Il existe une tradition française du rôle important de l'État dans l'activité économique et industrielle, qui passe notamment sous la Ve République par l'utilisation de la commande publique pour fabriquer des champions nationaux. Ce n'est pas un hasard si Marcel Dassault, qui a monté son entreprise largement sur le développement d'équipements militaires, a cherché une activité dans la presse pour conforter son influence auprès de son donneur d'ordre.
Quand on voit la manière dont s'est constitué le secteur audiovisuel, et singulièrement la télévision, on voit que le général de Gaulle avait voulu que ce fût un monopole d'État, précisément pour contrer le pouvoir politique de la presse, qui était plus diversifiée et indépendante à l'époque. Lorsqu'il s'est agi d'ouvrir le monopole d'État à l'entrée de nouveaux acteurs, le président Mitterrand a choisi celui qui devait devenir son exécuteur testamentaire pour lui confier la première concession de télévision privée - fait très original en France, elle était payante, alors que tous les autres pays du monde avaient libéralisé la télévision en la rendant gratuite.
Les médias ont donc été, au moins dans le régime de la télévision, concédés contre obligations à des amis du pouvoir, qui étaient des industriels puissants dans le pays.
Au fur et à mesure que le paysage s'est complexifié et diversifié moyennant l'apparition de technologies nouvelles, l'organisation industrielle s'est, elle aussi, développée suivant ces conditions initiales.