Intervention de Laurent Wauquiez

Réunion du 31 mars 2011 à 15h00
Régime des astreintes et système de forfaits en jours — Rejet d'une proposition de résolution

Laurent Wauquiez, ministre auprès du ministre d'État, ministre des affaires étrangères et européennes, chargé des affaires européennes :

Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, j’ai d’abord eu beaucoup de plaisir à écouter M. Fischer, que je suis heureux de retrouver, car nous avons souvent, lorsque j’exerçais mes précédentes responsabilités, travaillé et échangé sur les questions sociales. J’ai retrouvé, dans sa présentation de la proposition de résolution déposée par Annie David et le groupe CRC-SPG, son souci d’exhaustivité et de précision.

Pour autant, il me permettra de ne pas être d’accord avec lui – ce n’est pas la première fois ! –, y compris sur l’analyse juridique.

Avant d’entrer dans le détail de l’état de notre droit, permettez-moi de formuler trois remarques préliminaires.

La première a trait au rôle du Comité européen des droits sociaux. Je sais à quel point le groupe CRC-SPG est attaché au rôle de chacun et il dénonce souvent les rôles excessifs qui peuvent être impartis à des comités d’experts. Donc, ne nous y trompons pas : le Comité européen des droits sociaux est un comité d’experts et non une juridiction. De fait, ses prises de position ne tiennent pas compte de l’ensemble des dispositions contraignantes de notre ordre juridique – vous l’avez très bien rappelé, madame Kammermann –, notamment des directives de l’Union européenne, auxquelles la France se conforme évidemment.

Ma deuxième remarque porte sur la situation de fait, car c’est finalement ce qui nous importe réellement : quelle est la situation des cadres dans notre pays ? Les cadres français travaillent-ils plus ou moins que leurs voisins européens ? Notre législation est-elle plus ou moins contraignante que celle des autres pays de l’Europe ?

De ce point de vue, l’INSEE nous apporte un éclairage intéressant. Les cadres soumis au « forfait jours » déclarent travailler en moyenne 44 heures et demie par semaine. Autrement dit, toutes les études démontrent que les cadres français ont plutôt bénéficié de la réduction du temps de travail et, surtout, sont dans une situation largement plus favorable que leurs homologues de la plupart des pays européens. Ce n’est pas un argument en soi, mais c’est malgré tout un élément qui mérite d’être versé à nos débats.

Ma troisième remarque sera pour vous inviter à un petit effort de mémoire. Je suis particulièrement heureux de la formuler en présence de M. Mauroy, qui a beaucoup œuvré sur le terrain des lois sociales, selon une approche certes différente de la nôtre.

Ma formation est celle d’un historien. Il n’est pas excessif, me semble-t-il, d’essayer de nous souvenir des décisions qui ont été prises voilà dix ou onze ans. Les « forfaits jours » ne sont pas une invention de la droite : ils ont été instaurés par la loi Aubry 2.

Je veux bien que, tout d’un coup, dix ans après, on les pare de tous les méfaits, mais il faut tout de même avoir un peu de mémoire et de cohérence ! Il y a tout de même de quoi être un peu étonné de vous entendre ainsi critiquer le dispositif des « forfaits jours », que vous avez conçu, proposé et mis en place, et dont les lois de 2003 et de 2008 n’ont, par ailleurs, nullement remis en cause l’esprit.

Je crois qu’il n’était pas inutile de se livrer à ce petit exercice de mémoire collective.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion