Intervention de Guy Fischer

Réunion du 15 novembre 2006 à 15h00
Financement de la sécurité sociale pour 2007 — Article 21

Photo de Guy FischerGuy Fischer :

Au sein de cette somme déjà colossale, le montant des exonérations non compensées pourrait représenter 2, 6 milliards d'euros, soit quelque 10 % du total, alors qu'il était de 2, 2 milliards d'euros pour 2006, montant déjà inadmissible.

Une telle perte de recettes contribue largement au creusement du déficit des comptes sociaux, et c'est l'ensemble des assurés sociaux qui pâtit des conséquences de tels arbitrages.

Outre cela, des voix de plus en plus nombreuses et de tous bords se font entendre, pour dénoncer le caractère inopérant des exonérations de charges sociales.

J'ai déjà eu l'occasion d'évoquer le rapport de la Cour des comptes de juillet dernier sur ce sujet. On y lit que ces exonérations sont consenties sans la moindre évaluation ou analyse d'impact, les seules conséquences avérées restant, à ce jour, le « mitage » désastreux de l'assiette des cotisations sociales. Il s'agit en fait, grâce à des effets d'aubaine, de permettre aux entreprises d'améliorer considérablement leurs résultats, les créations d'emplois restant aléatoires.

Le rapport de la Cour des comptes traite aussi d'une autre conséquence négative de ces exonérations : elles profitent principalement à certains secteurs d'activité, en particulier dans les services, et constituent un effet d'aubaine pour les entreprises qui y ont recours, les rémunérations se trouvant bloquées à leur plus bas niveau.

En France, le fait majeur de cette dernière décennie, c'est un tassement des rémunérations : je parlais tout à l'heure de « smicardisation ». On sait que les contrats aidés prévoient bien souvent un horaire de travail limité, que ce soit à 29 heures ou à 35 heures. En conséquence, le salaire des personnes concernées n'atteint que 50 % ou 70 % du SMIC ! Telle est la réalité.

Ces conséquences dramatiques en termes d'emploi vont s'aggraver un peu plus encore avec l'application des dispositions de l'article 21.

Les stagiaires sont déjà victimes de conditions d'emploi intolérables. À cet égard, on retrouve une fois encore le double jeu du Gouvernement : d'un côté, il dit s'en émouvoir et se propose de légiférer ; mais, de l'autre, il refuse de trop contraindre les entreprises, alors il leur consent de nouvelles exonérations de charges. En cette période, il est particulièrement attentif aux discours et aux appels des représentants des entreprises !

Il en résulte, monsieur le ministre délégué, que vous rétablissez l'attractivité des stages en mettant l'accent non pas sur la formation, mais plutôt sur la mise à disposition d'une main-d'oeuvre qualifiée et à bas coût. Sur ce plan, j'ai à l'esprit l'exemple d'un très grand laboratoire lyonnais, que je ne citerai pas. Dans ce laboratoire, un docteur vétérinaire ayant effectué neuf années d'études après le baccalauréat s'est vu proposer un stage rémunéré à hauteur de 700 euros par mois !

La même logique sous-tend les deux autres dispositifs visés par cet article. Décidément, le développement des exonérations de charges doit être stoppé. Elles ne sont pas seulement inefficaces, elles ne se résument pas à de simples cadeaux consentis au patronat, elles sont au contraire lourdes de conséquences en matière d'emploi et de rémunération ; elles contribuent à l'explosion de la précarité.

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