Depuis la loi Douste-Blazy du 13 août 2004, la logique à l'oeuvre est claire : faire peser la responsabilité des déficits sociaux sur les assurés sociaux eux-mêmes, suspectés d'être peu regardants en matière de soins, donc de dépenser sans compter ou d'être de véritables fraudeurs.
Nous l'avons vu avec la contribution de 1 euro et celle de 18 euros sur les actes lourds : il s'agit de « responsabiliser » les assurés sociaux et de réduire, à leurs dépens, les dépenses de santé.
La limitation des sorties à trois heures par jour en cas d'arrêt maladie est une autre illustration de ce mécanisme. La majorité s'acharne à faire passer les travailleurs pour des tricheurs, cherchant à tout prix à obtenir de façon abusive des arrêts maladie. La chasse aux prétendus faux arrêts maladie a donc été présentée comme une source d'économies indispensables. Mais les conséquences de telles dispositions sur les assurés sociaux, et les malades en particulier, ont été jusqu'à présent tout simplement occultées.
Dans leur majorité, les médecins déclarent ne voir quasiment jamais de faux malades. En revanche, les cabinets médicaux accueillent de plus en plus de vrais malades qui refusent de s'arrêter, soit parce qu'ils savent qu'ils ne seront pas remplacés durant leur absence, soit parce qu'ils craignent pour leur emploi à leur retour. Telle est la réalité qui s'impose de plus en plus aux malades.
Cette peur d'être sanctionné, voire de perdre son emploi, dans un contexte général d'insécurité sociale et de précarité, est largement plus préoccupante que la question des fraudes, à propos desquelles vous orchestrez un battage médiatico-politique indécent.
Quant à la limitation à trois heures des sorties en cas d'arrêt maladie, elle est carrément contraire à l'objectif de rétablissement des malades, qui devrait être visé. Pour de nombreuses pathologies graves, comme les cancers, en particulier, ou les cas de plus en plus nombreux de dépression, cette contrainte est vécue comme un véritable enfermement et une sanction insupportable.
Pour une personne gravement malade ou en dépression, le maintien des liens de sociabilité est partie prenante de la guérison. Tous les médecins s'accordent sur la nécessité de maintenir une vie sociale riche, en limitant les changements par rapport à la situation antérieure à la maladie.
Avec cet article 32, vous prenez tout de même la mesure de votre erreur et des conséquences dramatiques qu'elle a provoquées. Mais vous restez malgré tout dans votre logique de suspicion et de contrôle, puisqu'un décret en Conseil d'État déterminera les exceptions.
Nous pensons au contraire, rejoignant en cela ce que vient de dire Mme Le Texier, que seul le médecin est capable d'apprécier les modalités de sortie de son patient et que le Gouvernement n'est pas compétent dans ce domaine.
Je sais bien que les indemnités journalières ont baissé : c'était l'un des objectifs de la CNAM. Les abus marginaux ont été réprimés, et ils devaient l'être, nous en convenons. Mais quand il s'agit du plus grand nombre, je crois que nous pouvons nous en tenir au point de vue du médecin traitant, généraliste ou spécialiste.
Tel est l'objet de cet amendement, qui rétablit pleinement la compétence du médecin dans la fixation des horaires de sortie.