Intervention de Guy Fischer

Réunion du 31 mars 2011 à 15h00
Régime des astreintes et système de forfaits en jours — Rejet d'une proposition de résolution

Photo de Guy FischerGuy Fischer :

Or, c’est bien sûr cela que porte le reproche du Comité européen des droits sociaux.

L’application du forfait annuel en jours étendue à tous les salariés entraîne un rythme et une amplitude de travail déraisonnables. En pratique, le nombre maximal de jours travaillés peut aller, compte tenu des limites prévues actuellement dans la loi, jusqu’à 282 jours par an, à raison d’une durée hebdomadaire de travail pouvant atteindre 78 heures ! Voilà ce que le CEDS estime déraisonnable et qui doit changer !

Il faut également que le Gouvernement prenne toutes les mesures qui s’imposent pour faire cesser la violation de l’article 4, alinéa 2, de la Charte quant au droit des salariés à une rémunération équitable, et ce pour deux raisons.

Tout d’abord, parce qu’il s’agit du principe qui, croyait-on, était celui qu’avait édicté par le Président de la République : ceux qui travaillent plus longtemps que les autres doivent percevoir une rémunération complémentaire. Il ne s’agit là, après tout, que de l’application de l’adage selon lequel « tout travail mérite salaire » !

Ensuite, parce que la garantie pour les salariés de percevoir une juste rémunération, fonction de la réalité de la quantité de travail qu’ils accomplissent, participe de la responsabilisation des employeurs, jusqu’alors peu soucieux des amplitudes horaires qu’ils imposent.

En conclusion, j’évoquerai le second élément de cette proposition de résolution, à savoir la nécessaire modification des règles concernant l’astreinte.

Monsieur le ministre, selon une formule souvent employée, l’astreinte est une « zone grise » puisqu’il ne s’agit ni d’un temps de travail ni d’un temps de repos. En effet, l’article L. 3121-1 du code du travail issu de la loi du 13 juin 1998 définit la durée de travail effectif comme « le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l’employeur et se conforme à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles ». D’une certaine manière, c’est un « ni-ni » : ni repos ni temps de travail, car, même si le salarié n’est pas, au moment considéré, sous l’autorité de l’employeur, il ne peut toutefois pas vaquer librement à ses occupations puisque, par définition, le salarié doit pouvoir être joint et se déplacer suffisamment promptement pour intervenir sur son lieu de travail.

Pour le Comité européen des droits sociaux, cette situation paradoxale n’est pas conforme aux principes édictés dans la Charte sociale européenne révisée au motif que « les périodes d’astreinte pendant lesquelles le salarié n’a pas été amené à intervenir au service de l’employeur, si elles ne constituent pas un temps de travail effectif, ne peuvent néanmoins être, sans limitation, assimilées à un temps de repos au sens de l’article 2 de la Charte, sauf dans le cadre de professions déterminées ou dans des circonstances particulières et selon des mécanismes appropriés ».

Qu’il s’agisse de l’application du forfait annuel en jours ou des astreintes, notre pays viole, depuis des années, les dispositions contenues dans la Charte sociale européenne révisée. Cette situation doit cesser et le Gouvernement doit donc agir pour que notre législation nationale se conforme enfin à cette charte dont chacun aura compris qu’elle est la seule protection des salariés et de nos concitoyens face à une Europe de la dérégulation et de la concurrence libre et non faussée.

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