Intervention de Louis de Broissia

Réunion du 28 mars 2006 à 16h30
Développement des télévisions de proximité en france — Débat sur un rapport d'information

Photo de Louis de BroissiaLouis de Broissia, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, tout d'abord qu'il me soit permis de remercier mon collègue et ami Claude Belot ainsi que la commission des finances, et son président, d'avoir pris l'heureuse initiative de ce débat.

Je dois avouer, monsieur le ministre, mais vous le savez, que le lieu du débat est bien choisi. Sans vouloir dénigrer nos collègues députés, je rappelle que le Sénat, traditionnellement au fait des problématiques liées à l'aménagement du territoire, ou devrais-je dire des problématiques liées à l'aménagement des territoires, est l'endroit le mieux indiqué pour débattre du développement des services de proximité. À cet égard, les télévisions locales constituent des services de proximité par définition.

Je remercie également la commission des affaires culturelles, qui a bien voulu me nommer rapporteur sur ce sujet.

Enfin, je profite de cette déclaration liminaire pour excuser l'absence de M. Bernard Saugey, qui a été retenu par une obligation urgente. Il m'a demandé de parler en son nom.

Comme l'a dit Claude Belot - et je ne pourrais que le répéter, car nous sommes en phase sur ce sujet, comme sur tant d'autres -, notre pays possède un nombre important de collectivités territoriales dynamiques. Néanmoins, reconnaissons que nous n'avons pas complètement réussi à faire émerger des services locaux de qualité. Là où ces services existent dans le domaine de la télévision, ils rencontrent pourtant un véritable succès auprès de nos concitoyens.

De surcroît, les questions que nous nous posons avec France Télévisions sur l'évolution légitime et forte que nous souhaitions pour France 3, souvent en situation de monopole, sont au coeur du débat de ce soir.

Alors que de nouvelles opportunités s'offrent à nous, les incertitudes concernant le financement de ces services, la place qui leur sera finalement réservée sur la TNT ainsi que les inquiétudes relatives au degré d'engagement de la presse quotidienne régionale font partie des éléments du décor de ce soir.

L'avenir des chaînes locales en France est moins sombre aujourd'hui qu'il y a deux ans. À cette époque, dans la lignée des conclusions du rapport Françaix, je regrettais à cette tribune, à l'occasion de la discussion du « paquet télécom », que notre pays, à l'échelle européenne, fasse encore figure de « parent pauvre » en matière de télévisions hertziennes de proximité.

Certes, nous avions France 3 et ses décrochages régionaux, mais avec huit chaînes métropolitaines et dix chaînes ultramarines, nous étions encore bien loin des objectifs fixés par le plan Bredin prévoyant la création de quatre-vingts télévisions hertziennes de proximité. Du retard s'accumulait.

Alors que le nombre de services locaux diffusés sur les autres réseaux continuait à progresser, les initiatives conjuguées du Gouvernement et du CSA ont heureusement contribué à définir un cadre économique, juridique et technique favorable au développement des services locaux hertziens. À tel point que nous pouvons aujourd'hui nous flatter d'avoir rattrapé une partie, mais une partie seulement, du retard accumulé par rapport à nos partenaires.

Afin que ce type de média de proximité ne soit pas « condamné à végéter durablement », pour reprendre l'expression utilisée par le rapport Boyon, le Gouvernement a su redéfinir les obligations pesant sur les chaînes locales.

Claude Belot vient de rappeler que le décret du 7 octobre 2003 a apporté sa pierre, parfois contestée, à l'édifice en réservant l'exclusivité de l'ouverture de la publicité télévisée au secteur de la distribution aux chaînes locales entre le 1er janvier 2004 et le 1er janvier 2007. Vous le savez, la presse quotidienne régionale surveille cette évolution avec une vigilance extrême.

L'ouverture - délicate - des secteurs interdits devrait ainsi se réaliser progressivement et de manière ciblée afin de ne pas accroître les déséquilibres préjudiciables au pluralisme et à la concurrence, sur le plan tant audiovisuel que de la presse écrite.

Les dispositions de la loi du 9 juillet 2004 relative aux communications électroniques et aux services de communication audiovisuelle ont, quant à elles, considérablement assoupli le cadre juridique applicable à ces services.

Suivant les propositions du Gouvernement, le Parlement a d'abord adopté des dispositions fiscales adaptées à leur spécificité. La loi a ainsi permis d'exonérer les télévisions locales les plus modestes de la taxe sur les messages publicitaires.

En outre, sur l'initiative du Sénat, « les rémunérations versées par les collectivités territoriales et leurs groupements pour la mise en oeuvre d'un contrat d'objectifs et de moyens correspondant à l'édition d'un service de télévision locale » bénéficient désormais d'un taux réduit de TVA à 5, 5 %.

Plusieurs dispositions proposées par le Gouvernement ont également allégé le dispositif de contrôle des concentrations prévu par la loi du 30 septembre 1986 sans le démanteler ni le vider de sa substance. Permettant de concilier le développement des télévisions locales - avec lenteur - et la sauvegarde du pluralisme, ces dispositions ont notamment contribué à lever l'interdiction de posséder plus de 50 % du capital d'une chaîne locale hertzienne, conformément aux préconisations du rapport Boyon. Elles ont également contribué à assouplir la règle interdisant de cumuler une autorisation hertzienne nationale et une autorisation hertzienne locale, à relever de six millions à dix millions de téléspectateurs le seuil à partir duquel un service est considéré comme national et à relever - on voit là que le Parlement a également bien travaillé - de six millions à douze millions de téléspectateurs le plafond de cumul de plusieurs autorisations locales par un même opérateur.

Le décor est donc planté. Cette redéfinition du cadre juridique et économique n'aurait toutefois pu avoir les effets escomptés - je tiens à le souligner après mon collègue Claude Belot - sans la mise en oeuvre par le régulateur qu'est le CSA - ce dernier s'étant fortement investi en ce sens - d'une politique volontariste d'attribution de fréquences en faveur des services locaux.

Dans un pays où le hertzien demeure encore le moyen le plus utilisé pour accéder aux programmes télévisés, l'attribution de fréquences analogiques reste, en effet, nécessaire pour donner aux télévisions locales, en particulier, la possibilité de démarrer et, par la suite, de recueillir une certaine audience.

Cette politique d'attribution permet ainsi aux services locaux, qu'ils disposent d'autorisations temporaires ou permanentes, d'asseoir leur place dans un paysage audiovisuel français dont vous savez, monsieur le ministre, qu'il était l'un des plus resserrés d'Europe.

Cette politique permet surtout, mes chers collègues, d'offrir aux services locaux un bassin de téléspectateurs suffisant pour envisager la mise en place d'une politique de syndication publicitaire susceptible d'attirer les publicités des annonceurs nationaux. Le meilleur exemple, nous le savons tous, est celui du service dit PQR 66, qui offre aux annonceurs nationaux une publication simultanée dans tous les titres de la presse quotidienne régionale et départementale.

Dès lors, ma question est la suivante : quel bilan peut-on aujourd'hui dresser de cette politique incitative menée de front non seulement par le Gouvernement et le Parlement, mais aussi par le CSA ?

Force est de constater qu'elle a porté ses fruits en métropole. Vous avez d'ailleurs eu l'occasion de le constater vous-même récemment, monsieur le ministre, ...

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