protéger la rémunération des agriculteurs — Examen du rapport et du texte de la commission

Photo de Anne-Catherine LoisierAnne-Catherine Loisier, rapporteure :

Avec l'amendement COM-138, je vous propose une nouvelle rédaction de cet article pour mieux encadrer les produits alimentaires vendus sous marque de distributeur qui aujourd'hui échappent à nombre de règles applicables aux marques nationales et ne sont pas concernés par les mécanismes visant à améliorer le revenu des agriculteurs.

Il est vrai que les marques nationales et les MDD n'obéissent pas à la même philosophie. Pour les marques nationales, le produit est la propriété de l'industriel, qui cherche à la vendre dans des rayons que la grande distribution lui met à disposition : le distributeur est en quelque sorte un prestataire de services ; pour les MDD, c'est le distributeur qui élabore un cahier des charges pour un type de produit dont il aura ensuite la pleine propriété ; l'industriel, PME ou non, est alors son prestataire de services en amont, puisqu'il répond à l'appel d'offres et qu'il produit pour le distributeur.

Si cette différence est réelle et explique pourquoi certaines règles ne peuvent pas être transposées des marques nationales vers les MDD, elle est interprétée très largement, au point qu'elle sert surtout à ne rien changer pour les MDD - il est donc temps que cette dichotomie cesse.

L'Assemblée nationale avait proposé que les contrats de MDD intègrent une clause sur le volume prévisionnel. Je vous propose un encadrement bien plus ambitieux.

En effet, mon amendement intègre dans les contrats de MDD une clause de révision automatique des prix en fonction de la variation du coût des matières premières agricoles supportée par le fabricant. Cette clause devra tenir compte des indicateurs de coût de production.

Deuxièmement, il rappelle que les contrats de MDD doivent avoir une durée minimale de trois ans, sauf bien sûr pour les contrats liés à une campagne spécifique ou à certaines spécificités du produit.

Troisièmement, l'appel d'offres et le contrat devront comporter un engagement du distributeur en matière de volume prévisionnel et, lorsque ce volume n'est pas respecté, le distributeur devra se justifier auprès du fabricant. Je souhaitais au départ prévoir un volume ferme, comme plusieurs de vos amendements le prévoient, mais il est vite apparu que ce serait intenable, car les contrats de MDD sont souvent sur longue période, voire sans date de fin. Par conséquent, comme le distributeur ne veut pas s'engager sur un volume ferme sur cinq ou six ans, il multipliera les contrats très courts, d'un an, ce qui fragilisera encore plus le fabricant.

Quatrièmement, le contrat de MDD devra définir la durée minimale du préavis à respecter en cas de rupture. Le fait que cette durée soit parfois absente du contrat ouvre la voie à tous les abus... L'amendement indique également que les modalités d'écoulement des emballages et des produits finis en cas de cessation du contrat devront être prévues par le contrat.

Cinquièmement, le contrat devra comporter une clause de répartition des coûts entre distributeur et fabricant, et notamment des coûts additionnels qui pourraient survenir en cours d'exécution.

Sixièmement, il sera interdit de mettre à la charge du fabricant les opérations de mise en avant du produit MDD dans les rayons, puisque ces opérations renforcent la notoriété du distributeur, et non du fabricant.

Enfin, septièmement, le contrat devra établir un système d'alerte et d'échanges d'informations périodiques entre le distributeur et le fabricant.

Le fait de prévoir un volume ferme ne sécurisera pas mais fragilisera le fabricant, car le distributeur multipliera alors les contrats courts. En conséquence, avis défavorable aux amendements identiques COM-38 rectifié, COM-61 rectifié, COM-90 rectifié bis et COM-122.

Les neuf amendements identiques COM-14 rectifié, COM-20 rectifié, COM-27 rectifié quinquies, COM-32 rectifié nonies, COM-52 rectifié bis, COM-70, COM-76 rectifié bis, COM-101 rectifié et COM-124 prévoient que les indicateurs de référence soient également pris en compte dans la détermination du prix des MDD. Or le droit en vigueur impose déjà d'y faire référence et d'expliciter la façon dont il en est tenu compte, et crée une clause de révision automatique des prix qui s'appuie sur ces indicateurs. Avis défavorable aux neuf amendements.

L'amendement COM-138 est adopté. L'article 2 bis B est ainsi rédigé, et les amendements COM-38 rectifié, COM-61 rectifié, COM-90 rectifié bis, et COM-122 deviennent sans objet, de même que les amendements COM-14 rectifié, COM-20 rectifié, COM-27 rectifié quinquies, COM-32 rectifié nonies, COM-52 rectifié bis, COM-70, COM-76 rectifié bis, COM-101 rectifié et COM-124.

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