Je m’empresse de dire que cet amendement est identique à celui de la commission de la culture, ainsi qu’à celui de Mme Bricq et des membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés et à celui de M. Ralite et des membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du Parti de gauche.
Certes, cette conjonction peut a priori sembler quelque peu surprenante, mais nous souhaitons tous supprimer l’article 50 bis pour rétablir l’égalité de traitement dans le calcul de la taxe sur les services de télévision entre les distributeurs de services de télévision par ADSL ou satellite, d’une part, et par réseau câblé, d’autre part.
L’article 50 bis tend à introduire un régime dérogatoire permettant aux opérateurs de réseaux câblés de fractionner l’assiette de la taxe sur les services de télévision, dite taxe COSIP, la taxe alimentant le compte de soutien à l’industrie des programmes audiovisuels, due au Centre national de la cinématographie, après que celui-ci a été supprimé en mars dernier par le Sénat, lors de l’adoption de la loi relative à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision.
Or, selon nous, l’article 50 bis n’est pas conforme au droit communautaire et prive le Centre national de la cinématographie de recettes de l’ordre de 6 millions d’euros.
Les modalités de calcul dérogatoires de cette taxe, en faveur des opérateurs de réseaux câblés introduisent une distorsion de concurrence entre les distributeurs de services de télévision. D’une part, le distributeur qui opère par ADSL ou par satellite acquitte la taxe sur l’intégralité des encaissements des abonnements perçus au niveau national. D’autre part, le distributeur qui exploite un réseau câblé règle la taxe sur le montant des recettes d’abonnement encaissé au niveau de chaque réseau câblé.
Ce mode de calcul est doublement – et anormalement ! – favorable aux câblo-opérateurs.
Premièrement, la franchise s’applique, dans le cadre de chaque réseau câblé, pour chacune des conventions signées avec les différentes collectivités territoriales, alors qu’elle ne s’applique qu’une seule fois dans le cas d’un distributeur par ADSL ou par satellite.
Deuxièmement, un effet de seuil atténue considérablement l’application des taux progressifs les plus élevés. Le premier taux est de 0, 5 % pour la fraction supérieure à 10 millions d’euros, tandis que le dernier est de 4, 5 % pour la fraction supérieure à 530 millions d’euros. Je rappelle que le montant des abonnements encaissés dans le cadre d’un réseau atteint rarement les paliers les plus élevés.
Troisièmement, je le répète, le fractionnement de l’assiette conduit à une perte annuelle de recettes pour le Centre national de la cinématographie estimée à plus de 6 millions d’euros.
Quatrièmement, cette inégalité de traitement devant les charges publiques pour des activités identiques est contraire au droit communautaire et est donc susceptible d’être qualifiée d’aide d’État déguisée.
Cinquièmement, elle méconnaît également le respect du principe de la neutralité technologique, formulé dès 2001 par le droit communautaire.
L’ensemble des directives appelées « paquet Télécom », transposées dans la loi du 9 juillet 2004, a garanti un cadre juridique harmonisé et non discriminatoire à l’ensemble des réseaux de communications électroniques, et ce quelles que soient les technologies empruntées. Celles-ci imposent des obligations similaires à l’ensemble des opérateurs, y compris aux réseaux câblés. Or, seuls les opérateurs de réseaux câblés sont susceptibles d’être concernés par cette dérogation.
En outre, il convient de souligner que 98 % du marché des câblo-opérateurs est détenu par une seule société.
Sixièmement, enfin, l’argument tendant à faire valoir que le réseau câblé serait confronté à une situation différente de celle de ses concurrents, car assujetti à des charges plus lourdes, me paraît assez contestable.
Le déploiement ville par ville, mis en avant par Numericable, ne lui est pas propre. Tous les opérateurs ADSL soumis à la taxe, qu’il s’agisse d’Orange, de Free, d’Alice, de SFR, de Neuf Cegetel, de Télé 2 ou même de Darty, se déploient également ville par ville, en créant leur propre réseau. Pour autant, le montant de la taxe qu’ils acquittent est bel et bien calculé à partir du chiffre d’affaires national.
L’offre de programmes de Numericable est composée au niveau national, et non dans le cadre de chaque réseau. Il a donc une activité identique à celle des autres distributeurs.
La conclusion de conventions avec les collectivités ne constitue pas uniquement une source d’obligations. Elle permet également aux collectivités de participer financièrement à la rénovation des réseaux de Numericable pour assurer le passage à la fibre optique. C’est un vecteur de financement public.
Enfin, si l’aide accordée se justifiait en 2007 en raison des difficultés financières de ce secteur, ce n’est plus le cas aujourd’hui. Le chiffre d’affaires de Numericable sur la télévision s’élevait en 2008 à 609 millions d’euros, en progression de 5, 3 %. C’est une société très confirmée, ce dont on ne peut naturellement que se réjouir.
En conclusion, tous les distributeurs de services de télévision doivent être taxés selon la même logique – sans prévoir de niche fiscale ! –, et indépendamment de la technologie utilisée, ADSL, satellite ou réseau câblé.
Telles sont les raisons qui ont motivé l’amendement n° II-167.